13/05/09

L'histoire de Clara ~ Vincent Cuvellier

Illustrations de Charles Dutertre

histoire_de_claraClara est un bébé juif né pendant la guerre. Quelques mots qui annoncent la couleur...
La particularité de cette histoire est d'être composée de plusieurs textes qui donnent voix à différents narrateurs, créant ainsi une ambiance nouvelle, chaque histoire s'influençant d'une couleur unique, d'une langue qui n'est jamais la même, entre le ton radoteur d'une vieille dame, la parole espiègle d'une bonne soeur gourmande, l'argot paysan d'un bonhomme dans sa ferme, le babillage insensé d'une sorcière folle etc.
On commence l'histoire par une berceuse, il s'agit de la maman de Clara, elle se cache avec sa famille, grapille quelques heures de bonheur avant l'arrestation. L'enfant est sauvé in extremis, et de fil en aiguille le bébé dans son couffin sera confié entre de bonnes mains. Objectif commun : la protéger des griffes du Mal.
L'histoire rebondit sans cesse, le destin de Clara est sur la corde raide, mais chaque rencontre vaut son instant d'amour, de gloire, de tendresse, de détresse, d'incompréhension, de révolte... Le passage avec le soldat allemand, par exemple, est intéressant (et romanesque) puisque l'homme répète sans cesse « Je croyais pas que je venais faire la guerre à des enfants ». La boucle est bouclée lorsque les dernières notes de l'histoire retentissent sur la berceuse entendue au début...
Avec simplicité, Vincent Cuvellier parvient à nous raconter la guerre, l'injustice et l'ignominie. Pour cela, pas besoin de sortir les violons pour faire pleurer dans les chaumières, il suffit d'un sourire enchanteur et des yeux de bébé qui posent sur le monde un regard rempli d'inquiétude, de reproche et de colère. L'histoire se veut également drôle, et pleine d'espoir. Sans dévoiler la fin, elle nous offre un joli tableau de douceur et de silence. C'est une très belle histoire, un ouvrage qui salue la complicité entre Vincent Cuvellier et l'illustrateur Charles Dutertre, rappellez-vous de La première fois que je suis née ...

Gallimard jeunesse, coll. Giboulées, 2009  - 65 pages  -  13,50€

Je n'ai pas d'idée pour l'âge à conseiller, dans mon cas je l'ai lu à voix haute à ma fille, elle a neuf ans, et je pensais qu'elle était encore trop jeune. Je me suis totalement trompée, cette histoire a su la toucher et lui parler, même si elle est encore ignorante sur la thématique de la déportation des juifs. (J'ai trouvé dommage, par exemple, qu'en classe sa maîtresse d'école n'explique pas pourquoi le 8 mai était un jour férié, que signifiait l'armistice, et à quoi cette date correspondait, sans tomber dans le didactique, mais au moins pour informer cette jeune génération.) Il y a beaucoup de texte dans ce livre, avec parfois un vocabulaire ou un ton qui demandent un accompagnement. En quelque sorte l'histoire se présente comme une leçon sans prétention qui pourra interpeller l'enfant, l'inviter à réfléchir et - pourquoi pas ? - poser quelques questions. Je me suis rendue pour la première fois au Mémorial de Caen avec ma fille qui avait 7 ans. C'était un peu jeune. J'ai tenté de lui expliquer la guerre, à travers l'histoire de mes grands-parents, parce qu'il y a des choses incroyables à dire, mais c'est encore neuf et innocent dans sa petite tête... Mais je pense qu'il est bon de proposer des ouvrages sur la guerre et la Shoah, il y a différentes façons d'en parler et c'est un devoir de mémoire. Surtout.

A lire :   l'explication par Vincent Cuvellier lui-même sur la naissance de ce livre 


22/04/09

La ferme de grand-père ~ Patricia MacLachlan

ferme_de_grandpere

Oubliez la famille Ingals et faites désormais connaissance avec les Witting, grâce à cette série commencée avec Sarah la pas belle (publié en 2004) et qui se boucle avec ce cinquième tome.

