Tapage et Ramdam, de Magali Bardos
Une chouette et un écureuil se partagent le même arbre. L'un dort au premier et vit la nuit. L'autre vit au rez-de-chaussée et travaille de jour. Quel micmac. Quand l'un s'endort, l'autre s'attelle à quelques bricoles (écrire une chanson ou ramasser des noisettes). Hélas, au moindre souffle, au moindre éternuement, l'arbre se met à grincer à tue-tête et réveille nos deux compères qui font grise mine.
Pourtant, impossible de se fâcher ! La chanson de la chouette trotte dans la tête de l'écureuil, qui n'a pas hésité à offrir une poignée de noisettes pour composer le petit-déjeuner de son voisin. Cette entente sous les meilleurs auspices invite au rapprochement, car il est plus que temps de composer ensemble pour jouer des différences. ^-^
Qu'est-ce que c'est chouette ! Un album d'une simplicité enfantine, qui raconte avec humour une étrange cohabitation entre deux êtres que tout sépare, heureusement qu'il existe la magie des histoires pour nous faire la morale ! C'est drôle, avec des illustrations aux petits oignons et des animaux qui réagissent avec intelligence pour faire comprendre qu'on a tout à gagner à bien s'entendre ! Un petit album essentiel, rigolo & exquis.
Pastel, chez L'école des loisirs, avril 2016
Un auteur, deux livres : Nathalie Kuperman
Il y a un monstre dans le cartable de Joseph ! Il fait des bruits bizarres qui l'empêchent de se concentrer sur la leçon de géographie. Quand il se décide à y jeter un petit coup d'oeil, le garçon manque de tomber à la renverse : il a sous les yeux une représentation minuscule de sa mère, en train de grignoter le croissant qu'elle avait promis à son fils pour son goûter.
Quelle histoire ! Peu de temps après, sa mère fait encore des siennes en se pointant derrière lui aussi grande que Gulliver ! Elle fait fuir les petits caïds qui cherchaient à intimider son rejeton et lui donne de gros bisous baveux en l'étouffant de câlins. Mais la coupe est pleine, pour Joseph, il est temps d'en finir avec cette maman abusive et débordante d'amour. Trop, c'est trop.
Le garçonnet entre en rébellion et impose ses nouvelles conditions, le revers de la médaille risque toutefois de sérieusement le chambouler. C'est qu'il ne sait plus ce qu'il veut, notre little Jo, il veut s'assurer qu'on l'aime, mais pas qu'on l'oppresse. Pour sa maman aussi, la conversion s'annonce quelque peu délicate.
Mais ce roman est drôle, farceur, tendre et follement amusant. Il dresse un portrait haut en couleur d'une maman envahissante, capable de démarrer au quart de tour sitôt que son gros bébé chouine, tempête ou manifeste un soupçon d'indépendance. En parallèle, les réactions du garçonnet valent aussi leur pesant de cacahuètes !
Le résultat est délicieusement cocasse, on ne fait que sourire du début à la fin ! Et les illustrations d'Aurélie Guillerey sont tout simplement parfaites.
Ma mère est partout (Mouche de L'École des Loisirs, avril 2013 - ill. d'Aurélie Guillerey)
Celui-ci est tout aussi poilant et s'adresse aux jeunes ados (niveau collège).
On suit l'histoire de Louis, 13 ans, qui est fou amoureux de son amie d'enfance, Mona. Hélas, cet amour est à sens unique car la demoiselle en aime un autre. Louis a le cœur brisé et décide de changer de tactique en jouant les indifférents et en s'affichant avec une autre fille. Ce sera Déborah, la meilleure amie de Mona.
S'enchaîne alors une étourdissante valse des sentiments, au centre de laquelle notre ami Louis se sent carrément chavirer. C'est qu'il ne sait plus qui il aime, pourquoi il aime, s'il est aimé en retour, et pourquoi toute cette confusion s'empare de lui, pourquoi se sent-il aussi bête et paralysé, pourquoi c'est devenu soudain aussi compliqué d'être en présence d'une fille qu'on a connu depuis la crèche ! ?
Que de questions pertinentes et perspicaces dans ce petit roman ! C'est une lecture qui a su brillamment interpréter la délicate phase de transition qui se joue dans la tête de nos adolescents “en crise”, notamment au sujet des rapports entre filles et garçons et des premiers émois amoureux. Naturellement, c'est traité avec beaucoup d'humour et de légèreté !
