☼☼ La fille qui lisait des romans d'amour ☼☼
Cassandra est une indécrottable romantique, qui se gave de romans d'amour et imagine son idéal masculin à l'instar des héros de ses lectures. Même en pleine journée, elle est capable de décrocher de la réalité pour se perdre dans ses fantasmes. Il est même parfois un peu surprenant de tomber sur une scène à l'érotisme débridé, sans prévenir, avant de réaliser qu'il s'agit d'un rêve éveillé. Une fois qu'on détermine bien la frontière, on peut se prêter à sourire car ce sont souvent des situations cocasses.
Pour se consoler de sa fraîche rupture sentimentale, Cassandra décide de rejoindre sa meilleure amie Val dans un hôtel de grand standing à San Diego, pour y rencontrer le cousin de celle-ci, Raphaël, au physique d'Apollon et aux manières de gentleman, et aussi Connor, son associé aux répliques sarcastiques mais au doux accent irlandais. Cassandra craque pour le premier, puisqu'il incarne son modèle de perfection, mais se surprend à brûler de désir pour le deuxième, qui n'hésite pas non plus à la titiller, ayant saisi qu'elle possédait un caractère volcanique, bien loin de l'image lisse et polie qu'elle voudrait donner, derrière ses romans à l'eau de rose.
J'ai aimé toutes les brèves interactions qu'il pouvait y avoir entre Cassandra et Connor, il n'y a pas photo, ce potentiel remporte tous les suffrages. A côté, Raphaël fait pâle figure. D'ailleurs l'auteur n'a pas veillé non plus à nous le rendre particulièrement attractif, puisqu'à part un physique avantageux, il est vite assommant et terne et passif, donc bof. L'histoire montre aussi qu'une consommation excessive de romances rend l'héroïne aveugle et butée, elle s'attache à une image et se voile la face, risquant presque de passer à côté du bonheur !
Du coup, le couple se retrouve dans les bras l'un de l'autre un peu précipitamment (le dernier chapitre, et puis hop !). A noter aussi qu'il n'y a point de sensualité au cours de l'histoire, si ce n'est dans les fantasmes de Cassandra. Certes, c'est drôle et insolite, mais un peu lassant aussi, j'avoue, j'ai vite cherché à sauter les passages. Bref, tout ça pour dire que cette lecture n'a pas été désagréable, l'histoire est mignonne mais reste aussi conventionnelle, on se trouve à mi-chemin de la chick-lit, la dérision en moins, et c'est bien dommage. En somme, c'est gentillet, mais pas aussi alléchant que le résumé le supposait.
La fille qui lisait des romans d'amour, par Inara Lavey
Milady, coll. Central Park, 2013 - traduit par Lise Capitan
“Grâce à toi les choses se passent mieux aujourd'hui.” (L'été où j'ai appris à voler)
Sous cette couverture pétillante, où reflète un soupçon de vacances ensoleillées, se cache une histoire qui parlera à la petite adolescente qui est encore en vous. Birdie a treize ans, sa maman vient de lancer une épicerie fine et se saigne les quatre veines pour réussir, elle est veuve depuis dix ans et vit avec sa fille une relation soudée.
Leurs rapports se compliquent avec l'accumulation du boulot, Birdie vient prêter main forte tous les jours et occupe son été en fréquentant les adultes qui travaillent avec elle. Il y a Swoozie, qui fume trop et qui a un cœur d'or, mais surtout Nick, le beau surfeur, pour qui Birdie a un petit béguin. Mais les journées coulent paisiblement et l'ennui s'installe, la solitude aussi.
C'est en croisant Emmett Crane, à l'arrière de l'épicerie, un soir, que Birdie ressent comme un besoin de changement. Tout chez le garçon intrigue l'adolescente, sans hésiter elle va accepter de le revoir et avoir ses petits secrets. Ce n'est pas en signe de protestation contre sa mère, qu'elle accuse d'être une cachotière, c'est vraiment par envie et par besoin. Dans sa tête, les idées se bousculent, Birdie grandit et veut déployer ses ailes.
La deuxième moitié du roman va se révéler étonnamment bouleversante et fait alors apparaître cette histoire autrement que comme un simple rendez-vous de légèreté. Les émotions remontent à la surface et les sujets sensibles sont alors abordés. Il est question de l'absence du père, du double rôle que doit jouer la mère, de l'entrée dans l'adolescence, des rencontres qui symbolisent la promesse d'une main tendue, de la maladie qu'on cherche à effacer, de rituels à accomplir, de sacrifices aussi à apporter...
C'est une jolie petite lecture, qui sait vous prendre par surprise et toucher votre corde sensible. Le résultat est charmant, parfaitement délicat et attentionné.
L'été où j'ai appris à voler, par Dana Reinhardt
La Martinière J. (2013) - traduit par Corinne Julve
illustration de couverture : Hubert Van Rie
Kinda funny, kinda gross, and more than kinda messy.
J'ai finalement renoué plus vite avec Zoey et ses camarades de la Maison de la Nuit, et bien m'en a pris parce que j'ai fortement apprécié ce troisième volume ! Et pourtant, Zoey fait tout pour agacer son monde. Ses atermoiements sentimentaux occupent toujours une grande partie de l'intrigue, entre Heath, Erik et Loren, la pauvre ne sait plus où donner de la tête. C'est simple, elle aime ses trois petits copains et ne peut (veut ?) pas choisir. Dans le fond, elle se sent flattée d'être leur élue et s'invente des prétextes bidons pour justifier ses agissements en papillonnant de l'un à l'autre sans comprendre que son attitude choque.
