Les Dix plus beaux jours de ma vie, d'Adena Halpern
Cela commence comme une banale intrigue de chick-lit : Alex, 29 ans, se fait renverser par une voiture, alors qu'elle promenait son chien. Toutes les deux rendent l'âme et s'envolent au Paradis. Rendez-vous au 7ème Ciel, le niveau idyllique et merveilleusement superficiel, mais pour y mériter sa place, Alex doit s'astreindre à un petit exercice : une rédaction sur les dix plus beaux jours de sa vie. La jeune femme est paniquée (sa vie sur terre était une succession d'échecs) et craint d'être rétrogradée. Plus de villa avec dressing plein à craquer, plus de voisin sexy, plus de famille aimante et consolatrice, plus de silhouette parfaite... ce serait franchement trop injuste ! Après une mort précoce, Alex estime qu'elle a bien droit à son lot de consolation.
Et là, sous le vernis clinquant, on découvre une histoire profonde et touchante, où Alex ne cache rien de sa courte existence, avec ses bonheurs et ses déboires, distillés dans un flot de tendresse et d'émotion. C'était une petite fille choyée, gâtée pourrie par des parents qui croyaient être privés d'un tel bonheur, entourée par une famille aimante, mais déconnectée de la réalité (à l'heure où ses copines de classe organisent des soirées-pyjama, Alex joue au bridge avec ses grands-parents). Elle évoque aussi son adolescence balbutiante, son amitié avec Penny, ses hormones en folie, ses caprices de princesse, ses tentatives de se construire ou de trouver sa voie, ses fiançailles ... loupées, son désir d'émancipation, de couper le cordon et de prouver à son père ses valeurs. Bref, les pages défilent, dévoilant une héroïne sensible et terriblement ordinaire. Alex Dorenfield, c'est un peu chacune de nous, vive et spontanée, empotée et maladroite, drôle et imparfaite. Je l'ai immédiatement adoptée.
J'ai beaucoup aimé partager ses souvenirs, rendant compte d'une vie harmonieuse et épanouie (et c'était là le but de son exercice !). ;-) À côté de ça, le livre possède un grain de folie appréciable. Et comme j'avais envie de douceur, cette lecture est tombée pile poil au bon moment. Tendresse, humour, fantaisie... ce roman fait un bien fou !
éditions Mosaïc, mars 2015, traduit par Karine Xaragai (The Ten Best Days Of My Life)
Faut croire qu'on aime ça, les mystères.
Un an a passé depuis les tumultueux évènements survenus au 180 rue des Innocents, Youri, Tomaso et Emma ont regagné un semblant de quiétude, et paf ! leur clodo Félix, qui fait partie des murs, est retrouvé baignant dans une flaque de sang, sauvagement battu, entre la vie et la mort. Aussitôt Flora accourt pour l'accompagner aux urgences, et puis plus rien ! Tomaso et Youri n'ont plus de nouvelles, mais refusent de rester inactifs. Ils décident alors de retrouver la fille de Félix, une certaine Sophie, pour que le pauvre vieux n'imagine pas qu'il est seul au monde en ayant raté sa vie.
De son côté, Emma, amoureuse, a pris ses distances avec les garçons avant de réaliser la couleur amère de sa jolie romance. Hop, il est temps de rentrer au bercail et d'apporter son aide aux copains. Mais leur enquête ne s'arrête pas à retrouver une enfant perdue, c'est surtout flirter avec le danger, encore une fois. Près du corps de Félix, figuraient des inscriptions à connotation fasciste. Les suspects sont désignés, ne manquent plus que les preuves... Et là, attention, DANGER !
Une nouvelle fois, l'histoire trempe ses doigts de pied dans une réalité sordide et qui met mal à l'aise. Il y a l'agression de Félix, la découverte de son passé mais aussi la confrontation avec les milieux extrémistes, racistes. Décidément, le fond de l'histoire ne fait pas dans la dentelle, c'est un roman noir, au goût âpre et qui colle au palais. Mais c'est aussi un roman sensible, alors que les paroles de Félix nous prennent à la gorge, surgissant de nulle part, mettant à nu le désespoir de l'homme. Et c'est enfin et surtout l'occasion de retrouver notre trio composé de Tomaso, Youri et Emma, ils sont drôles, ironiques, réceptifs à la détresse de leurs proches et on les aime pour ça. A ce propos, bonne nouvelle : le triangle amoureux a trouvé sa solution, plus de perte de temps et d'énergie, et c'est tant mieux. Non, parce que ces trois-là s'aiment, mais ils sont indissociables et n'ont pas besoin de se conter fleurette pendant des pages et des pages, ce serait du gâchis.
De toute façon, la vie au 180 (marque déposée) ressemble à un tourbillon de petits et grands drames de la vie : Olga, la soeur de Youri, a besoin d'un jus de raisin qui fait office de remontant, les parents sont dépités, Flora a disparu, Ben le musicos fait son Johnny, madame Robert peut aussi être une aide très précieuse, et le Capone toujours... l'habituel QG de notre petite bande, au décor kitsch réconfortant, avec ses bonnes odeurs et Irina qui devine tout. La bonne adresse, à l'image de la série, aux charmes et aux atouts fort sympathiques.
Rouge Bitume (Roulette Russe #2), par Anne-Gaëlle Balpe, Sandrine Beau & Séverine Vidal
Oskar éditeur, 2012