Cochon vole, par Erwan Seznec
Nos jeunes fondus de l'arctique sont de retour dans une nouvelle aventure qui va les conduire en terre bretonne : Antoine, Marie, Julien et Joris ont été embauchés pour s'occuper de Galahad, huit ans. Pensant qu'il s'agissait d'un simple garçonnet, les amis vont finalement découvrir un gros porc laineux à chouchouter pour son prochain concours. Soit. Les enfants estiment qu'ils ont énormément de chance et profitent au mieux de leurs vacances. Julien a également un secret à leur révéler : il est devenu très, très riche. Mais en y parvenant, il vient aussi de s'attirer les foudres des frères Bruno, les caïds de son quartier. Sa mise au vert a donc pour but de se faire oublier, sauf que notre ami va faire la une des journaux et voir son passé le rattraper.
Ha, ha ! Qu'est-ce que j'ai pu sourire à la lecture de ce petit roman désopilant ! D'abord, je n'avais pas imaginé que l'auteur proposerait une autre histoire avec notre bande de potes - la surprise a été grande et inégalable. J'ai retrouvé cette tendre camaraderie faite de blagues, de boutades et de soutien sans failles dans toutes les épreuves. Antoine et ses compagnons sont étonnants de flegme, montrant autant d'audace que de rouerie ou de malice, pour mieux contrer l'adversité. Préparez-vous à une série de péripéties abracadabrantes, beaucoup d'humour et de dérision, un grand vent de folie douce et aucune moralité sous-jacente. C'est super distrayant ! Une réussite, bis.
« Julien et Joris échafaudaient des plans.
- On les laisse entrer, on les assomme, on les tue. Ensuite, on balance les corps à Galahad, qui les mangera.
- Pure folie ! a hurlé Joris. On ne peut pas changer l'alimentation de Galahad sur un claquement de doigts ! Ce cochon est un sportif de haut niveau, une machine de précision !
- Alors on les enterre !
Marie a refusé catégoriquement. Pas question de faire des trous dans le beau jardin de Tonton Archibald. C'est vrai qu'enterrer ses ennemis chez quelqu'un qui vous prête sa maison, ce n'est pas très joli. »
l'école des loisirs, 2018 - illustrations de Vincent Bourgeau
Le murmure des sorcières, de Marianne Renoir
Entre la couverture illustrée par Camille Jourdy et le titre, mon cœur a fait boum, impatient de découvrir un peu plus ce que le roman dissimulait entre ses pages.
Autant dire qu'il ne fait pas dans la dentelle. En nous envolant vers l'île aux Sorcières, on découvre une chouette communauté de 19683 âmes. Des sorcières, rien que des sorcières. Toutes portant un prénom à trois lettres, prénom à usage unique forcément, le compte est bon. Même le taux de naissance et de mortalité est étroitement lié. Sachant que la population est exclusivement féminine, on se demande comment... et là aussi, l'auteur nous explique tout bien. Pas de souci. Cela peut sembler trop didactique comme entrée en matière. Mais l'approche est nécessaire pour que le roman nous transporte dans son imaginaire. On apprend ainsi des tas de choses pertinentes, par exemple les sorcières sont des descendantes du Dragon de Komodo. Elles n'en sont malheureusement pas très fières et préfèrent brouiller les pistes en racontant toutes sortes de fables. Elles mettent aussi en avant que ce sont de grandes globe-trotteuses, parcourant le monde pour apprendre de nouvelles langues et d'autres cultures. Toutefois, rien ne vaut la vie sur leur île qu'elles retrouvent toujours avec grand plaisir. Ceci dit, et contrairement au président américain, nos sorcières n'ignorent rien du réchauffement climatique ni de la menace qui pointe à l'horizon.
Par un jour de tempête, alors que les vagues fouettent sauvagement leur petit rocher perdu, nos pauvres sorcières comprennent qu'elles doivent prendre leurs cliques et leurs claques pour chercher bonheur ailleurs. Elles débarquent à Paris, sur l'île de la Cité et l'île Saint-Louis. Or, leur arrivée n'est pas du goût des habitants qui s'insurgent contre l'occupation intrusive et malodorantes de ces étrangères. Les journaux en font leurs gros titres et Paris a peur. Au milieu de tout ça, une petite sorcière rencontre une petite parisienne. Les fillettes se ressemblent comme deux gouttes d'eau, ce détail les amuse et leur donne aussi une idée. Elles décident en effet d'échanger leur place : Kaï devient Marie-Astrid, rebaptisée Mad. L'une et l'autre vont ainsi découvrir une nouvelle vie, non sans heurt, car la maman de Marie-Astrid est assez déjantée dans son genre, même si cela suscite des situations rigolotes et exagérées.
