Pêle-mêle : La montagne à la mer - Allumette et le gros caillou - Le raton laveur qui ne voulait pas se laver - À l'eau, Super !
Premier volume d'une série qui ne manque pas d'humour et qui s'annonce particulièrement guillerette !
Grand Chien propose à Petit Chat de partir à la mer. Ce dernier aurait préféré la montagne... mais pourquoi pas le bol d'air marin, le sable chaud, le bruit des vagues et le chant des mouettes. Blotti dans son petit lit, Petit Chat se dit qu’il pourra construire sur la plage une gigantesque montagne de sable.
Ainsi, ce sera la montagne à la mer !
Cet album évoque avec douceur et légèreté l'enfance avec les joies, les frustrations et toutes les petites découvertes de la vie ordinaire ! Avouez qu'on en rêve tous, de la mer ou de la montagne... soupirs. Au moins cette lecture procure une bouffée revigorante : couleurs éclatantes, complicité et belle preuve d'amitié... C'est adorable !
La montagne à la mer, de Rascal & Peter Elliott
Pastel, 2020
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Encore une histoire complètement farfelue de Catharina Valckx : dérision, déraison, délirant... totalement !
Allumette doit son nom à ses cheveux (on dirait des flammes). Un jour, il lui est arrivé un truc incroyable : en s’asseyant sur un gros caillou, celui-ci s'est réveillé et s'est mis à parler. Il dormait depuis cent mille ans et a oublié des choses essentielles, comme les cerises.
C’est le début d’une aventure hors du commun, au sujet d'une amitié improbable entre une fille, son chat, une tortue et un caillou. Cet album célèbre aussi la danse de la pluie, le bonheur d'une nuit à la belle étoile... et plus largement le temps qui passe. Un album original et complètement farfelu.
Allumette, par Catharina Valckx
L'école des Loisirs, 2020
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Julien Baer a eu l'idée prodigieuse de proposer un imagier de photos ludique et poétique car dans ce livre, c'est à toi de compter (les oies, les chaises, les rayures, les fraises, les briques...).
Rien que la couverture annonce clairement la tendance : fraîche et lumineuse !
En plus d'apprendre à compter, l'enfant s'exerce à aiguiser son sens de l’observation. Une vraie réussite.
Tout compter ! de Julien Baer
Loulou & cie, 2020
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Tous les soirs, Raton se cache pour que sa maman ne l’emmène pas se laver. C'est toujours embêtant de dire stop à ses jeux ou de quitter les personnages qu'on vient de créer en se racontant de nouvelles histoires... Alors il cherche à ruser et se planque pour éviter de plonger dans le lac, avec son frère et sa sœur. Mais un soir, maman déclare forfait : trop lasse de courir après son Raton qui refuse de se laver. Qu'il reste dans sa crasse !
Au début, ça ne fait rien... enfin la tranquillitié, youpi. Et puis ça commence à gratouiller, à fouetter. Les copains à l'école ne veulent plus s'asseoir à côté de lui et lui lancent des insultes. En plus d'être triste, il se sent très, très seul. Il a également envie de reprendre les parties de cache-cache avec sa maman.
Notre jeune rebelle va finalement rentrer dans le rang, à force de gros câlins et d'une grande complicité. Tout ça pour dire que cet album est juste craquant (et tellement drôle) à lire !
Le raton laveur qui ne voulait pas se laver, de Soledad Bravi
Loulou & Cie, 2020
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Pour encourager Super qui n’a pas envie de nager, sa maman invite les grenouilles, les canards, les photos et aussi l'éléphant en espérant lui faire changer d'avis. Mais rien n'y fait. Super n'aime pas l'eau, il a peur et il préfère rester sur le bord de la piscine.
Tant pis ! Ses camarades décident de plonger à l'unisson. Et là... quelle bidonnade !
La lecture est idéale pour consoler les petits que l’eau rebute : elle a notamment recours à une super maman à la patience à toute épreuve et à une belle brochette de vainqueurs. Au top !
