16/02/15

Le Pacte des Cœurs brisés, de Sarah Ockler

Le pacte des coeurs brisés

Jude est la petite dernière de la famille Hernandez et a décidé de passer son été auprès de son père malade (Alzheimer précoce). En constatant que les souvenirs de son épopée de jeune motard ravivent la petite flamme éteinte, Jude décide de contacter un mécano pour remettre la “bête” en état. Entre en scène Emilio Vargas, en débardeur, bandana, muscles bandants, front perlé de sueur, fossettes aux joues et sourire canaille. Caramba, les jambes de notre demoiselle flageolent.

Et pourtant, elle se doit de faire une croix sur ce spécimen alarmant de séduction. Entre les Vargas et les Hernandez, c'est une longue histoire de « cœurs brisés » avec serment de sang pour interdire les filles de fréquenter un mâle de cette famille maudite. Jude ne veut pas décevoir ses sœurs, ni rompre une parole sacrée. Tant pis si ce garçon lui fait battre le cœur et perdre la tête... elle doit se consacrer à son père, qui part en vrille et s'accroche du mieux qu'il peut à ses rares réminiscences.

L'histoire est incroyablement touchante et bouleversante, certifiée sans pathos. Ce qu'on nous raconte est juste une jolie chronique d'un été, le dernier de son enfance (Jude a 17 ans et part à l'université en septembre). Voir son père aussi démuni pèse lourd sur ses choix et sa façon de vivre ses quelques mois de liberté. Elle a coupé les ponts avec ses amis, tente de faire bonne figure auprès de ses aînées, cherche des solutions miraculeuses pour fuir l'inéluctable : le déclin du padre.

J'ai beaucoup aimé ce roman, écrit avec naturel, spontanéité, tendresse et espièglerie. La plume de Sarah Ockler fait des merveilles et communique une fraîcheur combinée à une vraie joie de vivre. Me suis régalée. La romance aussi met du baume au cœur, c'est mignon et attendrissant, avec un Emilio absolument craquant et irrésistible. C'est de la guimauve, sucrée et moelleuse. On en mangerait.

On trouve aussi une belle unité familiale, avec une fratrie de sœurs, autour du père malade et de la petite dernière qui rêve de s'émanciper mais tremble à l'idée de quitter le cocon douillet de l'enfance. C'est simple et attachant, de plus ce roman possède un charme fou. ♥

La Martinière J. , septembre 2014 ♦ traduit par Frédérique Fraisse (The Book of Broken Hearts)


07/05/14

Lycée out, de Claire Loup

lycée out

Dans le but de se venger de la bassesse de son petit ami, qui a rompu par carte postale pour mieux filer le grand amour avec une autre fille, Emma devient la Napoléonienne, une guerrière de l'amour, avec pour seules armes sa plume, son esprit et son humour sarcastique. Elle dégaine vite et bien, pirate le journal du lycée, gagne en popularité et obtient gain de cause en assommant ses ennemis.

Forte de cette victoire, Emma pourrait regagner ses pénates la tête haute. Au lieu de quoi, elle a pris goût au jeu et flirte en ligne avec un certain Don Juan, le bien-nommé. Notre séducteur est obsédé par la mystérieuse lycéenne, qui est entrée en mutinerie contre la direction. Il est séduit, troublé, veut en savoir plus. Mais le problème, c'est que ces deux-là ont beau se faire du charme et séduire avec les mots, ils n'en demeurent pas moins deux handicapés sociaux dans la vraie vie.

C'est ce qu'on va effectivement découvrir au fil de l'intrigue, qui est nettement moins craquante sans ses artifices primesautiers. Les personnages apparaissent lourds, peu finauds, grossiers, aux humeurs changeantes, bref de vrais adolescents avec leur poussée d'hormones et en conflit avec les adultes. J'ai soupiré de déception, terriblement frustrée de devoir composer avec cette donnée inaliénable. J'avais dépassé les limites du supportable, et je regrettais amèrement les débuts virevoltants.

On retiendra donc de cette lecture une brillante entrée en matière, une adolescente revêche et orgueilleuse, ses réparties cinglantes, ses batailles menées avec beaucoup d'intelligence (et un brin de perfidie), la savoureuse partie de marivaudage et ce qu'on devine être une fresque insolite de notre jeunesse dorée et pinailleuse. Dommage que l'ensemble se soit révélé bancal.

Plon jeunesse, septembre 2010

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09/04/14

Les Suprêmes, par Edward Kelsey Moore

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Totale surprise encore une fois, ce roman s'est offert à moi avec sa couverture craquante et la promesse d'un rendez-vous à mi-chemin entre La couleur des sentiments (pour la communauté noire) et les Beignets de tomates vertes (pour la bande de copines inséparables et attachantes). Sans me douter du reste, je me faisais une joie d'aller au-devant de cette découverte. Et effectivement, j'ai adoré l'histoire de ces trois femmes extraordinaires.

Odette, Clarice et Barbara Jean ont grandi dans le même quartier populaire de Plainview (Indiana) dans les années 60 et ont très tôt instauré des petits rituels sacrés, comme le rendez-vous dominical chez Big Earl, à leur table attitrée, près de la baie vitrée. C'est tout aussi naturellement qu'elles ont été surnommées les Suprêmes, en hommage au groupe de Diana Ross, puisqu'elles sont apparues comme des filles intouchables, mais fascinantes.

Trois filles aux personnalités dissemblables mais complémentaires, et aux choix de vie souvent discutables, mais jamais discutés. « Entre Suprêmes, nous nous traitions avec beaucoup de délicatesse. Nous fermions les yeux sur les défauts des autres et faisions preuve de prévenance, même quand cela n'était pas mérité. » Aussi, lorsque Odette, le pilier du groupe, découvre qu'elle est malade, ses amies aussi décident de revoir leur existence soit en virant un mari trop volage ou en cessant de noyer un vieux chagrin d'amour dans l'alcool (de la vodka bue dans une petite tasse en porcelaine, avec un exemplaire de la Bible ouvert sur les genoux !). 

J'ai ressenti un formidable élan de tendresse, de sympathie et d'affection pour les Suprêmes et leur petit monde de maris, de voisins, de cancans, de sermons, de blagues, de fantômes, de légendes, de coups durs, de grandes joies, de secrets et d'envies... Un joli univers, bouillonnant de vie et d'humanité. On sourit beaucoup, parfois on a le cœur gros, mais c'est juste un trop-plein d'amour. Cela déborde de partout, c'est touchant, léger, doux et attendrissant. Difficile à résumer, mais cette lecture est un remède miracle contre les petites baisses de régime et autres sensations vagabondes.

Actes Sud, avril 2014 ♦ traduit par Cloé Tralci, avec la collaboration d'Emmanuelle et de Philippe Aronson

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