Une mariée de trop, de Louise Vianey
Margot est impatiente de se rendre à l'église où Gabriel, son fiancé, lui a réservé la surprise de sa vie en organisant leur mariage dans le plus grand secret. Alors qu'elle s'engage dans l'allée principale, le cœur battant à tout rompre, ses espoirs soudain s'effondrent : son promis est déjà au bras d'une autre.
Humiliée, abasourdie et estomaquée, Margot s'enfuit sans demander son reste et se réfugie dans une chambre d'hôtel où elle sombre dans un désespoir sans fond une nuit complète. Mais le cauchemar continue lorsqu'elle apprend le lendemain matin que la mariée a disparu et qu'elle figure en tête de liste des principaux suspects.
Tout l'accuse. À commencer par cette mascarade du mariage. Gabriel affirme avoir rompu depuis des mois. Sa meilleure amie Sophie tente de la soutenir mais tombe des nues en découvrant le carnage dans son appartement. Du sang, partout. La famille de Margot est également désemparée et peu disposée à accorder du crédit à ses dires.
C'est donc seule contre tous que la jeune femme se lance vers une quête de la vérité qui sera sidérante de révélations et autres rebondissements à vous en décrocher la mâchoire.
Premier roman oblige, il faut reconnaître à cette lecture ses qualités et ses défauts d'usage. Aussi est-elle débordante d'enthousiasme, appliquée et attendrissante de gaucherie, avec une histoire abracadabrante mais au suspense soutenu.
Parmi les incohérences et autres faits tirés par les cheveux, je note une Margot qui a coutume de perdre la mémoire, de s'effondrer dans des lieux publics pour se réveiller dans des états vaseux (comble de l'horreur, elle supposera même avoir été abusée sous GHB... et là, pilule amère, sensation inconfortable et envie de secouer le cocotier).
Malgré tout, malgré le malaise ressenti, j'ai trouvé l'ensemble de la lecture hautement addictif. Sa construction est sacrément tordue et nous entraîne sur des chemins escarpés, quitte parfois à dépasser les bornes. Mais rien que pour le plaisir ressenti, pour cette excitation constante et pour le doute distillé de bout en bout, je considère ce roman réussi et très prometteur pour la suite !
Je souhaite à Louise V., auteure débutante, passionnée de faits divers et dévoreuse de romans policiers, une belle continuation. ヾ( ̄◇ ̄)ノ〃
Mosaïc / Octobre 2015
Tous nos jours parfaits, de Jennifer Niven
J'ignorais sur quelle pente glissante allait me conduire ce livre - mais je m'en méfiais, dès lors qu'il était comparé à d'autres romans à succès, réputés larmoyants (Nos étoiles contraires, Eleanor & Park). La lecture du 1er chapitre a d'ailleurs fait rugir ma sirène d'alarme - ados suicidaires, au secours ! J'ai donc décidé d'y avancer à tâtons, quitte à choisir de tout arrêter avant que ça fasse trop mal. Ralentir le processus qui consiste à glisser dans la vie des personnages, à tomber sous leur charme, à les aimer follement, tout en tentant de me prémunir contre cet attachement. Peine perdue. J'avais beau lever le nez de mon livre pour prendre une bouffée d'oxygène et me ressaisir, je me sentais irrémédiablement happée par l'histoire de Violet et Finch - deux ados en vrac, déprimés et inconsolables. Elle porte le deuil de sa sœur, lui se sent mal dans sa peau depuis toujours. Elle est choyée, chouchoutée, couvée. Lui est méprisé, hué, poussé à bout. Aucune égalité des chances. Et pourtant ces deux-là se découvrent sur un toit, se sauvent et ne se quittent plus. Pour les besoins d'un devoir scolaire, ils vont partir explorer l'état d'Indiana de la manière la plus insolite - je retiens, par ex., les caravanes recyclées en bibliothèques, plantées au milieu des champs de maïs. Et rêver. Bouquiner. Écrire. Chanter. Crier. Nager. C'est franchement beau. D'une beauté éclatante, mais illusoire. Car on perçoit très vite que le malaise de Violet et Finch est latent. C'est écrit sous chaque mot, cela imprègne tout le roman, pour vous guider vers l'inéluctable. Et fichtre, ça fait vraiment mal. « J'ignorais que ma vie serait changée à jamais parce que tu y es entré et que tu en es sorti aussi brutalement. (...) Je ne te pardonnerai jamais de m'avoir quittée ainsi. J'aimerais juste que toi, tu puisses me pardonner. Tu m'as sauvé la vie. Pourquoi je n'ai pas pu sauver la tienne ? » En plus d'être terriblement bouleversant et très émouvant, c'est un livre à fleur de peau, d'une sensibilité rare et précieuse, qui parvient autant à nous toucher qu'à nous donner le sourire. C'est injuste, mais enivrant.