À l'eau, Super ! de Gwendoline Raisson & Ella Charbon
Loulou & Cie, 2020
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Et pour ceux qui ne loupent pas chaque rendez-vous avec Minusculette :
Place à un nouveau format : la première aventure en BD !
On retrouve les mêmes ingrédients, soit une belle histoire d’amitié et de partage, mises en scène avec les douces aquarelles de Christine Davenier.
Pour fêter le printemps, Minusculette et ses copains s'affairent aux préparatifs quand notre pétillante héroïne découvre une étonnante créature chez Maurice (le muscardin). Mais cette petite salamandre leur réserve encore d'autres surprises !
C'est frais, c'est charmant, c'est doux et réconfortant. Une belle série, sans aucun doute.
L'invitée surprise (la BD de Minusculette), par Kimiko & Christine Davenier
Loulou & cie, 2020
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Pêle-mêle : Dédé - Cacaneton - Tout le monde a peur - Encore une histoire d'ours
L'éditeur dit TOUT dans sa présentation :
Dédésolés, c’est dédécidé : dans ce résumé nous ne dédévoilerons rien du dédernier-né dédélirant de Matthieu Maudédet. Non, pas un seul dédétail. Ne soyez pas dédépités ni dédécouragés! Sachez d’ores et dédéjà que cet album est plein de dédessins dédésopilants et qu’il parle de dédébrouillardise. Il va vous dédérider si vous avez la bonne idédée de le lire et il fera dédés heureux si vous le dédestinez à quelqu’un ! ;o)
Vrai de vrai : cet album est désopilant avec son humour de la répétition “dédé” tout au long de l'histoire, laquelle met en avant le système Dédé (débrouille et bricolage). Effet décoiffant assuré. Du moins, on dirait qu'un vent de folie souffle sur nous. Et c'est drôlement bien. Avec une petite note finale particulièrement cocasse.
Dédé, par Matthieu Maudet
l'école des loisirs, 2020
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Au cours de sa promenade, Cochon trouve un bel œuf et se pourlèche les babines : quelle bonne omelette en perspective !
Mais voilà un Caneton déterminé brise la coquille et jaillit en hurlant Papa. Cochon se sent tout rabougri, conquis. Il élève Caneton comme son propre fils et lui apprend à se bâfrer, à grouiner ou à se vautrer dans la boue. Caneton est heureux comme un pape, qu'importe s'il ne peut pas apprendre à voler.
Sa nouvelle copine Poussinette le trouve d'ailleurs charmant et rigolo, même si c'est vrai qu'il ne sent pas très bon. Mais grandir comme un Cochon se révèle un atout inattendu : quand son amoureuse est kidnappée sous ses yeux par un renard, Caneton vole à son secours - oui, il vole - et bombarde le malotrus d'énormes fientes dignes de son paternel.
Vous vous dites que cette histoire de crottes ne pourra que combler les jeunes lecteurs ! Ça marche à tous les coups... Pouce levé d'assentiment pour cette suite inattendue de « Crotte de nez ».
Cacaneton, d'Alan Mets
L'école des Loisirs, 2020
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En récitant les peurs des uns et des autres, cet album se veut surtout rassurant et cherche à démontrer les limites de chacun !
La souris verte a peur du chat, qui a peur du bain. Le ver dodu redoute la mésange bleue, laquelle fuit les cages. Le poisson clown tremble devant la pieuvre mais tous deux sont tétanisés par la pollution des hommes. C'est donc une chaîne qui s'étend à l'infini... même les éléphants ou les ogres ont leurs propres angoisses. Et je ne vous parle pas du petit garçon de cette histoire, qui avait peur de l'eau, mais ça c'était avant !
Un chouette album pour motiver les plus jeunes, car il faut légitimer les peurs mais ne surtout pas les dresser comme des prisons. Un peu d'humour, et hop... une lecture du soir avant un sommeil réparateur, très efficace.