Au final, ce petit roman est inattendu à vouloir s'affranchir de certaines expectatives. Parce qu'en choisissant le thème des sorcières, on s'attend plus ou moins à du fantastique. Nous en sommes vraiment loin. Le texte est assez fourre-tout, tantôt original, tantôt culotté, tantôt loufoque. Ma foi, c'est tout aussi pétillant mais parfois déconcertant. Après, le lecteur pourra y voir des messages de tolérance et d'ouverture aux autres. Et pourquoi pas recouper avec des images vues dans les journaux. Mais j'avoue que la logique m'échappe et que cette lecture n'a cessé de me surprendre. Le verdict est clément, même s'il peut susciter quelques interrogations. Après, je ne suis pas contre les histoires qui ne prennent pas les lecteurs pour des nouilles... en voici une parfaite démonstration. Je préviens simplement que l'emballage ne reflète pas vraiment le contenu. En tout cas, bonne route à nos nouvelles copines & longue vie aux sorcières.
L'école des loisirs, 2019
Les fondus de l'Arctique, par Erwan Seznec
Voilà où ça peut mener de manger des poissons panés ! Antoine Delamoute vient de gagner un concours organisé par la société Celsius, qui a choisi d'emmener quatre collégiens sur leur navire scientifique pour une expédition jusqu'au Groenland. Julien, Joris et Marie sont les trois autres petits veinards à embarquer avec leur valise, leur slip chauffant et leurs moufles pour une aventure ô combien déjantée.
J'avoue, c'est très, très drôle à lire. Il ne se passe pas une page sans un élément désopilant, une réplique qui fait mouche, un détail qui coince, un événement inattendu. On n'en perd pas une miette et c'est vraiment trop bon ! Car tout va rapidement de travers, à bord de La Suspicieuse, comme de démasquer un intrus parmi nos jeunes lauréats, puis d'apprendre que le capitaine est héminégligent, sans oublier le syndrome islandais qui frappe nos petits camarades, ou la crise de nerfs du patron des panés devant les caméras de la télévision, et que dire de la concurrence déloyale où tous les coups fourrés semblent permis !
L'histoire est complètement dingue et saugrenue, mais c'est de l'humour bon enfant et opportun. On trouve aussi des petits clins d'œil sympas, comme les noms des personnages (Roger Rouscaille ou Ernest Shackleton) et des illustrations adorables venues mettre leur grain de sel pour agrémenter de loufoquerie les 135 pages du roman.
Une excellente découverte et une lecture distrayante au possible. À partager autour de soi. ♥☺
Neuf de l'école des loisirs, 2017
Illustrations de Vincent Bourgeau
Strada Zambila, de Fanny Chartres
Ilinca ne pardonne pas à ses parents d'être partis en France pour effectuer un remplacement dans un cabinet médical en Normandie. Sa sœur et elle sont restées à Bucarest, coincées dans leur petit appartement avec leurs grands-parents et leur ribambelle de chats. C'est par souci économique qu'ils ont pourtant fait ce choix, mais la fillette ne veut pas l'entendre. Son amitié avec Florin, un élève rom de sa classe, lui montre aussi qu'il y a toujours moyen de s'en sortir, quand la famille se serre les coudes. Ilinca a onze ans, elle est fâchée, elle boude les appels vidéos de sa mère, elle refuse de confier ses tourments et elle trouve le temps long. Les fêtes de Noël approchent, mais elles n'ont pas le même goût cette année. Quand sa mère leur rend une visite surprise, Ilinca se prête à rêver d'un retour à la normale. Et puis... patatras.
