Pêle-mêle : La Cité sans nom - Le fils de l'Ursari - La Romance de l'ogre Yosipovitch
La Cité sans nom est une série palpitante et riche en émotions !
L'histoire se déroule dans une cité déchirée par des années de guerre, de convoitise et de conquête. Désormais, tout semble assez paisible et stable sous la coupe de l'Empire des Lames sauf que le calme n'est qu'apparent. Encore des complots, encore des trahisons, encore des vengeances... Au cœur de l'action, nous découvrons Kaidu et son amie Rat qui parcourent les ruelles et les toits de la ville loin des regards indiscrets. Ils ont noué une relation de confiance à force de se lancer des défis et sont maintenant inséparables. C'est ensemble qu'ils ont aussi décroché le respect de leurs aînés en déjouant un attentat même si le chaos n'a pas dit son dernier mot et entend déchaîner sa puissance pour renverser la politique en place.
Cette lecture est animée par un souffle d'aventure et d'émotion qui nous embarque tout de go. On ne voit plus les pages défiler, on est pris dans le rythme et on a envie de connaître la suite sans plus tarder. C'est aussi une belle aventure humaine, avec une amitié forte entre Kaidu et Rat, dont on connaît les racines et les souffrances intimes, les secrets de famille et les sacrifices. Faith Erin Hicks a donc réussi à combiner les genres pour une immersion spectaculaire dans son univers : rebondissements, suspense, action, tendresse, émotion et humour sont du nombre. Elle ne déçoit pas non plus sur la durée (contrairement à 5 Mondes) et nous offre un divertissement de haut vol qui fait toujours plaisir à découvrir. C'est fort !
La Cité Sans Nom, par Faith Erin Hicks
-SÉRIE EN 3 TOMES-
Rue de Sèvres (2018, 2019)
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Cette adaptation du roman de Xavier-Laurent Petit exploite toujours et encore des sujets sensibles et d'actualité (sur la situation des réfugiés et leurs conditions d'accueil). On suit donc le destin d'une famille de Roms qui doit son voyage en France à une crapule et qui va vivre de misère et de galères pour le rembourser. On comprend de suite que la lecture ne sera pas légère et insouciante. Et on plonge dans une ambiance sombre et poignante. La famille partage un cabanon insalubre, aux abords de Paris. Pas de papier, pas d'argent. C'est système D pour survivre.
Au milieu, le jeune Ciprian porte un regard candide sur son entourage (on devient mendiant professionnel ou emprunteur de portefeuilles) mais le môme n'est pas non plus ignorant de la précarité qui les entoure. Outre le chantage, la police est présente. Il faut souvent louvoyer ou se planquer. Aucun détour possible. Une journée sans travail, c'est un lendemain qui déchante. Enfin, la spirale est infernale : à lire, c'est dur. Heureusement l'histoire laisse poindre une lueur d'espoir quand Ciprian surprend des joueurs d'échecs au Luxembourg. Et le garçon analphabète perçoit plus qu'il ne comprend ce qui se trame sous ses yeux. En plus, l'enfant pensait être discret mais c'est loupé ! ... De là, commence donc un autre apprentissage pour Ciprian. Celui de la confiance, du respect, du cadre et de l'avenir.
Mis en scène par Cyrille Pomès et Isabelle Merlet, ce parcours est sans fard, sans glamour. C'est assez rude aussi même si ça raconte la vie réelle et hélas actuelle. Une BD instructive et efficace pour sensibiliser les plus jeunes.
Le Fils de l'Ursari, de Cyrille Pomès & Isabelle Merlet
D'après le roman de Xavier-Laurent Petit
Rue de Sèvres, 2019
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Dans les Noires Forêts de l'Oural, vit un ogre solitaire et à l'appétit particulièrement vorace. Mais lorsqu'il croise la douce et ravissante Bella, cyclope de son état, son cœur s'emballe, ses yeux voient trouble, sa langue devient bête et ses mains baladeuses. Vlan, la Bella ne s'en laisse pas conter et lui colle une torgnole en pleine poire. Ce malatru doit apprendre les bonnes manières s'il souhaite lui conter fleurette. Devenir un vrai gentleman, pour un ogre rustaud, le challenge est de taille. Et le rendez-vous posé : s'il ne montre pas patte blanche d'ici vingt-quatre heures, notre Édouard sera dévoré tout cru par sa dulcinée !
Dans cette fable, on croise aussi un blaireau et deux jeunes loups en sortie botanique - pris en otages par notre ogre aux abois. Commence ainsi une leçon de vie loufoque et saugrenue... avec des acteurs pour le moins effrayants. Ici, on ne badine pas avec l'amour. On le tartine comme Cyrano sous les yeux exorbités de trolls en délire. C'est complètement dingue - un peu rebutant aussi car les illustrations n'adoucissent pas les traits des personnages. Qu'importe, c'est une lecture rapide et juvénile qui aura tout loisir d'égayer l'heure du coucher !