Tout le monde a peur, de Rascal & Pierre Lemaitre
Pastel, 2020
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Cet album est extrêmement drôle ! C'est d'ailleurs mon album préféré de ce joyeux pêle-mêle ! ;o)
C'est l'histoire d'un ours qui rouspète contre l'auteur... taratata, l'ours en a assez d'être le héros des histoires pour les enfants. Il voudrait démissionner et donner son rôle à d'autres animaux au potentiel insoupçonné. Mais ce gredin d'auteur n'en a que faire. Il veut son ours, grincheux, glouton, paresseux. Les enfants adorent. Ils ne veulent pas d'un éléphant, d'un chaton, d'un ouistiti ou d'une taupe à nez étoilé. Non merci. Les ours sont parfaits.
La mise en scène est franchement savoureuse et désopilante : le dialogue entre l'ours et l'auteur est original et surprenant. Ça fonctionne à tous les coups, en tant que lecteur, on en redemande !
Encore une histoire d'ours, par Laura & Philip Bunting
Kaléidoscope, 2020
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Pêle-mêle Pastel : Milo à la neige - Pablo - C'est qui chat ? - Carré
Au cours de la nuit, il a neigé à gros flocons. C'est l'occasion pour Milo et Boris de courir s'amuser : d'abord sur la luge, mais gare à la chute, puis en se lançant des boules sur la tête. Chemin faisant, les deux amis vont s'égarer dans la forêt. Et lorsque la nuit tombe, le moindre petit bruit devient soudainement terrifiant ! Chut... deux silhouettes s'approchent. Mais le froid les gagne et les premiers atchoum résonnent dans le silence.
Charmant et attendrissant, cet album raconte les folles épopées de deux copains par une journée d'hiver tout à fait ordinaire. De nombreuses possibilités s'offrent ainsi à eux pour exploiter les richesses de la saison glaciale et enneigée... sauf que rien ne vaut un bon vieux bonhomme de neige, avec sa carotte en guise de nez ! Superbe ambiance, délicate et frissonnante, avec une belle complicité autour d'un duo qui s'entraîne aisément dans de bonnes parties de rigolade. Une lecture rafraîchissante !
Milo à la neige, d'Anne Pym & Francesco Pittau
Pastel de l'école des loisirs, 2019
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Coucou, voici Pablo ! Enfin, il est encore dans son œuf mais le temps est venu de briser sa coquille. D'abord craintif, il procède tout doucement : un petit trou par ci, par là. Pablo apprend ainsi à découvrir le monde à travers les cinq sens. Et finalement, il se sent assez en confiance pour débouler dans la vraie vie. Conquérant mais prévenant : mieux vaut se garder un bout de coquille pour les mauvais jours (de pluie) !
Cet apprentissage du monde explore plusieurs pistes : découverte des formes, des sons, des sens, des émotions aussi. Pablo avance progressivement mais gagne ainsi en assurance. Chaque petit lecteur pourra se reconnaître dans notre jeune ami, prendre exemple et s'appuyer sur ses conseils. C'est adorable et assez drôle aussi. La fin apporte une touche lumineuse à cet ensemble essentiellement basé sur du noir & blanc : un graphisme sobre et élégant, un texte qui s'amuse à distiller un peu de suspense. Un album très convaincant.
Pablo, de Rascal
Pastel de l'école des loisirs, 2019
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Quel amour d'album ! Dans cette histoire, un chat et un bébé se rencontrent et s'apprivoisent avec un peu de méfiance mais non sans intérêt. La couverture en est la parfaite illustration ! Cela va de cache-cache en câlins, de chatouille en sauve-qui-peu. Bref, ces deux-là n'ont pas fini de se tourner autour pour mieux s'apprécier.
Et quelle lecture efficace et attendrissante ! Michel van Zeveren va à l'essentiel : sobriété, tendresse, humour. La séduction opère instantanément. On adore cette formidable connivence qui s'installe entre un enfant et un animal.