Le garçon qui aimait deux filles qui ne l'aimaient pas (Médium de L'École des Loisirs, octobre 2013, ill. de couv. : Magali Bardos)
"Les enfants sont des énigmes lumineuses."
Le match du jour oppose les enfants contre les parents. Bah oui.
Les enfants sont méchants, c'est bien connu. Ils sont bruyants, insupportables, ils crient, font des caprices, ils mordent, ils crachent leurs épinards, ils ne disent pas bonjour à la dame, ils font du chantage, ils donnent des câlins quand ça leur chante, en somme ils sont épuisants et limite ingrats. C'est fort d'une tendre ironie que Vincent Cuvellier nous livre un portrait de notre progéniture, avec un bagout hors du commun. Impossible de ne pas sourire en parcourant cet éventail de situations toutes plus grotesques (et authentiques !) les unes que les autres.
C'est ainsi un festival de patience et de flegme qui s'offre à nous, et le constat s'impose : les enfants sont de gentils monstres qu'on aime comme ils sont, c'est-à-dire imparfaits. On doit aussi au rituel de l'histoire du soir de réconcilier tout ce petit monde, ouf les journées peuvent paraître longues, elles savent aussi se boucler sur un sentiment d'apaisement quand on retrouve l'enfant endormi dans son lit, sourire aux lèvres et heureux... Après tout, les enfants sont gentils.
-) A découvrir pour l'ironie de la situation, pour l'humour de Vincent Cuvellier et pour les illustrations d'Aurélie Guillerey (j'adore).
Les enfants sont méchants, par Vincent Cuvellier & Aurélie Guillerey (Gallimard jeunesse, coll. Giboulées, 2012)
Les enfants auront l'occasion de se venger en se plaignant de leurs parents, grâce au retour de ma mère ! Une mère qui ne fait rien comme les autres, qui a la tête dans les nuages, qui dit une avalanche de gros mots, qui mange des paquets de bonbons, qui promet de faire attention et qui bien évidemment n'en fait qu'à sa mode.
C'est déjà le troisième titre de cette collection (où le portrait de ma mère est souvent gratiné, mais c'est pour de rire !). Si ma mère est à la fête, son fiston, lui, se désespère et le lecteur rigole. Trois histoires courtes viennent faire état de situations souvent désespérantes, mais jamais navrantes, ma mère a conscience de ses défauts et préfère en rire en faisant l'orang-outang dans son dressing. Tout ça sent bon le vécu, c'est tendre et rigolo de découvrir le regard que parfois posent les enfants sur leurs parents ! Ce troisième rendez-vous a donc été placée sous le signe des facétieuses retrouvailles.
Ma mère à la fête, par Gwendoline Raisson & Magali Bardos (OFF - Pastel, 2012)
* La citation en titre de ce billet est de Daniel Pennac. : )
Pêle-mêle Clarabel #34
Lu et aimé Plus loin que le bec des hirondelles d'Annie Agopian & Magali Bardos,
Un texte qui se moque avec gentillesse du tourisme de masse, des clichés sur carte postale et autres, en même temps qu'il dénonce les rêves sur papier glacé, ceux qui font partir toujours plus loin afin de trouver ce qu'ils ne trouvent plus chez eux, ou ceux qui donnent envie de repartir à zéro en voulant croire que la vie est plus belle ailleurs. Des illustrations enthousiasmantes, et une belle histoire d'amour à sens unique. (Rouergue, 2011)
C'est ainsi que nous avons ressorti des étagères Le trou d'Annie Agopian & Alfred.