Fanny Chartres a passé neuf ans à Bucarest, ce qui lui a inspiré l'écriture de Strada Zambila - un joli roman sur l'enfance qui souffre du manque. Manque des parents, manque d'argent, manque de tolérance, manque de communication. Bref. L'histoire fait un petit tour d'horizon et nous promène dans les ruelles d'un pays marqué par le communisme, où la pauvreté est encore le lot quotidien, mais jamais elle ne renvoie une image misérabiliste. On visite ainsi le marché aux fleurs, la place Saint-Georges, la rue Radu Calomfirescu, on se détend à la patinoire en buvant du chocolat chaud, on déguste des sarmale avec de la mamaliga. On profite au mieux du bonheur de vivre, et on savoure l'instant présent. Cela n'efface pas les clichés contre les “cueilleurs de fraises” (ceux qui partent à l'étranger pour un avenir meilleur) ou contre les roms (les tziganes, voleurs de poules, de cuivre, etc.). Après tout, « on ne voit bien qu’avec le coeur, l’essentiel est invisible pour les yeux ». Et à Bucarest, “le clair côtoie l'obscur, mais c'est justement cette cohabitation du beau et du laid qui fait toute sa beauté”.
Un petit roman lumineux, tendre et bouleversant par ses révélations - où l'on se dit que mentir aux enfants a ses limites. Il y a une grande sincérité et de l'intelligence dans cette histoire, qui cherche à toucher au plus juste le jeune lecteur. Celui-ci se trouve face à une vie éloignée de la sienne, qu'il découvre autrement que par des idées reçues, et dont il appréciera, espérons-le, toutes les différences et les richesses culturelles. Aoleu !
Neuf de l'Ecole des Loisirs, 2017
Illustration de couverture : Iris de Moüy
Anita mène l'enquête #2: Une lumière très étrange, de Norma Huidobro
Un soir d'été, alors qu'elle rentre du restaurant avec sa grand-mère, Anita surprend une lumière étrange depuis la fenêtre d'une maison voisine. Puis plus rien. Seul le bruit d'une voiture qui démarre et part en trombe vient troubler la quiétude du quartier. Fatiguée, sa grand-mère lui recommande de se coucher sans plus tarder. Mais dès le lendemain, Anita se confie à son meilleur ami Matías, également son fidèle acolyte en matière d'enquêtes à résoudre (Anita est fan de Hercule Poirot et de Sherlock Holmes).
On ne fait plus les présentations de notre tandem, ou reportez-vous au précédent ouvrage, cf. Le parapluie à fleurs, pour goûter aux plaisirs d'une vie de quartier populaire, avec ses petits commerces, ses potins et ses secrets. Notre jeune héroïne savoure cette ambiance et s'y sent comme un poisson dans l'eau... Certes, elle rouspète souvent d'être coincée au salon de coiffure de sa grand-mère à servir du maté à la clientèle, sauf que cela s'avère également pratique pour glaner des informations et obtenir des indices.
J'ai été agréablement surprise par le suspense glissé entre les lignes, et par l'intrigue finement composée. Ma curiosité a été immédiatement titillée. C'est simple, on se prend au jeu et on élabore des théories sur ce rituel de la lumière et sur l'énigme du parfum lilas d'orient qui embaume le linge de toutes les ménagères. On peut penser ce qu'on veut, mais c'est conduit avec beaucoup de dextérité. Pas si naïf que cela, finalement ! Anita et Matías nous entraînent à leur suite et font de nous ce qu'ils veulent. C'est du tout-cuit. Ne manque plus que le choripain pour aider les petites cellules grises à s'activer, et hop.
Une série de plus en plus réjouissante, qui nous installe en Argentine, au cœur d'un quartier chaleureux, où il fait bon croiser les figures familières et courir en douce après les mystères ! Très, très sympa.
Neuf de l'Ecole des Loisirs, 2017
Illustrations de Charline Collette / Traduction de Myriam Amfreville
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L'ÉCOLE DE MA VIE, de MARIE DESPLECHIN / Illustré par Glen Chaperon
Enfin les vacances d'été ! Pour Fanta, l'année scolaire n'en finissait plus de finir. Adieu le CP, place à l'aventure ! La fillette se rend, pour la première fois, en train à la campagne. Et quelle belle vie ! Tout est plus calme, la nature recèle des trésors insoupçonnés, on oublie les livres, les cahiers, les lectures du soir... On verra plus tard.