C'est qui chat ? de Michel Van Zeveren
pastel de l'école des loisirs, 2019
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Chaque jour, Carré descend dans sa grotte, prend une pierre et la pousse jusqu’au sommet de la montagne. C’est son travail. Jusqu'au jour où il découvre qu'il serait un sculpteur ! C'est Cercle qui vient de crier au génie en s'extasiant sur son tas de pierres. Ce faisant, Cercle réclame une statue à son effigie. Carré y passe donc toute la nuit avant de déclarer forfait. Il doit rétablir la vérité. Mais au petit matin, Cercle arrive et découvre sa création.
La pirouette finale ne manquera de susciter quelques sourires cocasses aux lecteurs ! Cet album montre également les mystères de la création artistique, ses libres interprétations et son inspiration qui peut survenir sans crier gare, au hasard d'une longue nuit harassante, par temps de pluie ou sous l'effet du désespoir. En tout cas, on exploite avec plaisir le fond et la forme, en tournant les pages d'un esthétisme a priori austère et néanmoins fascinant.
Carré, de Mac Barnett & Jon Klassen
Pastel de l'école des loisirs (2019) Traduit de l'anglais par Alain Gnaedig
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Hansel le gourmand et Gretel la courageuse, de Kimiko & Margaux Duroux
Cette adaptation du conte des frères Grimm, par Kimiko et Margaux Duroux, est peu banale et délicieuse.
Imaginez... un frère et une sœur se perdent dans la forêt, où ils vont découvrir une maison couverte de bonbons. Sans demander leur reste, ils dévorent tout ce qui leur tombe sous la main jusqu'à la venue d'une vieille dame, qui les invite à sa table. Crédules et innocents, ils ne se méfient pas assez de cette sorcière qui a l'intention de les servir pour son prochain repas !
Haut les cœurs, les amis ! Rarement une histoire aussi cruelle et féroce surprendra les enfants par son étonnant contraste en proposant une mise en scène fabuleuse, des photographies sublimes et des décors féériques. N'en doutez plus. Cette lecture est à la portée des enfants - c'est d'apparence mignon, avec du suspense, des frissons, du courage et des émotions. Encore une réussite pour ce duo !
l'École des Loisirs ♦ loulou & cie ♦ octobre 2014
À comparer avec la version de Rascal :
Ce conte très célèbre est ici proposé dans une version sans texte. Simplement en noir et blanc, avec des jeux d'ombres et de silhouettes. À l'enfant de se raconter sa propre histoire, en s'appuyant sur le visuel, simple et original.
8 minutes et 19 secondes, de Rascal & Hubert Grooteclaes
Il faut 8 minutes et 19 secondes pour que la lumière du soleil parvienne jusqu'à la Terre.
Un livre sur la perte d'un être cher, le sentiment d'abandon, le chagrin, le temps qui passe, les souvenirs qui restent, le vide qui ne se comble jamais...
« La vie continue avec nos souvenirs de toi. Réveillés au détour d'un tiroir, d'une rue, d'une fleur, d'un dessert, d'une photo de bord de mer. »
Le texte est d'une grande sensibilité, les photographies sont énigmatiques mais pleines d'émotion, dans une ambiance certes poignante.
Et pourtant, je suis restée en marge de cette lecture, que je trouve aussi peu accessible pour des enfants. Le ton est solennel, assez froid et peu réconfortant, malgré son intention.
La lecture laisse une sensation embarrassante, à l'instar d'une autre lecture, Marie et les choses de la vie de Tine Mortier & Kaatje Vermeire, qui traite du même sujet.
Pastel, octobre 2014
L'ours qui danse, de Rascal
L’homme est immense, parfois - L’ours est grand et l’homme est petit. L’ours est joueur et curieux. Les petits des hommes aussi. L’ours chasse le phoque. L’homme chasse l’ours quelquefois. Nanook chante en frappant son tambourin et l’ours blanc danse sur sa chanson.
