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Chez Clarabel
flammarion
17 avril 2009

Mausolée ~ Rouja Lazarova

« Ils avaient peur des fugueurs, de ces gens qui, au risque de leur vie, profitaient d'une pause-pipi du bus traversant l'Autriche pour courir se réfugier dans une ambassade occidentale, qui franchissaient les frontières en rampant dans des marécages et parfois y restaient, criblés de balles ; de ces gens dont la seule évasion désespérée témoignait de ce qu'était le régime. »

mausolee

Bulgarie, 1944. Peter, musicien de jazz, est convoqué au ministère de la guerre et disparaît soudainement. Sa compagne, Gaby, enceinte de neuf mois, est désespérée. Elle accouche d'une fille, Rada, déménage grâce à son frère, qui est un membre influent du parti, et se console dans les bras de Sacho le Violon, un ami du couple. A son tour, celui-ci disparaît en février 1964.

C'est un roman qui combine à merveille le sulfureux mélange de douceur et de force. Un roman qui raconte l'histoire d'hommes et de femmes dans la Bulgarie de 1944 à nos jours. Ce livre témoigne aussi du brutal changement de décor subi comme une douche froide lorsque le communisme s'est invité. Et c'est une population transie de peur, retranchée derrière ses barricades, impuissante et dégoûtée, paralysée dans ses envies, que l'on rencontre. Ils sont devenus des funambules du socialisme, car « c'est sur ce fil ténu de la subversion contenue, de la provocation s'arrêtant juste avant le danger, que beaucoup d'entre nous avons passé notre existence ».

Le livre évoque l'hypocrisie du régime, l'ambiguité d'être ou de ne pas être du parti, et donc de pouvoir tracer sa route selon ses aspirations. La population est vite prise entre deux feux, les intellectuels sont dénigrés, les voyages à l'étranger totalement proscrits, s'offrir une voiture devient un privilège rare et le fruit d'une longue tractation boursière avec l'Etat qui peut s'étaler sur une décennie, et j'en passe. Ce sont les petites vies de Gaby, sa fille Rada et sa petite-fille Milena qu'on suit particulièrement, et avec elles une montée de rebellion, de souffrance. A tour de rôle, elles sont nouées par la peur et en même temps elles transpirent de haine pour le régime qui dicte leur pays. Elles ne peuvent que subir leur triste sort, ce qui décuple leur colère.

Il y a une vraie histoire dans ce livre, qui adopte une juste dosage entre le didactique et le romanesque. Car ce n'est ni un document ni un roman historique, c'est un peu des deux, et plus encore. On s'attache très vite aux personnages, à nos trois générations de femmes, en plus des hommes de leur vie ou de leur belle-mère, oncle, cousin et camarade d'école. Il y a une évidence flagrante de l'énorme frustration qui sommeille en eux, sur le fait de ne pouvoir nourrir le moindre désir ou sur la mise en berne de l'éducation sexuelle. Nous sommes dans les années 80 et Milena est terrorisée de découvrir pour la première fois un film porno ! C'est une gamine maladroite et mal à l'aise dans son corps, au même âge sa mère avait été traumatisée par sa visite (imposée) du mausolée. Il s'agit en fait de l'édifice construit à Sofia pour y recueillir le corps embaumé du père de la révolution, Georgi Dimitrov. Un exemple de lubie héritée des dirigeants russes. Donc, lors de cette visite, Rada avait été effrayée par la vision des lèvres bleues du défunt exposé aux yeux de tous (on la comprend !).

Le roman évoque le climat de peur, mais ce serait injuste de le réduire à ce sentiment car il est vraiment passionnant à lire. On y découvre aussi de l'humour, de la tendresse, du chagrin, des élans amoureux, de la cocasserie, de la bêtise et d'autres états d'âme qui balisent une vie simple et ordinaire. Personnellement je me suis plongée dans cette lecture avec délectation, apprécié l'élégance de la plume de Rouja Lazarova (qui écrit en français dans le texte, chapeau !). J'ai découvert ce livre grâce au prix de la révélation littéraire auFeminin.com et je suis enchantée par leur sélection car elle a su véritablement mettre en lumière des VRAIES REVELATIONS LITTERAIRES ! Pour l'instant je ne suis pas déçue !