Gallimard Jeunesse / Septembre 2015 ♦ Traduit par Vanessa Rubio-Barreau (All The Bright Places)
N.B : Après, ça reste personnel, mais je n'aime pas pleurer sur commande - chose qui se répand de plus en plus dans l'édition actuelle, depuis le carton de J. Green. On puise dans le vivier du poignant. Et moi, je n'aime pas le mélo ! Le roman de Jennifer Niven a pour lui d'être différent de la tendance, en se voulant simplement harmonieux et lyrique.
Le Loup de L.A., de Maggie Stiefvater
Tout le monde croit connaître l’histoire de Cole St. Clair. Le succès. La drogue. La déchéance. Puis sa disparition. Mais rares sont ceux qui connaissent son secret le plus sombre – sa capacité à se métamorphoser en loup. Isabel fait partie du cercle restreint de ceux qui savent. Il fut un temps où ils auraient même pu s’aimer. Un temps révolu. Jusqu’au jour où Cole est de retour. De retour sur la scène. De retour où le danger rôde. De retour dans la vie d’Isabel.
Comme beaucoup de lecteurs, j'avais quitté la série de Maggie Stiefvater en 2012, après avoir lu Fusion qui bouclait la saga de Sam & Grace à Mercy Falls. C'était sans me douter que, trois ans plus tard, une pointe de nostalgie surgirait sous les traits de Cole St. Clair avec ce roman racontant son histoire après les événements survenus dans le Minnesota. Notre chanteur sexy tente de renouer avec le succès et l'amour en débarquant en Californie. Là se trouve l'inoubliable Isabel Culpeper qu'il souhaite reconquérir. Celle-ci a pourtant tourné la page, mais pas verrouillé son cœur. Revoir Cole ravive autant de souvenirs que d'émotions !
Je ne cache pas avoir pédalé dans la semoule en me plongeant dans cette suite qui a tout lieu d'être tardive et impromptue. C'est toujours aussi joliment poignant, raconté avec lyrisme, mêlé à un soupçon de coquinerie, car notre couple vedette est réputé pour ses interactions volcaniques et passionnelles. Mais avouons aussi que tout ça arrive un tant soit peu après la bataille. J'aimais l'idée du flou autour de leur relation inaboutie, lui donner des mots et une forme ne me semblait pas indispensable.
Alors si on aime follement la saga, qu'on découvre à peine ou qu'on ne peut vivre sans avoir lu le moindre écrit de l'auteur, oui ce livre mérite d'être lu, dans la foulée. Et savourer pleinement cette histoire de seconde chance dans laquelle patouillent des personnages qui le valent bien (et méritent leur happy end). Maggie Stiefvater tenait aussi à se faire plaisir en évoquant l'artiste maudit et torturé, à travers Cole, et laisser exploser sa passion pour la musique qu'on retrouve dans chacun de ses livres, particulièrement dans son écriture.
Hachette jeunesse, coll. Black Moon / novembre 2014 ♦ Traduit par Camille Croqueloup (Sinner)
♪♫ I remembered that once upon a time, I wrote books with kissing scenes. I remembered that once upon a time, Cole St. Clair had been a rock star. ♫ ♪ M.S.