Mais les jours passent, et Fanta est à court d'excuses pour s'entraîner à la lecture à voix haute. C'est comme pour la piscine, quand l'amie de sa maman découvre qu'elle ne sait pas nager. Fanta n'est plus à un secret près !
Un petit roman sur la dyslexie et le casse-tête des enfants face à un texte où toutes les lettres se mélangent. Évidemment l'histoire montre qu'il ne faut pas dramatiser, être ou ne pas être intelligent, là n'est pas la question. C'est comme pour la nage, tout s'apprend. Et Fanta peut continuer de croire dans les étoiles en chuchotant des vœux. C'est tout plein de tendresse et d'espoir là-dedans !
Présentation en vidéo : YouTube.com
Le mystère Vandam Pishar, de Anne-Gaëlle Balpe
Lorsque Vandam Pishar apparaît pour la première fois dans la classe de Milo, tous les élèves scrutent avec intérêt ce garçon à la peau foncée, aux cheveux sombres, lisses et brillants, aux yeux si noirs qu'on voit à peine ses pupilles.
C'est surtout son attitude qui les surprend - le garçon campe farouchement sur ses jambes raides, les bras le long du corps, les doigts écartés. De plus, il refuse de retirer ses gants, il ne lance aucune boule de neige pendant la récré et il mange à la cantine un plat différent des autres. Il n'en faut pas davantage pour que leur imagination s'emballe. Et lorsqu'ils surprennent la maîtresse et le nouveau échanger d'étranges signes et parler d'une mission à mener jusqu'au bout, les enfants sont convaincus d'avoir affaire à une invasion d'extraterrestres !
En matière d'événements étranges, c'est vrai qu'ils en connaissent un rayon. Du jour au lendemain, leur ancien instituteur a disparu sans crier gare... ce qui a donné lieu aux plus folles spéculations. Échappée amoureuse, kidnapping ou espionnage, tout est passé en revue. Milo et ses copains se lancent aussitôt dans une enquête trépidante, entre filature sur le Chemin des étoiles et intrusion nocturne dans une maison grouillante de gelée verte, ils ne reculent devient rien pour percer le Mystère Vandam Pishar !
La lecture est délicieuse et fait la part belle à la fantaisie et aux fables qui naissent dans les jeunes esprits, souvent sous l'influence du cinéma ou de la télévision. La présente histoire est fantasque et fabuleuse juste ce qu'il faut pour titiller la curiosité des lecteurs. La fin, d'ailleurs, vaut le coup d'œil pour ses étonnants rebondissements. Histoire d'alien ou pas, voilà un petit roman réjouissant !
Neuf de l'Ecole des Loisirs, 2017
ill. de couverture : Maurèen Poignonec
Anita Mène l'Enquête : Le parapluie à fleurs, de Norma Huidobro
Cette charmante petite série nous invite en Argentine, dans le quartier de Barracas, où règne une ambiance paisible et familière. Cette tranquillité est hélas perturbée par une série d'événements inquiétants : une vieille dame inoffensive a été agressée dans la rue, son parapluie lui a été arraché et la maison de ses voisins a été visitée ! Quelle cacophonie en si peu de temps. L'émotion est à son comble et les commerçants s'indignent.
Dans le salon de coiffure de sa grand-mère, Anita écoute les langues se délier et prend note des cancans qu'elle rapporte ensuite à son meilleur ami Matìas, dont les parents tiennent la rôtisserie (également le lieu incontournable pour se régaler des spécialités locales).
Tandis que l'enquête suit son cours, les deux enfants vont avoir un œil sur la grillée et sur la frite. En gros, ils ne vont pas en perdre une miette et mettre leur grain de sel. Ainsi, ils vont recueillir le précieux témoignage de la victime et retracer chaque minute du crime dans leur carnet à énigmes.
À force de minutie, ils découvrent qu'un objet d'art aztèque a été dérobé au musée... mais doivent maintenant trouver le lien qui expliquerait pourquoi leur vie de quartier n'est plus qu'une pagaille sans fin (reportage tv, panne d'électricité générale...). On entend déjà les petites cellules grises en action !