Flammarion, 2009 - 332 pages - 19€

Lu pour le prix de la révélation littéraire auFeminin.com   logo   
 

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9 mars 2009

Chasseur noir - Michel Honaker

chasseur_noirA New York, dans une casse automobile, un journaliste surprend un étrange rendez-vous entre des individus qui pratiquent de la magie noire. Le lendemain, Craig Haskell est retrouvé mort au volant de son véhicule. Les inspecteurs Trevor Meredith et Bob Single sont sur l'enquête, laquelle les conduit au 1 Montague Street où réside Ebezener Graymes, un professeur de démonologie et traditions anciennes à l'université de Columbia. Ce poste est en fait une couverture, car l'homme en macfarlane et au chapeau à large bord, aussi inquiétant par son look que par ses connaissances intellectuelles, est un Chasseur Noir. Il est en ville pour reprendre le rôle de régulateur, celui qui fait le ménage et la loi parmi les forces occultes.
Car c'est bien de sorcellerie, de magie noire et de démons dont il est question ! Des meurtres sont commis de façon anormalement rapprochée, le maire Mike Donaldson a été frappé d'un mal soudain, son épouse accuse le trop célèbre Philozoar Reles de l'avoir envoûté pour une affaire de gros sous.
Plus qu'un simple roman noir, fascinant et fantastique, c'est aussi une enquête criminelle, bien ficelée, où les combats contre les Blêmes, pauvres créatures démoniaques, rivalisent avec les courses à perdre haleine dans une circulation bouchée. « New York est une ville dangereuse. Seul le diable y danse, et il a de grands pieds... »
Je ne sais pas si d'autres livres sont prévus à la suite de celui-ci, personnellement je l'espère car le personnage d'Ebenezer Graymes est singulier, superbement fascinant. L'ambiance occulte mériterait d'être encore plus poussée, plus triturée pour offrir un roman encore plus épais, plus étourdissant, où les méninges des policiers font communion avec la dangereuse lame de l'épée du Chasseur Noir pour faire la loi dans cette cité où la sorcellerie hante le monde quotidien, sans que personne s'en aperçoive.
Très excitant !

Flammarion, coll. Tribal - 250 pages - 8€ 

18 septembre 2008

New Wave - Ariel Kenig & Gaël Morel

 

 

Ce livre est né d'un projet cinématographique : New Wave, téléfilm écrit et réalisé par Gaël Morel pour Arte. L'idée était simple : partir du scénario pour en faire un roman, une forme d'adaptation à l'envers. Et c'est Ariel Kenig qui fut approché pour participer à ce projet et rendre "une copie" singulière, personnelle et aussi indépendante du film. - A lire en préface, pour s'en convaincre.

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L'histoire est celle d'une adolescence en province, dans les années 80. Eric entre en 3ème au collège, il n'est plus dans la classe de son ami Thomas mais fait la rencontre de Romain, un garçon hors du commun. Indépendant, sûr de lui, il affiche un look punk, c'est également un passionné de musique, il compose et chante dans son coin, bref cette amitié nouvelle pourrait donner des ailes à Eric. Lui-même a une histoire familiale assez lourde, il n'est pas heureux chez lui, et seul son frère aîné trouve grâce à ses yeux. C'est ce qui le lie à Romain, cette vénération pour le grand frère, qui est, dans les deux cas, engagé dans l'armée.

L'ambiance du roman est assez morose, proche du spleen. Cette histoire aboutira d'ailleurs à une tragédie, laquelle se révélera retentissante à la toute dernière ligne du roman. En refermant ce livre, on reste coi. Aussitôt on reprend les bonnes feuilles en mettant le doigt sur les détails qui nous avaient échappés. Et là, plus de doute possible.