Bilan du mois : Avril 2015 ♪♫•*¨*•...•*¨*•♫♪
Avril printanier, Avril enchanté ...
Pour accompagner ces belles journées ensoleillées, quelques lectures :
♣ La Prophétie du Paladin, de Mark Frost
♣ Nom de code : BlackBird, d'Anna Carey
♣ Fille des cauchemars, de Kendare Blake
♣ La vérité et autres mensonges, de Sascha Arango
♣ L'homme à l'envers, de Fred Vargas
♣ Chaque soir à onze heures, de Camille Benyamina & Eddy Simon
♦♦♦
Ce mois a également été riche en séries, concerts, spectacles, sorties...
Au choix !
Découvrir une série géniale et hilarante, The Wrong ManS
Réalisée par Jim Field Smith pour la BBC
Retourner, le cœur battant, à Broadchurch (saison 2)
Créée par Chris Chibnall pour ITV
Découvrir Peter Robinson grâce à la série tv DCI Banks
S'offrir une nouvelle évasion suédoise : L'héritage empoisonné
(Tjockare än vatten) Réalisée par Erik Leijonborg
Comparer malgré soi l'œuvre littéraire et son adaptation cinématographique
Suite Française de Saul Dibb -) invitation de Gallimard / Folio (merci)
Se pâmer devant Johnny-en-vrai-à-deux-millimètres-sans-mentir !
Voir sur scène The Dø (électrique et vivifiant)
et Camelia Jordana (déception... ambiance morose)
Pénétrer dans l'Antre magique,... en chuchotant la mélodie du début à la fin,
au grand dam de ma fille ! :-D
À nous, maintenant, les vacances !
#Bleue, de Florence Hinckel
« Souviens-toi que tu es un humain, souviens-toi de la vie. »
Silas et Astrid s'aiment d'un amour passionnel. Quand la jeune fille, victime d'un accident, meurt sur le coup, le garçon sombre dans un chagrin insurmontable. Ses parents acceptent alors d'oblitérer sa douleur en suivant le protocole de CEDE (Cellule d'Éradication de la Douleur Émotionnelle). Il se réveille alors frais comme un gardon. Joyeux, pimpant. Ses souvenirs d'Astrid sont vagues. Juste une petite piqûre au cœur. Mais globalement le garçon a repris sa vie en mains et il s'estime satisfait. Quelle supercherie ! ...
Il apparaît rapidement que Silas n'a pas fait peau neuve. Quelque part, le système a bogué. Son esprit lutte contre la tentative d'éradication de ses émotions. Sans comprendre ce qui lui arrive, Silas reçoit des clips étranges, des sensations oubliées, des parfums et des odeurs lui rappelant sa dulcinée, il saisit aussitôt qu'il doit taire ses soubresauts, synonymes d'une défaillance. Dans le même temps, il découvre une face cachée d'Astrid. Une vérité à laquelle il n'était pas préparé et qui chamboule complètement ses convictions. Maladroitement, il tente de comprendre et débusquer la preuve confirmant les nouvelles révélations, et attire sans le vouloir l'attention des agents de la CEDE.
Entre suspense, action et émotion, ce roman d'anticipation se révèle prenant, intelligent et soucieux du détail. L'histoire ne conteste pas les progrès de la science mais rappelle combien la douleur est partie intégrante de notre humanité et de la vraie vie. Souffrir, c'est ressentir, c'est aimer pleinement, c'est s'attendrir et s'entraider. Dans le roman, les adolescents ont le plus tôt possible les ailes coupées pour s'épargner des atermoiements inutiles. Quel avenir s'offre alors à eux ?