Une mère et son fils sont confrontés aux aléas de l'administration qui visent à ce que vous certifiez vos origines, parfois en dépit du bon sens. Ceci conduit la maman à confesser une histoire émouvante, celle du grand-père qui a quitté l'Arménie et s'est retrouvé apatride, la petite histoire embrassant la plus grande, c'est aussi le génocide d'un peuple qu'on découvre, la date du 24 avril 1915 et l'exercice de mémoire qu'il faut entretenir, encore et toujours. Les illustrations d'Alfred commentent avec force les propos d'Annie Agopian. Cet album attendait depuis trop longtemps que nous le découvrions, mais heureusement il n'est jamais trop tard pour bien faire ! (Rouergue, 2010)
Nous avons lu également Le voyage de Mémé de Gil Ben Aych,
1962. La famille de Simon déménage. Elle quitte le nord de Paris pour s’installer à une vingtaine de kilomètres, à Champigny-sur-Marne. Tout le monde est déjà parti mais il reste à faire bouger Mémé. La grand-mère tout juste arrivée d’Algérie refuse catégoriquement de monter dans une voiture, un bus ou un métro. Elle veut marcher, un point c’est tout. Simon, son petit-fils, se voit chargé de l’accompagner à travers la capitale et la proche banlieue. En chemin, Mémé va de découverte en découverte. Cette histoire vraie s’est passée il y a près de cinquante ans. Pourtant, elle est toujours d’actualité. C’est, sans doute, ce qui a fait de ce livre un classique de la littérature jeunesse que l’école des loisirs a choisi de rééditer.
Même si je lui reconnais d'énormes qualités (j'aime beaucoup la plume de Gil Ben Aych), je suis un peu restée en retrait et je n'en ferai pas une lecture inoubliable, à la rigueur indispensable pour qui recherche un livre traitant de déracinement et de mal du pays avec un zest d'humour.
(Neuf de l'Ecole des Loisirs, édition 2011) Illustration de couverture : Philippe Dumas
Pêle-Mêle Clarabel #15
Attention, elle est de retour ... nous annonce Gwendoline Raisson sur son blog.
Les sports d'hiver, c'est froid, il faut se couvrir de plusieurs couches de vêtements, il ne faut pas oublier ses skis, il faut manger comme des ogres pour prendre des forces avant de dévaler les pistes, il faudrait aussi éviter de se perdre mais ce serait anecdotique. En bref, le ski : ma mère adore ça ! Elle aime aussi la campagne, la nature, s'éloigner du stress de la ville et de la pollution. Elle aime respirer le bon air campagnard (celui du crottin de vaches), marcher pieds nus au milieu des pissenlits, se reposer à l'ombre d'un vieux châtaignier, sauf que ...
les moustiques, les fourmis volantes, les grenouilles, tout ce qui pique, tout ce qui rampe, tout ce qui grouille, ça la panique, ça la hante, ça lui fiche la trouille.
Le portrait de 'ma mère' est absolument hilarant. Non, on ne se moque pas. On constate, c'est différent. Et très franchement, ça se passe de commentaires car tout est là, sous notre nez, le garçon ne fait que raconter les formidables contradictions de sa mère en vacances, c'est tout simplement confondant et exquis.
Ma mère en vacances, Gwendoline Raisson & Magali Bardos, L'école des Loisirs, coll. Off-Pastel (2010).
(EdL, coll. Pastel, 2010)
La Grande Ourse s'est fait la malle, les étoiles ont filé en douce, le soleil s'est mis en grève et la planète boude et refuse de tourner sur elle-même. Quelle pagaille ! Les humains sont déboussolés et mettent tout en oeuvre pour renvoyer la Grande Ourse à son service. Oui, mais non. L'ourse continue de prendre du bon temps, elle découvre le désert et discute avec un voyageur en déroute. Elle était leur repère dans le ciel, leur meilleure boussole, et sans elle ils sont des milliers de voyageurs à errer comme des âmes en peine. Une grosse tempête se met alors à souffler pour remettre tout le monde à sa place. La Grande Ourse, en passant, a emporté un gros stock de sable dont elle choisit de s'alléger un peu tous les soirs, afin de permettre aux enfants de dormir et faire de beaux rêves.
L'histoire est de Carl Norac (j'ai apprécié son habileté à suggérer l'origine du marchand de sable), les illustrations de Kitty Crowther (bizarre, j'ai eu un peu de mal à retrouver sa patte), bref j'ai été séduite. Oui, c'est le terme... (pas conquise). C'est le sentiment aussi que m'inspire l'album de Céline Sorin et Célia Chauffrey, Hibiscus.