C'est donc l'histoire d'une famille de pionniers dans la grande prairie américaine, un père veuf vivait seul avec ses deux enfants, grâce à une petite annonce il a rencontré Sarah, la famille s'est agrandie, les petits ont quitté le nid, dans ce dernier tome, par exemple, Anna se marie. C'est l'occasion de faire une grande fête et de réunir tous les oisillons éparpillés.

J'ai trouvé dommage de ne pas avoir respecté le titre original, Grandfather's dance, parce que cela symbolise un passage très important dans l'histoire. Bonpa est réapparu dans la vie des Witting en cours de route (cf. Le Journal de Caleb, tome 3), depuis il occupe une place cruciale, surtout pour le petit Jack, le dernier né. Une vraie complicité s'est créée entre eux.
Quand l'enfant fait pour la première fois une crise de colère, seul Bonpa arrive à le calmer en le grondant sévèrement. L'enfant se tait. Il a compris. Mais grand-père se sent mal d'avoir haussé le ton, alors pour s'excuser, sous un rayon de lune, il danse une gigue exprès pour son petit-fils. Sa façon à lui de dire pardon.

Bref, afin d'éviter de vous raconter toute l'histoire, je vous invite à la découvrir car c'est un bijou de tendresse, c'est même très émouvant, drôle aussi. C'est une série attendrissante, qui mérite d'être davantage connue et conseillée aux enfants dès 8 ans.

Illustrations de Quentin Blake

Folio Cadet, 2009 - 105 pages - 7,90€
traduit de l'anglais (USA) par Anne Krief

La série comporte cinq titres :

  1. L'histoire de Sarah la pas belle
  2. Sarah la pas belle se marie
  3. Le journal de Caleb
  4. Un cadeau pour Cassie
  5. La ferme de grand-père

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26/03/09

L'office des vivants ~ Claudie Gallay

office_des_vivantsIl règne dans cette maison en haut de la montagne une atmosphère de vide - vide affectif, vide matériel, vide intellectuel. Le Père est bourru, il travaille quand ça lui chante, s'occupe des bêtes et de la terre, mais ne ramène pas souvent le pain pour nourrir les bouches. La Mère le maudit de l'avoir engrossée une troisième fois, elle se porte mal et doit rester alitée.
Marc et Simone sont deux gosses que rien ne bouleverse, ils roulent leur bosse, jouent dans la cour, ne se lavent pas souvent, ont des poux dans les cheveux, parfois ils se rendent à l'école, quand le temps le permet, la route est longue et le climat sec et glacial.
Pas loin, il y a aussi le grand-père qui passe son temps à sucer ses pastilles et la grand-mère Coche qui est avare comme un rat. Pas facile de lui soutirer une tranche de pain nappée de confiture !
Tout se mérite dans cette vie étriquée.
Un jour, un bébé est déposé sur le pas de la porte. C'est la petite de Mado, qui était fille de ferme et qui a fait perdre la tête au Père. Un matin elle est partie avec les économies de la famille, elle n'est plus jamais revenue. Elle a déposé un cadeau quelques mois après, et c'est comme ça que Manue a fait son entrée.
La gamine n'est pas du tout désirée dans ce foyer. Seul Marc s'est épris de l'enfant, il veille sur elle, coiffe sa chevelure de sauvageonne et s'est juré de la protéger pour l'emmener loin de cette misère quand ils seront grands.

A lire comme ça, on pourrait croire que ce roman est poisseux, écoeurant, limite insoutenable. Mais non ! Claudie Gallay sait soutenir notre regard, elle raconte son histoire sans ambages, son écriture âpre et dépourvue d'artifices donne lieu à un miracle. Elle évoque une misère affective, des personnages cabossés et laids, un environnement qui écarte la tendresse, et encore... l'amour tente de percer, de façon brutale, mal embouchée ou impuissante. Car ce roman reste gris, froid, implacable.
On dit de cette famille qu'elle a le mauvais oeil, et qu'elle récolte ce qu'elle sème. Et pourtant, en tant que lecteur, on se sent incapable de ressentir le moindre accablement, la plus petite compassion ou l'idée de jugement. On n'est pas épargné pour autant, ça cogne, ça fait mal mais c'est si bien écrit qu'on ne décroche pas.
Il s'agit du tout premier roman de Claudie Gallay, publié aux éditions du Rouergue en 2001. Il était indisponible depuis longtemps, cela me trottait de le lire, surtout que Laure m'avait donné envie ... la patience est enfin récompensée : sortie en poche, chez Babel. A ne pas louper !
Et j'aime beaucoup la couverture ! En vrai, elle est encore plus bouleversante.