L'ours qui danse, de Rascal (Pastel, octobre 2013)
Je n'ai pas été convaincue, toutefois j'aime beaucoup le travail de Rascal...
Pêle-mêle Clarabel #51
Un pêle-mêle à thème, pour changer : Lorsque l'enfant paraît... !
Tous les matins, Joseph a rendez-vous avec l'oiseau qui semble le guetter depuis sa branche alors que le garçon tire les rideaux de sa fenêtre. Joseph comprend que l'oiseau attend son petit déjeuner, mais un matin l'oiseau est différent et refuse les graines que Joseph lui tend. Il a plus important à lui montrer, là-haut, sur la branche de l'arbre !
Les illustrations et les couleurs de cet album sont vraiment superbes ! Cette histoire de petites graines peut être librement interprétée (les petites graines qu'on plante dans le ventre pour avoir des bébés, par exemple) car elle ne se cache pas pour exprimer tout le bonheur et aussi l'excitation qu'il y a dans l'attente d'une future naissance. Joseph, notamment, a le coeur qui chatouille... en plus de son sourire comblé et de ses yeux qui brillent, bref sa joie est contagieuse !
Petites Graines, par Emile Jadoul & Catherine Prieur (Pastel, 2012)
Si les mains de papa sont si grandes, c'est pour mieux sentir bouger le bébé dans le ventre, ou pour mieux bercer son petit corps tout entier. Les mains de papa sont deux grandes coquilles derrière lesquelles l'enfant peut se réfugier en apprenant à grandir. Emile Jadoul a ainsi dessiné de très grandes mains, mais c'est de façon symbolique et les détails ont leur importance, comme ce petit doigt auquel s'accroche l'enfant, avant de se lancer dans le vide (apprendre à marcher !). C'est vraiment une belle approche, une belle lecture à partager et un cadeau à offrir aux papas !
Les mains de papa, par Emile Jadoul (Pastel, 2012)
Ça commence par un baiser, ça finit par un bébé. Proverbe québécois
Lui aussi mérite d'être offert, lu, donné, partagé... C'est un album magnifique de Rascal (ses techniques d'illustrations sont impressionnantes, j'ignore le procédé mais j'étais sans cesse attirée par l'envie de glisser ma main sur chaque page par admiration). C'est donc une histoire qui parle de la famille et des proches au moment où ils se penchent sur le berceau du bébé en allant de leurs petits commentaires. On s'y retrouve, on se rappelle, on aime, on admire... Bauchette aussi a aimé.
Au monde, par Rascal (Pastel, 2012)
Pêle-mêle Clarabel #44
Oncle Tatoo est un raconteur d'histoires. Il lui suffit de relever la manche de son Perfecto pour dévoiler son bras tatoué (ici, pas de Joconde ni de Radeau de la Méduse, mais un champignon, une licorne, un ressort, un raton laveur, une chaise...) et ainsi livrer le récit d'aventures palpitantes. Ce sont les fillettes La, Lala et Lalala qui sont ravies ! Les histoires du tonton sont riches en anecdotes, farfelues ou poétiques, rigolotes et invraisemblables, mais à chaque fois elles en sortent ravies, tapant dans les mains et suppliant 'encore, encore'. On les comprend ! C'est un ouvrage, avec couverture cartonnée et illustrations pleines de couleurs, qui procure un vrai plaisir de lecture.
Les Histoires de l'Oncle Tatoo, par Rascal & Peter Elliott
Ecole des Loisirs, coll. Pastel, 2011.