Les illustrations sont de toute beauté et se mettent au service de l'histoire de façon admirable. On y rencontre un kangourou qui observe avec envie ses copines avoir des bébés alors qu'elle reste désespérement seule et le ventre vide. A bien y regarder, Hibiscus a quelque chose de différent, elle est à part et c'est ce qui la rend unique, tente de lui expliquer sa mère. Son secret lui sera alors révélé, ce qui lui permettra de se sentir mieux dans sa peau et de vivre une histoire d'amour qui ne ressemblera à aucune autre.
Un joli texte, d'une grande sensibilité, qui évoque la différence, l'adoption et l'épanouissement. Une lecture pétrie de douceur et d'émotion. A contempler, à chuchoter, à méditer.
(Pastel, 2010)
Et pour finir, cette note musicale d'Agnes Obel qui touche à la grâce :
L'album entier fait résonner cette simplicité désarmante, j'aime beaucoup.
Téo est un fier chevalier, qui joue à sauver les princesses et tuer les méchants. Lorsque sa petite cousine Luce vient s'installer à la maison pendant quelques jours, avec ses yeux tout ronds de bébé, il fait le serment de toujours la défendre. En secret elle est devenue sa vraie princesse, même si ses copains se moquent de lui quand il préfère passer son temps avec elle plutôt qu'au foot... Bientôt Luce va repartir au pays des mangas et Téo aimerait tant la rejoindre !
Une histoire très tendre, très touchante qui a su enthousiasmer la Miss. Elle a adoré cette histoire, été tristounette au moment de la séparation mais a trouvé la fin géniale ! Même si au départ les illustrations en noir & blanc n'étaient pas destinées à la conquérir, elle a su craquer pour le bébé Luce qui est adorable. La relation entre le garçon unique et la petite demoiselle a su lui parler intimement, en plus des clins d'oeil aux mangas (un univers de lecture qu'elle commence à cerner). Ce livre est un mélange de conte féérique à une (presque) initiation à la culture nippone, en quelques clichés, qui n'occulte pas le sujet sur la relation non-conflictuelle entre un bébé et un jeune enfant. Adorable !
Petit Samouraï, texte de Sylvie Deshors, illustrations de Magali Bardos.
Le Rouergue, coll. Zig Zag. 96 pages - 6 €
Pour les 6 - 9 ans.
A suggérer pour les enfants dès 3 ans : la série du Monde Animaginaire des éditions Balivernes, qui proposent un univers enchanteur et poétique, avec des illustrations sucrées (ou c'est tout le sentiment qu'elles donnent !) ...
Trois petits koalas ont un gâteau préféré, qui est meilleur qu'un bonbon, plus délicieux qu'une gaufre ou qu'une crêpe, plus exquis que les desserts les plus compliqués... Miam ! C'est tout ce que cela nous inspire ! En bonus, dans ce livre, la fameuse recette du gâteau au chocolat de Baba ! (Un délice !)
L'hippopotame Tam-Tam ne veut plus jouer du tam-tam tout seul et part convaincre ses amis de venir faire de la musique avec lui. Une manière ludique d'apprendre les noms des instruments ... et des animaux ! Une petite devinette boucle l'histoire.
Koalas Chocolat & Hippopo Tam-Tam - texte de Pierre Crooks, illustrations de Julie Mercier.
Balivernes, coll. Monde Animaginaire. 12 €
Pour les plus jeunes, dès 2 - 3 ans.
La rentrée des classes est un grand événement, toujours un peu stressant. Certains enfants adorent l'école, d'autres moins. Antoine déteste sans hésitation, tellement qu'il planifie la grande évasion. Un petit tour aux toilettes et hop ! le voilà qui disparaît.
En voilà une classe invraisemblable ! Un élève disparaît et la maîtresse organise une chasse à l'homme pour les apprentis détectives. Tous les petits camarades débordent d'imagination folle et abracadabrante, et la maîtresse récompense leurs efforts par une sucette ! Incroyable, non ? !
Ceci a été étudié spécialement pour dédramatiser les craintes et les refus des enfants qui n'aiment pas l'école, ou refusent d'y aller, à travers ce texte rigolo et fort joliment illustré (beaucoup de couleurs). Autre aspect facétieux : le livre propose de retrouver le coquin caché à travers les pages de l'enquête (à la façon d'un Où est Charlie ?...).
Course folle à l'école, texte de Catherine Karnas, illustrations de Fil et Julie.
Les 400 Coups, coll. Ma langue au chat. 8 €
A partir de 5 ans.