Le suspense est léger mais donne à la lecture tout son charme et son piquant. Je ne doute pas que les plus jeunes apprécieront de suivre les deux détectives amateurs se coller à une enquête pour le moins étrange. Ils vont ensemble la décortiquer, avant de résoudre le mystère en s'inspirant des observations prodiguées au fil des chapitres. C'est là une approche pertinente au genre du roman policier !
Rendez-vous est pris pour un deuxième tome, annoncé en juin 2017, et retrouver avec plaisir Anita, Matìas, le quartier de Barracas et le Choripain ! ☺
Neuf de L'Ecole des Loisirs - Octobre 2016
Illustrations : Charline Collette
Le Lutin du Cabinet noir, de Jean-François Chabas
Edgar et sa famille viennent d'emménager dans un nouvel appartement que la marchande des quatre-saisons qualifie de « hanté ». Et en effet, dans le cabinet noir, où le garçon est envoyé en punition, il fait l'étrange rencontre d'un lutin qui sent la violette. La pauvre créature a été enfermée par une vilaine sorcière et implore l'aide de l'enfant pour retrouver sa liberté.
Ni une ni deux, Edgar se sent investi d'une mission et déploie une multitude d'efforts et de bravoure pour apprendre par cœur la formule magique, puis pour réunir les éléments essentiels pour célébrer la Hounga. Vous n'y comprenez rien ? C'est normal ! Dans ce récit, tout est destiné à vous retourner la tête et la farcir d'idées folles mais géniales.
Jean-François Chabas s'est visiblement beaucoup amusé en rédigeant cette histoire et son plaisir est communicatif ! Qu'est-ce qu'on se marre à suivre ce bonhomme de neuf ans s'échiner à amadouer un lutin malin, avec un hamster russe et une boîte de Krisprolls... Cette lecture n'a pas fini de vous réserver son lot de surprises tout en points d'exclamation !
Aventure loufoque et éclatante d'imagination, avec des réparties au poil et des rebondissements à gogo... on en voit de toutes les couleurs ! Frissons et émotions garantis.
Neuf de l'École des Loisirs ♦ mars 2015 ♦ Illustration de couverture de Louis Thomas
Le Club De La Pluie (série), de Malika Ferdjoukh
Ces histoires ont préalablement été publiées dans la revue Moi je lis en 2010 et 2011. Elles font aujourd'hui peau neuve avec cette double publication, en s'affichant sous des couvertures signées Cati Baur. Un rendez-vous immanquable, qui me rappelle vaguement le Club des Cinq, mais au ton moderne et pétillant. J'ai adoré !!
Nouvellement inscrite au pensionnat des Pierres-Noires, à Saint-Malo, Rose se lie d'amitié avec deux camarades, Nadget et Ambroise, qui partagent comme elle le goût de l'aventure et des mystères à résoudre. Dès son arrivée, Rose reçoit une pluie de boulettes de pain, provenant de la tour de l'internat, avant de capter que ce sont des appels au secours. Dès lors, on ne retient plus notre trio intrépide, qui va errer en pleine nuit dans les couloirs labyrinthiques de l'établissement. bravant les tempêtes et les interdits, déjouant aussi la surveillance rigoureuse de l'adjoint, M. Belloc, lequel remplace la directrice de l'école depuis une semaine. Cette dernière a été appelée au chevet de sa mère malade et a plié bagages en quatrième vitesse.
On frissonne de peur, mais avec un grand sourire aux lèvres, pour cette série bichonnée avec amour par Malika Ferdjoukh. L'ambiance aux Pierres-Noires est complètement décalée : passages secrets, courants d'air, fantômes et secrets ancestraux hantent les murs de cette vieille bâtisse. Un vrai décor de cinéma, façon Frankenstein. Mais que de réjouissance ! Les quatre histoires mêlent avec brio humour, suspense et un soupçon de fantastique. C'est gentillet, composé à partir d'éléments ordinaires, avec souvent un dénouement expéditif et peu surprenant, mais sans conséquence fâcheuse. ^-^
Après tout, il y a un réel travail d'écriture et ce soin précieux d'instaurer un univers unique, débordant de peps, d'esprit, de fantaisie, qui est la marque de fabrique de Malika Ferdjoukh. On retrouve aussi sa passion pour le cinéma (aaah, La Mélodie du bonheur, ou les souliers rouges de Dorothy ! ) et on s'amuse à pointer toutes les références aux grands classiques des romans policiers ou fantastiques (Rouletabille, Leblanc, Dupin pour Edgar Poe, Dumas, Moriarty, Watson, etc.). Même la détective Pippa Marlotte semble avoir été inspirée d'après le nom du héros de Chandler, Philip Marlowe, incarné par Humphrey Bogart à l'écran. ☺
Je m'emballe, je m'emballe... Une chose est sûre : cette série jeunesse est TOP, distrayante et merveilleusement bien écrite. Et les illustrations de Cati Baur sont un accompagnement, désormais, indispensable !!!