On ne traite plus en surface d'une énième chronique d'amitié entre adolescents désespérés mais on aborde un vrai récit dramatique, avec son lot de cache-misère et ses malheurs en sourdine. C'est absolument flippant, et notamment spectaculaire dans les portraits des familles. Anna, la mère de Romain, est grandiose. Elle aime d'amour fou son rejeton, elle est entière, envahissante, curieuse et menaçante...

"Les mains dans l'évier, elle reconnut l'énormité du temps qu'elle consacrait, aveugle, à ce que d'autres mères appelaient effort, mais qui ne représentait à ses yeux qu'un moyen de prouver la totalité de son amour, de résister à l'ennui ainsi qu'à la déchéance qu'implique dans de nombreux cas l'inactivité, ou encore de prolonger cette jeunesse qui ne lui appartenait plus, cet heureux sentiment d'une maternité pleine que l'ambition de Romain, forcément, blesserait un jour." 

 

New Wave reste un projet écrit à quatre mains, un peu trop cerclé sans doute. A l'instant où le lecteur décolle, le soufflé retombe aussitôt car la dernière page se tourne. C'est juste un peu dommage, il aurait fallu étirer ce climat éthéré avant de nous lâcher brutalement dans le vide. Cela participe au choc et à la fascination mais ça provoque implicitement une légère frustration, ce sentiment agaçant qu'il manque un petit quelque chose...

A noter : une play-list est disponible en fin de roman si vous souhaitez rembobiner la musique du film (que de la new wave, bien sûr !) ...

Achetez New Wave !

Flammarion, août 2008 - 190 pages - 16€

Diffusion du téléfilm le 19 septembre sur Arte :

http://www.leblogtvnews.com/article-22100152.html

22 juin 2007

L'amour comme par hasard - Eva Rice

amour_comme_par_hasardAngleterre, 1954. Un après-midi à Londres, Penelope Wallace rencontre Charlotte Ferris à l'arrêt de bus. C'est une vraie tornade, affublée d'un manteau vert. Ni une ni deux, Charlotte convie Penelope à prendre un taxi avec elle pour se rendre chez sa tante Clare avaler thé et scones moelleux, nappés de confiture. Penelope la suit, sans réfléchir. Elle va rencontrer Harry, le fils de la fameuse tante Clare. Le jeune homme est mélancolique, il se morfond d'avoir perdu son amoureuse, une riche américaine du nom de Marina Hamilton, qui vient d'annoncer ses fiançailles avec un prétendant beaucoup plus aisé que le pauvre Harry (qui aspire à devenir magicien). Il n'a pas dit son dernier mot et élabore un plan de prestidigitation pour duper son ancienne petite amie en affichant la candide Penelope à son bras, lors de la réception des fiançailles de la Miss Hamilton ! 

Penelope Wallace, 18 ans, est une rêveuse et une romantique, elle est mordue du chanteur Johnnie Ray, et aime feuilletter les magazines féminins. Elle vit avec sa mère veuve depuis la fin de la guerre et Inigo, son frère passionné de musique pop américaine, dans la grande demeure familiale, Milton Magna, une somptueuse maison qui tombe en ruines car les Wallace sont endettés.   

Grand best-seller dans son pays, le roman de l'anglaise Eva Rice est un monument de lecture romanesque, mais écrit avec beaucoup d'esprit et d'humour. C'est plus enlevé que de la chick-lit, mais je pense que l'histoire de "L'amour comme par hasard" puise dans le même registre : des personnages attachants, une ambiance délicieusement kitsch et des histoires d'amour qui s'amorcent, se brisent avant de se redonner une chance. L'impression de lecture reste revigorante et confondante de félicité. On lit ce livre avec grand plaisir, tel un petit bonheur de lecture sans prétention ! 

Flammarion - 380 pages - Traduit de l'anglais par Martine Leroy-Battistelli. Mars 2007.

  • Si le coeur vous dit de cliquer sur ce lien, vous découvrirez les premières pages du roman en anglais ! ... :)

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