Babel, 2009 - 224 pages - 7,50€

l'avis de Pagesàpages

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22/02/09

Loin - En poche ! #21

Loin, Victoria Lancelotta

9782264046666R1Un soir dans un bar, Martha rencontre Edward avec qui elle dit oui à tout et tout de suite. Toutefois Martha fausse le jeu : elle boit, elle le suit sans protester et ne prétend finalement pas être elle-même. Ne rien dire du fond de ses pensées. Aussi, quand elle quitte Baltimore pour une petite ville en Floride, elle part sans dire au revoir. Accord tacite (selon elle). Quelques temps après, Martha apprend qu'Edward sort avec Carly, sa soeur cadette. Cette nouvelle réveille des fêlures, datant depuis l'enfance et l'adolescence, et qui pourraient expliquer ces fuites en avant. Martha, enfin seule, repue de cet isolement, veut démêler le vrai du faux, comprendre ce qui cloche chez elle.
A force d'affirmer qu'elle n'attendait rien de lui, qu'elle avait coutume de dire trop facilement oui à tout, qu'elle était constamment insatisfaite, Martha doit admettre qu'une mécanique secrète est en panne. Pourquoi les autres, et pas elle ? Pourquoi les mêmes qui ont trente ans se marient, vivent en lotissement dans une banlieue cossue, mais toujours pas elle ? Il faut dire, aussi, qu'il n'y a pas ce désir, non aucun désir chez elle, d'y parvenir un tant soit peu.
Pour comprendre davantage Martha, il faut donc aller plus "Loin". C'est ce que suggère l'auteur Victoria Lancelotta dans ce premier roman serré, exigeant et riche de subtilités. Il y a aussi une part du désir chez cette jeune femme, juste suggérée pour ne pas le décrire en termes graveleux, comme pourrait le supposer son comportement. Martha est étrange et inquiétante. Mais c'est tout de même une histoire mélancolique et amère qu'elle raconte, avec un froid cynisme et un humour presque vain. Elle nous le sert sur un plateau, c'est comme ça, pas autrement, acceptez-le ou non. Moi j'ai été scotchée.
Victoria Lancelotta est aussi l'auteur d'un recueil de nouvelles, En ce bas monde (publié chez Phébus et 10-18), acclamé par la critique, qui n'hésite pas à la comparer à Raymond Carver ou encore à Kaye Gibbons. C'est un auteur américain que j'apprécie beaucoup ! Une vraie découverte.

(Roman lu en décembre 2005)

Phébus, 2004 /  10-18, 2009 - 288 pages - 7,90€
traduit de l'anglais (USA) par Bruno Boudard

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16/02/09

Mille soleils splendides - Khaled Hosseini

« Mariam n'ayant jamais porté de burqa, Rachid dut l'aider à enfiler la sienne. La partie rembourrée au sommet, lourde et un peu étroite, lui enserrait le crâne comme un étau, et le fait de voir à travers le grillage lui parut très étrange. Elle s'entraîna à marcher avec dans sa chambre mais, comme elle était déstabilisée par la perte de sa vision périphérique et que l'étoffe se collait contre sa bouche, l'empêchant de respirer, elle ne cessait de trébucher, se prenant les pieds dans l'ourlet de la robe. »

51jN9vLghDL__SS500_Dans l'Afghanistan des années 70 à nos jours, deux femmes nous font partager leurs destinées en un mélange de passion, d'émotion et de désarroi. Mariam vit seule avec sa mère, répudiée par sa famille pour avoir été la maîtresse de son employé, le grand et riche Jalil. La petite fille idolâtre son papa, qui lui rend visite une fois par semaine, et refuse de donner foi aux propos acrimonieux de sa mère, rendue jalouse et haineuse par le temps. Pour son quinzième anniversaire, Mariam émet une demande : se rendre au cinéma, dans la ville de son père. Mais le rendez-vous tourne au cauchemar et aura des conséquences désastreuses sur la vie de la jeune fille.