La Romance de l'Ogre Yosipovitch, de Matthieu Sylvander & Anaïs Vaugelade (illustrations)
Neuf de l'école des loisirs, 2019
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Manoel le liseur de la jungle, de Matthieu Sylvander & Perceval Barrier
Un livre qui vous embarque dans la jungle du Brésil, à bord d'une pirogue flottant sur le rio, avec un jeune colporteur de bricoles, des indigènes et un tatou grand lecteur ? Oui, oui. C'est ici que ça se passe. Prenez place. Et découvrez l'histoire de Manoel, qu'on trouve généralement installé dans un fauteuil d'osier, près des berges du fleuve, toujours en train de bouquiner tout en picorant des chenilles fraîches. Luizao a coutume de le croiser le nez dans un bouquin, mais le jour où il le voit en train de faire les cent pas, le garçon comprend que le tatou a un problème. Et de taille. Il n'a plus rien à lire ! Pensez donc. Luizao lui refile alors un livre récupéré par hasard, Histoires comme ça de R. Kipling, sans se douter du cataclysme à venir. Car Manoel est fou de rage contre ce R. Kipling qui a écrit n'importe quoi sur les tatous. Il faut qu'il le rencontre sur le champ, qu'il s'excuse publiquement en publiant un démenti. Seulement Luizao n'a aucune idée de l'endroit où R. Kipling se trouve. N'ayant pas trop le choix, il conduit Manoel jusqu'en ville pour poursuivre leur enquête. Et de là, une folle aventure va les pousser toujours plus loin sur les flots, au-devant de phénomènes insolites, de figures patibulaires et de sourires légendaires. L'évasion promise est super rafraîchissante, avec ce petit cocktail exotique où l'humour et le second degré sont servis à grande rasade. C'est une aventure qui promet aussi beaucoup d'originalité, de la mauvaise foi, des ruses, du courage, des discussions enflammées, des voyages interminables, des rencontres féeriques, d'autres moins. L'intrigue est tour à tour cocasse et semée d'embûches. Les dangers ne sont pas négligeables (et révèlent entre les lignes cet effroyable trafic d'écailles à proscrire... ouh !). Il y a même de l'amour au final. Et des livres, toujours des livres, et du plaisir de lire sans passer à côté de sa vie. Une belle épopée, chatoyante et dépaysante. ☺
L'École des Loisirs, 2017
Béatrice l’Intrépide, de Matthieu Sylvander & Perceval Barrier
Béatrice l’Intrépide rêve d'un destin d'héroïne. Les contes de prince et princesse, oubliez ça, ce n'est vraiment pas pour elle ! Et pourtant, c'est bien pour rencontrer un prince à marier qu'elle chevauche la contrée, avec sa jument Véronique, se laissant joyeusement détourner de son but pour venir au secours d'une princesse en robe verte, pour zigouiller une bête affamée, et pour sauver un enfant des eaux. Quelle aventure !
Son arrivée au château sera probablement accueillie avec circonspection, car la reine en personne passe au crible toutes les candidates à marier. Son fils ne saurait se satisfaire d'une élue quelconque. Béatrice, elle, se répand en babillages sur ses exploits accomplis et se régale de sandwiches au pâté. C'est assez pour séduire la souveraine, avant de lui révéler la vérité crue sur son fils. Un cas désespéré. Un alien. Un ermite... depuis ses huit ans ! Ah, ah. En découvrant la supercherie, forcément, le lecteur en rit.
Puis, c'est le Diable lui-même qui viendra lui donner du fil à retordre. La Bête sème la panique dans un village où les habitants sont obligés de sacrifier leurs fils en offrande, mais voilà que la “source” est tarie. Les villageois se lamentent sur leur triste sort et ne voient pas d'autre solution que de concéder une vache maladive, au grand mécontentement de leur tortionnaire. Seulement, en cachette dans un sac en toile, Béatrice l'Intrépide a réussi sa mission d'infiltration et confronte son ennemi. En trouvant le pot aux roses, le lecteur de nouveau se gausse !
La réalité est, certes, follement cocasse, d'où des solutions rusées et moqueuses. Comment ne pas sourire ? Pendant ce temps-là...,
« Béatrice l'Intrépide n'est jamais lassée d'exploits, et lorsqu'elle chevauche dans les collines, son regard parcourt sans cesse la campagne afin d'y repérer les malheureux, les misérables, les opprimés, les persécutés, en un mot les victimes qui pourraient avoir besoin de ses services. Elle obéit en cela à sa destinée d'Aventurière et d'Héroïne, et elle écrit au jour le jour les chapitres de sa propre Légende. »
Ce conte original décoince les clichés ^-^ et promet une lecture où la bravade féministe tient bon la barre ! C'est rigolo, illustré aussi joyeusement. Le duo Matthieu Sylvander & Perceval Barrier est extrêmement rigoureux dans sa volonté de sortir des sentiers battus avec un sens de la dérision aux petits oignons. Miam.