Bref, le sort de Stevie Ray lui tient heureusement toujours à coeur. Pour la sauver, Zoey est prête à tout. Et pour l'occasion, elle se rapproche d'Aphrodite. La peste de service ! On a beau dire, elle a tout de même plus de chien. Son personnage évolue dans le bon sens, souvent elle m'a surprise en bien et m'a également fait sourire !
Autre chose aussi, le lien entre Neferet et Zoey commence enfin à se détendre. Les masques vont tomber. Des vampires sont sauvagement attaqués - par la faute des cinglés de la Foi ? Le conflit grogne et prend de l'ampleur. Définitivement ce tome prend un tournant plus sombre et captivant afin de préparer la suite des aventures avec ingénuosité. Et un peu de piquant aussi !
J'aime de plus en plus cette série, je pense qu'il faut mettre de côté la personnalité volage de Zoey (dommage, c'est l'héroïne), car le reste (histoire + univers) est juste parfait ! C'est très prenant, aussi efficace qu'une série tv. Désormais, de plus en plus de nouvelles données vont entrer en scène, ça va chambouler les cartes déjà en place, c'est sûr, et je m'en réjouis d'avance !
The House of Night #3 Chosen - P.C. Cast & Kristin Cast
Published March 2008 by St. Martin's Griffin
"She's easy to lead around, a shiny present here, a pretty compliment there, and you have true love and a popped cherry sacrificed to the god of deception and hormones. Young girls are so ridiculous--so predictably easy."
La fiction s'insinue dans la réalité comme des racines qui font craquer le revêtement d'un trottoir.
L'histoire suivante se passe au pensionnat Biriozy, près de Novgorod, où trois camarades de chambrée, Pénélope, Ludmila et Sanouk, suivent leurs études entre ennui et torpeur. C'est alors qu'arrive leur nouveau professeur de littérature, Anton Mordiev, qui leur confie un petit livre qui va tout faire basculer. Les filles décident de se faire la lecture tous les soirs, dans leurs lits, et aussitôt se prennent de passion pour la découverte de la civilisation nénètse, un petit peuple qui vit de l'élevage de rennes au-delà des Monts Oural. Mais cette lecture n'est pas du goût de tous, car la sous-directrice, Olga Petrovna, leur confisque l'ouvrage avant de procéder à des mesures plus radicales.
En quelques 200 pages et des brouettes, et avec une élégance très appréciable, Anne Bouin a tout saisi de la subtile balance entre le divertissement, la beauté et le charme d'une rencontre. Elle nous livre un roman incroyable, d'une force rare, et qui renoue avec l'art de raconter une histoire. Et ce qui est étonnant, aussi, c'est la richesse de l'intrigue et tout ce qu'il est possible d'impliquer, d'imaginer, de dénoncer. Et puis c'est drôle, l'amitié entre les filles est espiègle, sincère et rafraîchissante, il y a aussi du suspense, beaucoup de poésie, quand Sanouk découvre une petite feuille de bouleau entre les pages du livre, elle ressent, plutôt qu'elle ne comprend, que la lecture de l'ouvrage sera capitale pour elle. Et c'est enfin grandement dépaysant, l'histoire se déroulant en Russie, nous nous baladons alternativement entre les murs du pensionnat austère, dans la très coquette isba bleue de la babouchka de Sanouk, ou sous un tchoum, à se réchauffer sous une peau de renne. Bref, j'ai été totalement sous le charme, plus qu'enchantée par cette première approche, qui se poursuit avec Un été sibérissime.
Les vacances d'été réservent à nos trois héroïnes, Pénélope, Ludmila et Sanouk, des retrouvailles avec leurs familles respectives, sans se douter qu'une nouvelle fois les aléas de la vie vont les réunir pour se serrer les coudes au nom d'une cause commune.
Ce deuxième épisode n'a rien perdu de son charme, de sa fraîcheur, de son dépaysement. Les premiers chapitres nous offrent même une impression de nonchalance estivale, mais il ne faudrait pas s'y tromper, car l'histoire reprend ses droits et nous plongeons alors dans un roman qui mélange l'aventure, l'espionnage, la mafia et même les premiers émois amoureux... Sincèrement, c'est toujours aussi beau, doux et élégant. L'ensemble paraît plus dynamique, synchronisé comme un ballet russe qui s'enflamme. On vit au rythme des personnages, de leurs palpitantes aventures, on tremble face aux dangers, on oublie le monde qui nous entoure, on prend fait et cause pour protéger la culture nénètse, et on aime jusqu'aux méchants, qui peuvent se révéler attachants à leur façon. Vraiment, ce fut une lecture chaleureuse, enivrante, simple et parfaitement efficace, et j'ai très envie de retrouver tout ce petit monde le plus vite possible !
Petite Feuille Nénètse (Médium, EdL 2009) & Un Eté Sibérissime (Médium, EdL 2011) - Anne Bouin
illustration de couverture : Rascal