Voilà une lecture fort pertinente, qui interpelle notre libre-arbitre, tout en réveillant les consciences et les émotions. Elle offre aussi la possibilité de lire une belle histoire d'amour, romantique et poignante, dans un monde où on cherche à tout prix à juguler les élans du cœur. L'intensité dramatique est au taquet, c'est bon, doux, jamais larmoyant. Et cela se lit vite. Un rendez-vous toujours opportun ! Dans le même genre, j'ai également apprécié la série Effacée de Teri Terry.
Syros, Coll. SoOn ♦ Janvier 2015
Un été avec Kim Novak, de Hakan Nesser
« L'été sera rude, a dit mon père. Autant nous préparer à ça. »
Trente ans ont passé depuis l'été de ses 14 ans, époque où Erik a passé des vacances mémorables avec son copain Edmund à Tibériade, le cabanon familial situé en bord de lac. À eux l'insouciance et l'ivresse de la liberté. Avec son frère Henry pour seul chaperon, les garçons font preuve de désinvolture et de bravade (fumer en cachette, contourner les entrées payantes, se livrer à des séances de voyeurisme, fantasmer sur la belle Eva...). Cet été-là sera pourtant marqué d'un drame qui va chambouler à jamais leur existence.
Henry, son frère aîné, vient de rompre avec sa fiancée et s'est lancé dans l'écriture d'un roman. Chaque soir, il aime sortir dans des lieux branchés, draguer la minette et la ramener au cabanon pour quelques acrobaties coquines. Les garçons ont le choc de leur vie quand ils découvrent, parmi ses conquêtes, le sosie de Kim Novak - la sublime Eva Kaludis - qu'ils avaient également croisée au collège lors d'un remplacement.
Celle-ci a pourtant déjà un petit copain, une star de handball, au tempérament jaloux et agressif. Et quand son corps est retrouvé assassiné, pas loin du lieu de leur villégiature, la police se pointe au cabanon et passe au crible l'alibi des garçons. Fin de l'été, retour à la réalité. Longtemps après, Erik continuera d'être hanté par les événements survenus au cours de cet été et de s'interroger sur les raisons du crime et l'identité du coupable.
Cette lecture, d'une intensité ciselée et prenante, est stupéfiante ! De suite, elle nous hypnotise par son charme vénéneux et son atmosphère languide, au rythme d'un été fantasque et torride. J'ai été scotchée, complètement séduite par cette écriture simple, mais pénétrante. On suit sans complexe deux garçons en plein apprentissage d'indépendance, de sexualité et de responsabilité morale, non sans maladresse et avec toute l'intrépidité de leur âge.
On partage aussi les bribes d'une histoire empreinte de non-dits et de culpabilité étouffée, une histoire tantôt drôle ou malicieuse, mais définitivement bouleversante. La lecture est dépaysante à souhait, direct au cœur de la Suède des années 60, le temps d'un été chaud et indolent. On s'évade instantanément, avant de retoucher terre avec une pointe de regret et de nostalgie.
Alain Lawrence, le lecteur pour Sixtrid, nous plonge avec subtilité dans les méandres d'un été de toutes les découvertes, entre exaltation et perplexité, et un sens du tempo tout à fait remarquable. J'ai beaucoup aimé.
Sixtrid, janvier 2015 ♦ Interprété par Alain Lawrence (durée : 6h 22) ♦ Traduit par Agneta Ségol pour les éditions du Seuil (Kim Novak badade aldrig i Genesarets sjö)
Ne lâche pas ma main, de Michel Bussi
Un couple d'amoureux sur l'île de La Réunion. Farniente, palmiers, soleil. Un cocktail parfait. Et pourtant...
