Le songe de l'astronome, de Thierry Bourcy & François-Henri Soulié
Nous sommes à Prague, en 1601. L'empereur Rodolphe II de Habsbourg a prévu une somptueuse cérémonie en l'honneur de l'astronome Tycho Brahé. Ce dernier promet en effet une grande annonce au cours de la soirée, ce qui n'a pas lieu d'enchanter l'assemblée car l'homme est retrouvé mort dans sa chambre.
Suspectant un empoisonnement, tous les convives sont assignés à résidence et ne doivent pas quitter le palais jusqu'à nouvel ordre, le temps que le capitaine Joseph Kassov mène son enquête, assisté de son neveu Mattheus.
La cour, rassemblant les plus grands penseurs, artistes et notables de l'époque, gronde de mécontentement. Mais tous sont des assassins plausibles et n'auront de cesse de brouiller les pistes à force de dissimulations et de révélations étonnantes.
Parmi eux, on trouve le peintre Sprangler, l'alchimiste Michael Maier et l'inquisiteur Roberto Bellarmin... mais également des intrigantes, doublées d'espionnes pour la cour d'Angleterre, un nain lubrique et comploteur, des courtisanes sans vergogne et des domestiques faibles et abusées.
Le tableau dressé est vraisemblable d'authenticité. Les auteurs ont en effet habilement mélangé le romanesque à des faits historiques (la mort de l'astronome est demeurée longtemps une énigme... jusqu'à la récente conclusion, en 2012). On apprécie donc ce voyage dans le temps, avec une peinture de la Renaissance fastueuse et haute en couleurs.
Plus largement, on ressent également la pression de l'enquête tenue à huis clos. La facture est classique mais efficace. Quelques longueurs à mi-parcours mais sans pénaliser la lecture qui s'avère distrayante et instructive !
Très bonne écoute audio : texte lu par Patrick Donnay avec une emphase tout à fait séduisante.
©2016 10-18 Grands Détectives.
(P)2018 Lizzie. Texte lu par Patrick Donnay (durée : 7h 30 env.)
Ma vie de pingouin, de Katarina Mazetti
Vous rêvez d’une croisière de l’extrême ? Alors, c’est parti pour l’Antarctique !
Wilma, 32 ans, vient de larguer les amarres pour le bout du monde et fuir, on s'en doute, un secret de plus en plus lourd pour elle. Pourtant, en apparence, la jeune femme est dynamique, pétillante mais maladroite. Elle a même pris sous son aile Tomas, journaliste désabusé, grincheux, bougon, paumé, qu'elle tarabuste constamment pour reprendre du poil de la bête.
Spectatrice perspicace et espiègle, Alba, septuagénaire turbulente, scrute ses semblables et rédige dans son petit carnet de notes un nouveau projet baptisé “La ruine des espèces”.
Ainsi, tout ce petit monde se croise et s'emmêle, depuis Paris jusque Ushuaia, en une joyeuse cacophonie qui ne manque ni de charme ni de d'entrain.
La lecture, a priori enjouée, est en fin de compte faussement légère, car il est aussi question dans l'histoire de maladie, de dépression, de solitude et de désœuvrement...
Katarina Mazetti est coutumière du fait mais déjoue avec brio les pièges du pathos. Elle nous sert une comédie éclatante de vivacité et de situations cocasses. On n'est pas plié de rire à chaque coin de page, mais on ressent une profonde tendresse pour les personnages à travers leurs aventures débordantes de sincérité.
Les cinq comédiens, sélectionnés par Audiolib, croquent avec talent cette lecture enthousiasmante et pleine de peps. On ne s'ennuie pas un seul instant et le dépaysement est assuré. La croisière se termine beaucoup trop tôt et c'est avec regret qu'on la quitte !
Audiolib ♦ mai 2015 ♦ texte lu par Patrick Donnay, Erwin Grünspan, Nathalie Hons, Cachou Kirsch et Marcha Van Boven (durée : 7h 17)
“Quoi de mieux pour réchauffer les cœurs en perdition qu’un iceberg, pour peu qu’il se retourne, révélant le pingouin qui sommeille en chacun ?”
traduit du suédois par Lena Grumbach (Mitt liv som pingvin) pour les éditions Gaïa
Nous, de David Nicholls
Pauvre Doug Petersen ! Lorsque son épouse Connie lui annonce qu'elle envisage de le quitter dès que leur fils Albie rentrera à l'université, il embarque aussitôt toute sa petite famille pour un tour de l'Europe concocté à sa sauce et espère ainsi, 1) raviver la flamme de sa chère et tendre, 2) se rabibocher avec son fiston qu'il ne comprend plus. Las, leur périple tourne à la débandade et renvoie notre homme désabusé dans une vilaine posture. Seul, abandonné, désemparé.
S'engage alors une comédie cynique et grinçante, mais malgré tout désopilante. Certes, on sourit face aux déboires de Doug, déjà abattu par les critiques de ses proches, constamment ligués contre lui, à lui reprocher son esprit scientifique, cartésien, sans imagination, sans grain de folie. C'est d'autant plus un comble qu'on découvre les débuts de son histoire avec Connie, jeune artiste bohème, alors attirée par son contraire, avant de s'en lasser.
En avant les montagnes russes ! On passe par tout un panel d'émotions en lisant ce roman, qui s'ouvre dans la joie et l'allégresse, avec un voyage cumulant les maladresses (dans les rues d'Amsterdam, Doug cherche à visiter le musée d'Anne Frank mais provoque un séisme chez les bikers et se décompose sous leurs yeux), avant de basculer dans le sordide, le touchant, le poignant.
L'image du couple et de la famille prend un coup dans l'aile et laisse une saveur amère, sans toutefois rendre la lecture aux accents mélancoliques trop démoralisante (contrairement à Un jour). Excellente interprétation faite par Patrick Donnay - c'est frais, cocasse, subtil et riche en nuances, pour un récit à la fois sensible, pathétique et émouvant. J'ai passé un très bon moment !
Audiolib ♦ avril 2015 ♦ texte lu par Patrick Donnay (durée : 14h 12) ♦ traduit par Valérie Bourgeois [Us] pour les éditions Belfond