19/12/16

Les Quatre filles du Dr March, de Louisa May Alcott : lu par Françoise Gillard

Cette relecture embaume l'enfance, la nostalgie, la douceur et la félicité. J'ai tout bonnement adoré ! Texte lu par Françoise Gillard qui propose une interprétation enjouée, aux accents mutins, très appréciable.

LES QUATRE FILLES DU DR

En cette veille de Noël, Meg, Jo, Beth et Amy se lamentent de célébrer les fêtes sans les flonflons habituels. Il y a d'abord la guerre, puis l'absence de leur père, qui les contraint de revoir leur train de vie, mais leur nature pleine d'abnégation supplante bien évidemment les plaintes pour la forme. Et de fait, elles n'hésitent pas à subvenir aux besoins des plus démunis, comme partager leur délicieux petit-déjeuner en offrant leurs brioches et autres friandises dans la joie et la bonne humeur. Cette belle harmonie familiale ne peut qu'interpeller leur jeune voisin, Laurie, qui vient de s'installer chez son grand-père M. Laurence et regarde souvent avec envie le manège des filles. Jo va ainsi le tirer de sa solitude et faire de lui son meilleur ami inséparable. Ensemble, ils partageront les premiers bals dans la bonne société, se cacheront derrière les tentures pour masquer une toilette défraîchie ou tromper une timidité maladive, ils se lanceront également sur le lac gelé avec leurs patins, partageront les confidences et effaceront d'un coup d'éponge les bouderies passagères. Toutefois, l'essence même du livre revient à la famille March, aux liens inextinguibles entre les sœurs, à leurs tempéraments distincts et colorés qui constituent néanmoins un ensemble cohérent et très attachant. Meg, l'aînée, est l'âme romantique, Jo le garçon manqué, Beth la fleur fragile et Amy le bébé capricieux. Avec leur maman, qu'elles soutiennent et qu'elles admirent, les quatre filles March vont contre vents et marées dans une existence perturbée par la guerre, la maladie, la pauvreté et la vieille tante March acariâtre. On passe ainsi une année chaleureuse, entre grands bonheurs et petites déceptions, à partager les rires et les pleurs de cette famille aux valeurs pieuses et apaisantes. C'est assez décalé avec notre époque, et à moins d'avoir une âme cynique irrécupérable, on ne se délecte pas moins de cet esprit délicieusement mièvre et onctueux. Une lecture adorable, parfaite pour la saison. 

Lu par Françoise Gillard pour les Éditions Thélème - Durée : 4 h 15 min (Version intégrale)

©1996 Nathan (P)2008 Éditions Thélème

Téléchargement disponible sur Audible

 

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14/04/10

Alors, ces Quatre Filles, roman mièvre, féminin et bien-pensant ?

Les_quatre_filles_du_pasteur_March_de_AlcottNon ! non ! non ! Je n'avais jamais lu le roman de Louisa May Alcott, son plus célèbre roman, Little Women, mais j'avais vu l'adaptation cinématographique de Gillian Armstrong (1995), que j'avais adorée. La nouvelle édition traduite et abrégée par Malika Ferdjoukh s'est donc efforcée de rattraper cet oubli et de corriger un sentiment erroné, à savoir que Little Women était un roman mièvre, féminin et bien-pensant. Cela n'est finalement pas du tout le cas !

Tout est de la faute de Pierre-Jules Hetzel, le traducteur, qui en 1872 a livré une adaptation très personnelle du roman de Louisa May Alcott (chaplain a été traduit par docteur, un terme qui demeurera ancré à jamais pour désigner l'oeuvre à travers le monde francophone). Il ira même jusqu'à se l'approprier sous le pseudonyme de P-J Stahl. Tout ceci est expliqué en détails dans l'introduction de Malika Ferdjoukh. Bénie soit-elle. Elle a dépoussiéré ce classique en livrant une version joyeuse, enfantine et pleine de bons sentiments. Cela a toujours été ainsi, certes. Mais j'ai trouvé en plus une fraîcheur dans l'histoire, que je connaissais pourtant par coeur, un souffle de légèreté, un air enlevé et pétillant. Jamais niais, bien au contraire. C'est pur, charmant et gracieux.