L'école des loisirs, septembre 2016
La Chambre de la fille, de Matthieu Sylvander & Perceval Barrier
En avant pour une histoire complètement farfelue, mais tellement drôle !
C'est l'histoire d'un couple de Souris, qui rêve déjà de sa vie future... Ils se marièrent et eurent beaucoup d'enfants. Blablabla. Madame Souris a tout prévu dans sa tête : le mariage, la maison, le fils aîné, puis la fille. Un point, c'est tout. Sauf que son plan idyllique foire sur toute la ligne. Et Madame Souris n'est pas contente, mais alors pas contente du tout.
Et elle se fâche, rouge pivoine. Contre son mari, qui a les oreilles trop bleus. Contre ses garçons, qu'elle adore... mais ce sont des garçons, pardi. Contre l'hirondelle, qui dépose sa progéniture en douce, de peur d'être déplumée. Contre le Directeur en chef des naissances, parce qu'il se moque du monde, tout simplement. Et Madame Souris réclame une explication.
La lecture est super drôle, même si cela part dans tous les sens. Cela parle essentiellement du désir d'enfant, de la maternité, de la naissance, avec tous les clichés du genre, et c'est tout à fait acceptable. L'histoire fait sourire d'une oreille à l'autre (les prénoms de Madame Souris... Deboroh, Elso, Fiono, Hannoh, Irino, Jessico... à prononcer comme avec l'accent du Nord ;-) toute tendresse respectée). Voir cette douce maman péter un câble, ça n'a pas de mot. C'est juste excellent. (« Je sais, c'est un garçon, il s'appelle Yenamarre ! ») :D
À partager en famille, sans se prendre la tête. Eclats de rire assurés.
L'Ecole des Loisirs / Septembre 2015
3 contes cruels de Perceval Barrier et Matthieu Sylvander
Au potager, les poireaux mènent en général une vie calme et monotone, un peu ennuyeuse même.
Un jour, alors qu'ils sont en train de parler d'igloos, de phoques et d'Eskimos, ils remarquent soudain une grosse tête qui dépasse de la palissade.
Ils sont un peu effrayés, ils n'ont jamais vu de tête aussi grosse.
Les poireaux sont crédules et croient le premier beau parleur venu, ils ont un petit pois à la place du cerveau et sont prêts à se jeter dans la gueule du loup. Ou de la vache déguisée en renne du Père Noël. Ou alors ils s'entretuent au lieu de laisser leurs enfants, Roméo le poireau et Julotte la carotte, s'aimer en paix. Quelle macédoine !
Qu'est-ce que c'est drôle !!! C'est de l'humour noir, je vous préviens, mais c'est jubilatoire.
J'ai adoré ces trois contes cruels, qui mettent en scène des poireaux benêts et des carottes pas plus finaudes. On a aussi droit à notre couple maudit, en clin d'oeil à Roméo et Juliette (là, c'est obligé que le Roméo vous arrache un sourire, rien que pour sa dégaine et sa mèche rebelle... c'est poilant !).
Bref, on trouve de bonnes répliques, des situations loufoques, des retournements de situation à faire glousser dans les chaumières. C'est désopilant, vraiment culotté.
Même les insultes sont délirantes : Carotte, face de crotte, n'a pas de culotte ! - Pomme de terre, MDR, pue la bière ! Mouahaha ! J'en rigole encore.
Tout ça pour dire que je suis absolument fan de ces petites lectures irrévérencieuses, ça change tellement du lisse et du policé ! Oh yeah.
3 contes cruels de Perceval Barrier et Matthieu Sylvander (Ecole des Loisirs, mai 2013)
L'histoire du soir #34 : Palmier de Noël, par Audrey Poussier & Matthieu Sylvander
Un petit palmier s'ennuie dans son oasis brûlée par le soleil. Son amie la cigogne lui a donné envie de parcourir le monde et de découvrir Noël. Il part donc à l'aventure, parcourt les mers et arrive sur une plage de sable doux. Il est même fou de joie de croiser d'autres palmiers, immenses et magnifiques, mais tellement imbus d'eux-mêmes. Ils sont fiers, snobs et ils appellent la police.
Triste et apeuré, le petit palmier se sauve et glisse dans le froid. Il est seul, malheureux comme les pierres lorsqu'une voiture s'arrête près de lui. Un policier vient à sa rencontre et le blottit dans une couverture chaude. Il décide de lui montrer la ville, les décorations, les lumières, les premiers flocons qui tombent. Puis il l'invite chez lui, dans son appartement douillet, près d'un petit sapin paré de guirlandes.
Mais qu'est-ce que c'est, à la fin, Noël ? C'est tout ça, embellir une maison, mais aussi mettre du baume au coeur, penser aux autres, faire preuve de bonté et de gentillesse. Voilà une douce et jolie histoire, qui fait les gros yeux aux prétentieux et aux frileux qui n'aiment pas les intrus.
Palmier de Noël, par Audrey Poussier et Matthieu Sylvander (Ecole des Loisirs, 2012)