Une poulette et un poulain se chamaillent l'affection du fermier. Chaque jour, l'un et l'autre guettent le moindre indice prouvant que Siméon est plus attentionné envers le premier au détriment du second. Ce sont alors de grosses, grosses scènes de jalousie qui fomentent dans l'ombre... mais elles sont vite étouffées par l'évidence que leur traitement est strictement égal. Il n'y a pas un pour dépasser l'autre, et cette situation aurait pu piétiner jusqu'à la fin des temps si Silène n'avait pas fait son apparition. C'est la voisine de la ferme, elle aussi se promène à dos de cheval et ne peut se séparer de sa basse-cour, ce qui rend heureux notre poulain et notre poulette (parce qu'ils vont trouver l'élu de leur coeur !). Et la terrible question du départ sera vite chassée d'un revers de la main (ou de la patte).
Vous aimez les histoires drôles et poétiques, où l'on danse la polka, le rock et la rumba et où l'on pense promenade, escapade. Et tartine à la marmelade. Les histoires où on déménage une table aux pieds tournés, une collection d'étoffes à carreaux et des verres en forme d'oiseau. Les histoires où l'on glousse, roucoule et trépigne de bonheur. Alors lisez ce livre ! C'est encore une promesse de bonheur.
La Terrible Question, par Jeanne Ashbé
Ecole des Loisirs, coll. Pastel 2011.
Egalement l'auteur de Parti...
C'est l'histoire d'un arbre, d'un chat et d'un oiseau. Ce dernier vole dans le ciel, se pose sur l'arbre puis s'envole à nouveau... Le chat tente de lui faire sa fête, mais l'oiseau n'est pas dupe et s'envole de plus belle. Vient enfin l'enfant qui assiste à la scène et qui attend avec impatience le retour de l'oiseau. Dialogue de sourds, pensez-vous ? Pas du tout ! Le livre est un bel objet, mais la lecture ne m'est pas apparue assez consistante.
A la place, les tout-petits rigoleront sur l'histoire de la culotte envolée et dont l'utilité questionne les animaux du jardin !
La fiction s'insinue dans la réalité comme des racines qui font craquer le revêtement d'un trottoir.
L'histoire suivante se passe au pensionnat Biriozy, près de Novgorod, où trois camarades de chambrée, Pénélope, Ludmila et Sanouk, suivent leurs études entre ennui et torpeur. C'est alors qu'arrive leur nouveau professeur de littérature, Anton Mordiev, qui leur confie un petit livre qui va tout faire basculer. Les filles décident de se faire la lecture tous les soirs, dans leurs lits, et aussitôt se prennent de passion pour la découverte de la civilisation nénètse, un petit peuple qui vit de l'élevage de rennes au-delà des Monts Oural. Mais cette lecture n'est pas du goût de tous, car la sous-directrice, Olga Petrovna, leur confisque l'ouvrage avant de procéder à des mesures plus radicales.
En quelques 200 pages et des brouettes, et avec une élégance très appréciable, Anne Bouin a tout saisi de la subtile balance entre le divertissement, la beauté et le charme d'une rencontre. Elle nous livre un roman incroyable, d'une force rare, et qui renoue avec l'art de raconter une histoire. Et ce qui est étonnant, aussi, c'est la richesse de l'intrigue et tout ce qu'il est possible d'impliquer, d'imaginer, de dénoncer. Et puis c'est drôle, l'amitié entre les filles est espiègle, sincère et rafraîchissante, il y a aussi du suspense, beaucoup de poésie, quand Sanouk découvre une petite feuille de bouleau entre les pages du livre, elle ressent, plutôt qu'elle ne comprend, que la lecture de l'ouvrage sera capitale pour elle. Et c'est enfin grandement dépaysant, l'histoire se déroulant en Russie, nous nous baladons alternativement entre les murs du pensionnat austère, dans la très coquette isba bleue de la babouchka de Sanouk, ou sous un tchoum, à se réchauffer sous une peau de renne. Bref, j'ai été totalement sous le charme, plus qu'enchantée par cette première approche, qui se poursuit avec Un été sibérissime.