Et la vieille tante March qui serine que “dans une masure, l'amour fait toujours faillite”. Taratata. Les filles March nous prouvent le contraire. Elle sont pauvres, le père est à la guerre, son absence pèse mais les ressources ne manquent pas. Et puis, Laurie et son grand-père se révèlent des voisins attentionnés. Ah ! Laurie... j'avais oublié mon béguin. Triple soupirs. Je ne pardonnerai jamais Louisa May Alcott d'avoir osé briser le coeur de milliers de lectrices, heureusement ce roman (une suite n'était pas encore envisagée) nous ôte toutes nos pertes d'illusions. Et c'est sur de doux espoirs que nous refermons les dernières pages...

Jo alla s'installer dans son fauteuil préféré, avec un air grave et serein qui lui allait plutôt bien ; Laurie vint s'appuyer derrière elle, le menton touchant presque ses boucles ; il hocha la tête et lui adressa un sourire plein d'affection à travers le grand miroir qui les réfléchissait tous deux.

Cette délicieuse parenthèse (j'assume être une midinette) n'enlève pas la part de sérieux qu'offre le roman. Il est bien évident que c'est une dénonciation de la condition féminine  dans la société puritaine de l'Amérique du XIX° siècle. Et Jo March, à travers laquelle s'exprimait l'auteur, est une formidable rebelle, une passionnée qui agit en garçon manqué en rêvant d'indépendance.

Jo rêvait d'un grand accomplissement. Lequel ? Elle l'ignorait encore, mais fulminait de ne jamais pouvoir lire, courir, ou monter à cheval autant qu'elle l'aurait voulu. Son caractère emporté, sa langue bien pendue, son esprit qui moulinait sans repos lui valaient souvent des ennuis, et sa vie était une succession de hauts et de bas cocasses ou pathétiques.

A lire ou relire. Il n'est jamais trop tard.

Les quatre filles du pasteur March ~ Louisa May Alcott
édition traduite et abrégée par Malika Ferdjoukh
Classiques abrégés de l'école des loisirs (2010) - 235 pages - 6,00€

Cette collection se propose de rendre accessibles aux jeunes lecteurs de grandes oeuvres littéraires. Il ne s'agit jamais de résumés, ni de morceaux choisis, mais du texte même, abrégé de manière à laisser intacts le fil du récit, le ton, le style et le rythme de l'auteur.

illustration de la couverture : August Macke, Vier Mädchen

 

17/10/06

Secrets de famille - Louisa May Alcott

secrets_de_familleKate Snow est engagée comme gouvernante chez la famille Carruth pour prendre soin d'Elinor, une jeune fille affligée d'une maladie mentale (en fait, une dépression nerveuse doublée d'une profonde mélancolie). La famille Carruth est la cible d'une malédiction ancestrale : chaque héritier est persuadé d'être atteint de folie, pour remédier à cette tragédie les enfants s'interdisent de se marier. Or, Amy, la soeur d'Elinor, a justement entrepris d'épouser un certain Carroll, grand ami du redoutable Robert Steele, le mauvais esprit de la famille Carruth. Cet homme est une ombre menaçante sur la famille, il est omniprésent, s'arrogeant le droit d'imposer ses conditions chez ces infortunés, pris dans un étau, car Steele est le détenteur d'un secret, le confident d'une honte qui accable les Carruth.

Mais quel est donc ce secret ? Quelle véritable personnalité se cache derrière la figure farouche de Steele ? Et Kate Snow, petite bonne femme au caractère orgueilleux et décidé, quelle part cruciale va-t-elle s'accorder pour apporter la paix à Elinor et sa famille ? Car dans "Secrets de famille", il sera bien évidemment question de duplicité, d'amours naissantes, de tromperies et de drames en cascade. Louisa May Alcott a su diriger son histoire dans l'harmonie des romans sombres et oppressants, si le mot "harmonie" colle difficilement à cette idée... Mais Louisa May Alcott avait véritablement ce don pour la théâtralité, la tragédie en puissance et donnait à ses personnages féminins une tournure plus tapageuse que l'image de la blanche colombe, fragile des nerfs, et qui s'évanouissait au moindre mal. Dans "Secrets de famille", c'est Kate Snow qui tient la dragée haute. Elle n'est pourtant pas épargnée, car Louisa May Alcott ne la pare pas d'un halo totalement héroïque et salvateur. Sous la candeur, se cache forcément une fourberie en jupons... Encore un roman, injustement méconnu, de Louisa May Alcott à découvrir sans plus attendre !