Laila a grandi à Kaboul dans un foyer aimant et stable, son père est un intellectuel, il enseigne la poésie, et sa mère a un caractère difficile mais supportable. Elle a surtout peur pour ses fils, partis au combat (nous sommes dans les années 80) et va d'ailleurs perdre la raison en apprenant leur mort. Laila a heureusement son meilleur ami Tariq pour l'aider à surmonter le quotidien morose à la maison, jusqu'au jour où celui-ci annonce qu'il doit quitter le pays avec ses parents. Un monde s'écroule, noyé sous les bombardements.

Mariam et Laila vont se croiser, se rencontrer, vivre ensemble. Elles vont partager le toit du même homme, Rachid, qui est un monstre de violence et de misogynie. Le roman raconte leur quotidien, semblable à celui de milliers de femmes afghanes, dans un pays ravagé par les conflits. La place des femmes, elle, n'a fait que dégringoler dans l'estime des hommes, c'est parfois très révoltant à lire à travers des yeux d'occidentale. Roman prenant et poignant, il est écrit pour être lu d'une traite et pour accrocher le lecteur sensible à ces deux destinées de femmes fortes et remarquables. Jusqu'au bout on a le coeur un peu lourd, peut-être la faute à un sentimentalisme trop poussé. En tout cas, le but est atteint : roman dévoré et fort apprécié !

10/18 - 410 pages - 8,60€
traduit de l'américain par Valérie Bourgeois

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20/01/09

« je viens pour tuer vos animaux de compagnie et arracher avec les dents vos mains droites »

 

Les aventures de Djerik - Natalia Noussinova

41KLmqb1ncL__SS500_En fait, ce roman est une surprise. Pour la collection neuf, il est bien épais (mais presque 40 pages en fin de roman sont dédiées au lexique). Ce n'est pas que ce soit trop compliqué, c'est juste que, d'après l'auteur, tout un pan de la vie racontée dans ce livre est devenu incompréhensible. C'est une histoire très simple, à vrai dire. Cela commence par l'envie d'un chien, mais cela s'étend à raconter une jeunesse soviétique. Natalia a sept ans, elle vit avec ses parents à Moscou, son père est cinéaste, sa mère est belle comme un coeur, elle a une soeur, Tania, et des grands-parents remarquables, le grand-père est un vieux bolchévique et la grand-mère cuisine des beignets de viande et de chou à faire pâlir d'envie. Au début, les parents de Natalia sont formellement opposés à accueillir un chien dans leur appartement, puis la cousine leur amène un fox-terrier noir, très sale et avec l'oreille en sang. Il vient de tenir tête à une bande de bergers allemands féroces, et il n'a pas bronché. Djerik fait donc son entrée chez les Noussinov. Avant de se montrer le fier toutou intelligent, il est plutôt déprimé, il ne mange pas, il reste dans son coin. On explique aux petites que c'est normal, c'est une brave bête, ce chien est un prince frappé par un mauvais sort et il veut rester fidèle à son premier amour.

Le roman se déroule ainsi bien gentiment, avec beaucoup de tendresse et d'amour. C'est l'époque de Brejnev, il y a toujours des aperçus de la révolution mais la famille Noussinov s'en tire plutôt pas mal dans l'histoire. C'est d'ailleurs un beau portrait de famille que propose ce livre, avec pour decorum le climat suspicieux et facilement délateur du pays. Il y a des commissions pour autoriser à voyager à l'étranger, des cancanières qui n'aiment pas les chiens ni les juifs, il y a des propriétaires de datcha sans vergogne qui promettent de conduire deux canetons vers les pays chauds en train, et des voisins au bord des larmes devant leur poule blessée à cause de Djerik. Ce chien, qui est aussi le héros du livre, va vivre (et nous faire vivre) de belles péripéties, comme celle d'être une star de cinéma. Et c'est ainsi qu'on passe un très bon moment de lecture, avec un petit air d'autrefois, mais surtout entretenu par un chaleureux sentiment de bonheur, d'innocence et d'affection.
C'est bien comme tout. Cela dépayse.