L'École des Loisirs, coll. Neuf, 2014 ♦ illustration de couverture : Cati Baur
Au sommaire, on trouve : L'énigme de la tour, Le voleur de Saint-Malo, Le fantôme des Pierres-Noires et Le mystère des chaussons rouges.
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Dans la foulée, j'ai également lu Robin au fond des bois
(texte initialement publié en 2010 dans la collection Voyage en page sous le titre Robin dans les bois).
Ce court roman de 75 pages propose une lecture au style très différent, à l'atmosphère plus sombre et oppressante. C'est l'histoire de deux frères, Robin et Jules, qui sont envoyés chez leur grand-mère pour le weekend. Ils doivent prendre le train pour couvrir la distance des 32 kilomètres, un trajet simple et sans heurt, ils ont l'habitude et apprécient de pouvoir se gaver en sucreries sans la surveillance des parents. Mais ce soir-là, Robin prend peur lorsqu'il s'aperçoit qu'ils voyagent avec un garçon de sa classe : Brendan Strekfus, une grosse brute sadique, qui passe son temps à terroriser ses camarades. Alors, Robin saute du train et décide de parcourir la distance restante à vélo, à travers la forêt. Les deux frangins n'en mènent pas large, seuls et transis de froid. Ils ne sont pas à l'abri d'une mauvaise rencontre non plus... FRISSONS GARANTIS !!! Malika Ferdjoukh m'a totalement bluffée avec cette intrigue pesante, poignante et qui prend aux tripes. Les jeunes lecteurs vont adorer avoir peur.
Folio junior, août 2014 ♦ illustrations d'Olivier Balez ♦ couverture : Philippe Munch
Brochettes à gogo, d'Anne Fine
Prié de débarrasser le plancher durant les travaux de rénovation de la cuisine, Harry supplie son oncle Tristram de l'inclure dans ses projets, à savoir passer une semaine de vacances sur une île, où habite sa petite copine prénommée Belle de Jour. Cette dernière est une baba-cool, qui loge dans une vieille maison près d'un ruisseau, et qui passe son temps à entrer en harmonisation avec l'Univers ou à communiquer avec les fées dans les champs.
Les garçons, eux, sont sceptiques. Ajoutez que le régime alimentaire constitué de thé à l'oseille, terrine d'orties ou pâte à tartiner à base de pissenlits ne les fait pas sauter au plafond ! Mais ils sont coincés là une semaine, plus de bateau avant le samedi suivant, les carottes sont cuites. Aussi, voient-ils en lot de consolation la perspective de la fête du village où ils pourront se gaver de frites et participer au concours de brochettes.
Pour tuer l'attente, Harry et son oncle nous font vivre des péripéties déjantées au coeur d'une campagne sauvage, hantée par des silhouettes fantomatiques, mais carrément excentriques sitôt qu'on s'accroche d'elles ! Les habitants baragouinent un langage incompréhensible et portent tous la barbe, à l'exception d'un jeune agent de police... Belle de Jour n'y serait pas étrangère. Méfiance !
Quelle lecture joyeuse et farfelue ! Anne Fine s'est fait plaisir à écrire cette histoire, tout comme Agnès Desarthe a pris autant de bonheur à la traduire, cela se ressent tout de suite. Le lecteur est ainsi embarqué dans une aventure débordante d'humour et de dérision. C'est un vrai régal, surtout que certaines scènes sont franchement cocasses et qu'on trouve une belle brochette de doux-dingues prêts à être internés ! Chouette couverture d'Adrien Albert, au passage...
Neuf de l'École des Loisirs, traduit par Agnès Desarthe - illustration de couverture : Adrien Albert