Editions Interférences

  • Quelques jolis mots à propos de cette maison d'édition : " Si les lecteurs qui achètent nos livres font des découvertes et prennent plaisir à avoir entre les mains un objet conçu et fabriqué avec amour, nous n'en demandons pas plus ! "

 

Posté par clarabel76 à 19:21:00 - - Commentaires [12] - Permalien [#]
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Les yeux de Lady Macbeth - Louisa May Alcott

les_yeux_de_lady_macbethMax Erdmann est un artiste peintre qui peine à terminer son tableau de Lady Macbeth. Il lui manque les yeux, impossible de trouver cette flamme, "le regard fixe, atone, mais non dénué d'intelligence de lady Macbeth dans son sommeil halluciné". Un jour au théâtre, il rencontre la troublante, fascinante mais non moins mystérieuse Mlle Agatha Eure. Aucun doute possible, c'est elle qu'il lui faut pour incarner "cette étrangeté inquiétante". Le temps passant, Max va être séduit et épouser cette jeune fille, ignorant qu'il signe là un pacte d'aliénation, proche de la soumission irréversible, d'une dépendance incontrôlable. Car cette Agatha Eure possède un talent caché, secret, qui mettra des chaînes au peintre, persuadé jusque là d'être marié à son Art.

Ce petit roman de Louisa May Alcott a bien failli tomber dans les oubliettes, heureusement des bonnes âmes ont entrepris de traduire et publier l'oeuvre, autrement qualifiée de méconnue, de l'auteur des "Quatre filles du Dr March". Cette passionnée de romans noirs et tragiques, de théâtre de Shakespeare, n'a pas hésité à braver l'interdit de l'époque en écrivant ce genre de littérature fantastique et morbide où les personnages ont des visions, se perdent dans la folie et sont victimes de machiavélisme exploité par le génie féminin. Car oui, Louisa May Alcott, même si elle devait publier cette littérature sous un pseudonyme, a toujours prétendu revendiquer la malicieuse puissance féminine, la rouerie de l'esprit des femmes, des magiciennes et des ensorceleuses qui, comme Agatha Eure, ruinent des êtres pour se venger de leur négligence après le mariage. Ce n'était pas qu'une convention, c'était une abnégation, un aller sans retour. Et pour ces admirables raisons, non dénuées d'espièglerie, il est absolument recommandé de lire ce livre un peu trop court, mais divin !

Editions Interférences

  • " Vous avez ici des romans, des airs nouveaux, un instrument, de la broderie et un chien, qui ne se formalise pas d'un silence morose ni d'une conversation insipide, que demander de plus ? Certainement pas un mari qui ait la tête ailleurs ? "

 

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Derrière le masque - Louisa May Alcott

derriere_le_masquePas facile d'imaginer que Louisa May Alcott pouvait être l'auteur d'autres romans que son très célèbre "Les quatre filles du docteur March" !.. Pourtant, l'auteur s'est essayée à d'autres histoires moins niaises et candides (en apparence), et sous pseudonyme, notamment avec "Derrière le masque". Louisa May Alcott était fondue de romans noirs, de théâtre et de romances glauques. Dans ce roman, elle met en scène Jean Muir, dix-neuf ans, blonde et fragile, qui traîne sa frêle silhouette maladive chez les Coventry pour devenir gouvernante de la famille. La jeune fille et ses secrets intriguent, en opposition à la figure indolente et narquoise du jeune héritier. Toutefois dès la fin du premier chapitre l'auteur n'hésite pas à dévoiler que Jean Muir est une intriguante ! Quels desseins, quelles noirceurs, quels mystères l'auréolent ? Tout reste à découvrir.

Et effectivement cette histoire de manipulation féminine est intéressante et s'inscrit dans la grande tradition des romans noirs de la fin du 19ème siècle. Wilkie Collins est évoqué, mais "Derrière le masque" n'est pas un livre de référence, inoubliable. Sa lecture est charmante, gentillette. Le portrait du cercle bourgeois des Coventry est observé avec acuité, sans ironie, mais j'hésite à croire à une volonté de démontrer la vulnérabilité féminine qui décide de se venger de leur triste sort en la personne (symbolique) de Jean Muir ! La jeune femme garde des traits diaboliques (mais j'ai déjà remarqué que c'était une exigence chez L.M. Alcott, pour avoir lu un autre roman, "pour le meilleur et pour le pire"). "Derrière le masque" reste un roman de "second plan", pas un classique, juste une illustration légèrement floue d'une littérature de l'époque. A conseiller, cependant.

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