Ecole des loisirs, coll. neuf - 2008 - 195 pages / 9,50€
traduit du russe par Katia Flouest-Sell
Illustration de couverture : Gwen le Gac

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Ivan le terrible - Anne Fine

414fO2v2jzL__SS500_Tout commence parce que Boris parle russe. Un nouvel élève vient d'arriver à l'école St Edmund - Ivan, son air renfrogné, ses saluts à la taille et son amabilité façon : "Salutations à vous tous, pauvres vers tremblants". Boris est mortifié, il ne veut absolument pas traduire les propos odieux de ce garçon, alors il triche. Il édulcore, il améliore, il arrondit les angles. Toutefois Ivan est vraiment infect et pousse le bouchon de plus en plus loin. La patience de Boris a-t-elle des limites ? Faut-il continuer de jouer le jeu, d'excuser Ivan et donc de passer sous silence ses méchancetés, au risque d'être un peu complice ?

Tout à fait bon enfant, ce roman est un genre de comédie à l'humour subversif, qui plaira davantage aux plus jeunes, sans pour autant leur assurer qu'ils pourront comprendre toutes les troublantes motivations d'Ivan le terrible. La fin est une sorte de pied-de-nez à cette vaste mascarade. On y trouve son compte, ou pas du tout. C'est selon. Mais franchement je préfère de loin les aventures caustiques du chat assassin.
Petit roman plaisant, voilà tout.

Ecole des loisirs, coll. neuf, 2008 - 80 pages / 8€
traduit de l'anglais par Nadia Butaud
Illustration de couverture : Soledad Bravi

l'avis de Mélanie (Book in)

 

Et je découvre le nouveau morceau de U2, Get on your boots !
C'est un peu tôt pour juger, mais je sais que cela ne m'accroche pas plus que ça.
Toutefois je suis fan devant l'éternel, et forcément j'ai précommandé l'album qui sort le 2 mars:
No line on the horizon.

01/10/08

On s'y fera - Zoyâ Pirzâd

Nouvelle opération menée par le Livre de Poche, avec en proposition : On s'y fera, de Zoyâ Pirzâd (que j'avais déjà lu lors de sa sortie). Je vous encourage à saisir cette opportunité, car c'est l'occasion d'aller au-devant d'un auteur, d'un univers et ce serait dommage de passer à côté.

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L'histoire se passe en Iran. Nous suivons Arezou Sarem, 41 ans, divorcée et mère d'une fille de 19 ans, Ayeh. Elle est responsable d'une agence immobilière, qu'elle dirige avec son amie Shirine, laquelle va jouer l'entremetteuse en lui faisant rencontrer un client, lors d'une banale visite d'une maison. Zardjou est un homme sûr de lui, qui va réussir à décrocher une signature et un rendez-vous, au grand dam d'Arezou. Elle ne se sent pas prête pour vivre une histoire sentimentale, elle n'a pas follement envie de se changer les idées. Elle a déjà fort à faire entre sa fille, têtue et soupe au lait, et sa mère, qu'on surnomme la Princesse, bref elle se sent prise en sandwich par ces deux ogresses. Où pourrait-elle trouver de la place pour un homme ?

"On s'y fera" est un roman entier, au nom des femmes. On y découvre des destins croisés, des désirs d'émancipation et ce, malgré les liens de la famille qui étranglent et vous lient pieds et poings. La pression est tapie dans l'ombre, on admet une femme indépendante, qui travaille, divorcée, élevant seule sa fille, et finalement c'est au coeur du foyer qu'on ne pardonne pas cet anti-conformisme. On comprend alors combien il sera difficile pour Arezou de faire accepter l'intrusion de Zardjou dans ce schéma complexe.
A elle, donc, d'invoquer le génie de la lampe pour s'offrir une chance de prendre son avenir à bras le corps, et de réussir à braver celles qui font de sa vie une prison dorée. Car après tout, les rencontres aidant, Arezou s'aperçoit qu'elle n'est pas si mal lotie et que d'autres femmes sont dix fois plus infortunées qu'elle.
Le roman est moins doux et poétique que son recueil de nouvelles, Comme tous les après-midi, toutefois cela reste une lecture grisante, tendre et désespérante. Un léger souffle de révolution fait battre le coeur des femmes iraniennes et ce n'est que plaisir à entendre !

Livre de Poche, septembre 2008 - 316 pages - 6,50€  

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