Martial et son épouse Liane forment un couple parfait, amoureux, en vacances sur l'île de la Réunion. Lorsque la belle jeune femme disparaît, après s'être rendue seule dans sa chambre d'hôtel, le mari se met dans tous ses états et appelle la police. Quelques traces de sang sur le tapis, l'attitude fébrile de l'homme et le témoignage des membres du personnel poussent les enquêteurs à froncer les sourcils. Martial Bellion est trop beau pour être honnête. La capitaine Aja Purvi sent la feinte à plein nez et décide d'en faire son principal suspect. Sur ce, Martial et sa fille Josapha disparaissent de la circulation et partent se réfugier dans les entrailles de l'île, laissant sur leur passage un essaim de cadavres. La gendarmerie est en ébullition, le lecteur aussi. On ne sait clairement plus ce qu'il faut penser, entre douter et aller dans le sens indiqué par l'auteur, on suit bêtement. De toute façon, on voudrait prendre une autre route qu'on ne pourrait pas non plus. La mise en scène est ainsi faite qu'on est pris dans l'engrenage, de notre plein gré, et en toute légitimité. J'ai ainsi lu le livre d'une traite. Les chapitres défilent sous les yeux, le rythme est cadencé, soutenu à un train d'enfer, avec une intrigue redoutable. Sans compter que ce doux contraste entre le décor de rêve et l'histoire aux allures dantesques procure une sensation grisante et déstabilisante, à la fois source d'excitation et d'angoisse. Bref, c'est diaboliquement efficace. On en sort les nerfs à vif, mais émoustillé par cette plongée en Enfer.
Pocket, mai 2014 / Presses de la Cité, mars 2013
La Distance astronomique entre toi et moi, de Jennifer E. Smith
Le jour où New York plongea dans le noir complet, suite à une panne de courant généralisée, Lucy se trouvait dans l'ascenseur de son immeuble. Elle n'était pas seule dans la cabine, puisque se trouvait déjà Owen, le fils du gardien, qui porte toujours un casque sur ses oreilles, comme pour se couper du reste du monde. Pour la première fois, ce jour-là, Lucy et Owen firent connaissance.
Subtil et délicat roman que voilà ! Il vous parle d'une rencontre anodine, pas un coup de foudre, mais une histoire pas simple, pas commune et assez émouvante. Lucy et Owen vont vivre une nuit fantastique, sous l'impulsion du hasard. Comme une bulle fragile dans cette existence éthérée. Puis, Lucy part vivre de l'autre côté de l'océan, tandis que Owen accompagne son père pour un road-trip vers l'Ouest. Les dés sont jetés. Leur début de relation n'est plus à une onde sismique près.
Car ils ont également d'autres fantômes à leurs trousses. Lucy est une solitaire par dépit. Elle a grandi en tant que spectatrice désemparée de la relation fusionnelle de ses parents, se sentant de plus en plus mise à l'écart, le cordon ombilical remplacé par des cartes postales. Owen, lui, doit soutenir son père qui ne se remet pas de la perte de son épouse, dans un accident de voiture. Leur installation à New York a été un déchirement, aussi n'ont-ils pas rechigné au moment de mettre les voiles.
C'est assurément un roman chargé de tendresse et d'attention, de désœuvrement et d'infortune. J'ai eu un peu de mal de croire à une telle histoire, même si je lui reconnais toutes les qualités de justesse, frisson, sincérité et empathie. C'était adorable de suivre une relation aussi brinquebalante se construire, malgré les aléas du destin. Le couple ne manque pas de ressources, est attachant à sa façon, forcément ça interpelle.
Cette histoire bouleversante nous fait prendre conscience du poids de la famille, des abîmes qui se creusent et laissent ce sentiment d'insatisfaction dans l'estomac. C'est touchant, ça ne vous laisse pas indifférent, le reste n'est qu'anecdotique...
Hachette jeunesse, coll. Bloom, octobre 2014 ♦ traduit par Frédérique Le Boucher (The geography of you and me)
♣ Son premier roman, La probabilité statistique de l'amour au premier regard, est disponible en format poche ♣
Velvet, de Mary Hooper
Velvet travaille dans une blanchisserie, pour un salaire de misère et dans des conditions pénibles. Elle rêve naturellement d'une vie meilleure et enjolive son enfance (pourtant, peu reluisante et chargée d'un lourd passé) pour échapper à un avenir sordide. Aussi, saisit-elle sa chance lors de sa rencontre avec la célèbre Madame Savoya, réputée pour ses talents de médium, qui lui propose de devenir sa demoiselle de compagnie.