Les vacances d'été réservent à nos trois héroïnes, Pénélope, Ludmila et Sanouk, des retrouvailles avec leurs familles respectives, sans se douter qu'une nouvelle fois les aléas de la vie vont les réunir pour se serrer les coudes au nom d'une cause commune.
Ce deuxième épisode n'a rien perdu de son charme, de sa fraîcheur, de son dépaysement. Les premiers chapitres nous offrent même une impression de nonchalance estivale, mais il ne faudrait pas s'y tromper, car l'histoire reprend ses droits et nous plongeons alors dans un roman qui mélange l'aventure, l'espionnage, la mafia et même les premiers émois amoureux... Sincèrement, c'est toujours aussi beau, doux et élégant. L'ensemble paraît plus dynamique, synchronisé comme un ballet russe qui s'enflamme. On vit au rythme des personnages, de leurs palpitantes aventures, on tremble face aux dangers, on oublie le monde qui nous entoure, on prend fait et cause pour protéger la culture nénètse, et on aime jusqu'aux méchants, qui peuvent se révéler attachants à leur façon. Vraiment, ce fut une lecture chaleureuse, enivrante, simple et parfaitement efficace, et j'ai très envie de retrouver tout ce petit monde le plus vite possible !
Petite Feuille Nénètse (Médium, EdL 2009) & Un Eté Sibérissime (Médium, EdL 2011) - Anne Bouin
illustration de couverture : Rascal
Pêle-mêle Clarabel #26
Cet album est magnifique ! C'est l'histoire de Georges, gardien du phare des Roches Grises depuis quarante ans. Chaque fois qu'il reçoit un courrier officiel, il n'hésite pas à le déchirer et fait voler les morceaux du haut de son balcon. Non, jamais il ne prendra sa retraite ! Et pourtant, les nouvelles se gâtent. Il devient impératif que Georges quitte son rocher pour se mettre à l'abri de la tempête qui va engloutir son phare. Le vieil homme ne se résigne toujours pas, jamais un marin n'a quitté son navire, lui aussi restera à bord jusqu'au bout. Et le soir de la catastrophe, Georges affronte la montée des eaux et les éléments déchaînés. Et moi, j'ai été totalement happée par l'histoire, fascinée par les illustrations. J'ai admiré la beauté de l'océan devenu fou, la résistance de l'homme, le face-à-face inéluctable. C'était un spectacle haletant, poignant. Et les couleurs sont superbes. Un Océan dans les Yeux - Dedieu (Seuil jeunesse, 2011)
Cet album m'a rappellé celui de Stéphane Sénégas - Qu'est-ce que tu vois ?
C'est l'histoire d'un petit bonhomme qui va passer ses vacances chez un oncle Horace qui vit seul dans un phare, loin de toute civilisation. Cela sent l'ennui ! Le gamin fait d'abord preuve de mauvaise volonté, puis commence à s'intéresser aux projets doux-dingues de son oncle, dont la fameuse pêche aux crabes.
En fait, l'album repose sur la citation de Flaubert, qui dit :
Pour qu'une chose soit intéressante, il suffit de la regarder longtemps.
Parce qu'il était de mauvais poil, le garçonnet ne voyait pas plus loin que le bout de son nez, même au sommet du phare, alors que l'océan s'étend à perte de vue et promet des spectacles insensés et ahurissants à qui veut bien les voir. A force de patience et d'adaptation, l'enfant comprendra et en restera bouche bée.
J'aime tout dans cet album : son histoire, le message caché, les couleurs, les personnages, les idées, le dépaysement, l'envie d'évasion, les rêves, l'imaginaire, bref je suis complètement séduite ! A moi de découvrir les autres albums de cet auteur maintenant. (Kaléidoscope, 2011)
+ J'en profite pour rappeler l'album de Rascal, Le Phare des Sirènes, illustré par Régis Lejonc (Didier jeunesse, 2007). Egalement un coup de coeur.
CHALLENGE Je lis aussi des albums (édition 2011) - 12