Velvet accepte sur le champ et quitte son quartier populaire de Chiswick pour Regent Park, où elle est accueillie avec effusion par le séduisant majordome, George. La jeune fille tombe sous le charme. Elle oublie ses racines, néglige ses amis d'enfance et tourne le dos à son soupirant, l'adorable Charlie. Plus rien ne compte à part cette existence idyllique, à côtoyer du beau monde, participer aux soirées occultes et autres séances de spiritisme. Velvet est littéralement fascinée.
Et c'est vrai que ce roman exerce un véritable magnétisme ! La plume de Mary Hooper est toujours aussi élégante et décrit avec réalisme la société victorienne à travers ses us et coutumes, comme la pratique controversée de la voyance et la divination, qui était très à la mode à l'époque et attirait des personnalités comme l'écrivain Arthur Conan Doyle (qu'on croise dans le livre). Mais cette immersion est vécue via l'expérience d'une héroïne naïve et facilement impressionnable, d'où cette sensation frustrante d'être témoin d'une supercherie, d'en deviner les bouts de ficelle mais de demeurer impuissant pour la tirer de sa rêverie. Aussi assiste-t-on à son naufrage avec une certaine compassion.
J'ai beaucoup aimé ce roman, charmant et précieux dans sa conduite, alléchant par son histoire, attentif à broder une vraie trame romanesque et soucieux du contexte historique. De plus, le choix d'associer les couvertures françaises aux illustrations de Pierre Mornet sont aussi un atout de séduction et un attrait stylistique majeurs !
éditions Des Grandes Personnes, septembre 2012 ♦ traduit par Fanny Ladd et Patricia Duez
Muchachas (2) de Katherine Pancol
Ce deuxième tome est entièrement consacré à la famille Cortès : la liaison tumultueuse entre Hortense et Gary, l'ambition dévorante de la jeune fille, le trouble naissant du garçon pour sa partenaire de musique, les petits soucis de Zoé, son sentimentalisme exacerbé, Joséphine en péril, son amour pour Philippe ébranlé, son amitié avec Shirley compromise... oh purée, là ça m'interpelle, j'ai envie d'en savoir plus, je fronce les sourcils, je peste, je souffle, fichtre alors ! Un peu plus loin, on a aussi droit à un aperçu de Junior, le môme a six ans et c'est toujours un extraterrestre, en gros il me saoule. Autre détail notable, il n'y a point de virée en Bourgogne, la série se recentre sur ses personnages initiaux, l'intrigue positionne ses pions, les électrons libres trouveront ou non leur place (sinon quel intérêt de les catalputer dans notre orbite ?). À ce stade, l'issue demeure pourtant la grande inconnue. Katherine Pancol sème le doute et embobine son lecteur. Et on accepte de jouer le jeu, en souriant. Ce deuxième tome sert essentiellement de transition, on y retrouve avec grand plaisir les personnages du cru, mais en soulignant aussi que le propos s'étiole sur la distance. Beaucoup de digressions, de personnages secondaires qui se dévoilent, des histoires ressassées, des réflexions qui ronronnent... Et l'ambiance générale est mystérieuse, pesante. C'est donc en toute logique qu'on plonge aussitôt dans le troisième tome !
Marie-Eve Dufresne, la lectrice pour Audiolib, interprète avec humour la saga des muchachas. Elle donne vie aux personnages, rend les fortes personnalités, comme Hortense ou Elena, admirables, mais agaçantes les petites natures que sont Zoé, sa mère ou Calypso. Chez K. Pancol, il faut briller et exulter pour susciter la convoitise... le reste, c'est “peanuts ” ! Bien entendu, l'auteur affectionne la deuxième catégorie, à mon grand dam. ;-)
Audiolib, mai 2014 ♦ texte intégral lu par Marie-Eve Dufresne (durée d'écoute : 8h 47)