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Chez Clarabel
25 mars 2008

Le pianiste de Trieste - Aliette Armel

pianiste_de_triesteCela commence par une rupture, une douleur qui frappe sans prévenir la narratrice, Anne Viseux. Amoureuse d'un chanteur italien, Nicola Bassano, cette femme est abandonnée la veille de son voyage pour Tel-Aviv car celui-ci lui demande de ne pas quitter Trieste pour le suivre (il va y accomplir une mission importante, avec un ami poète). Déboussolée, elle choisit de partir en Bretagne, dans la maison de son enfance, quittée dix-neuf ans plus tôt. Cette maison est un legs de son père, le célèbre pianiste Guido Turatti, où il avait trouvé refuge après son départ de l'Italie en 1946. L'homme s'était également illustré pour avoir refusé, dès 1940, de jouer en public pendant la guerre.

Mais l'histoire n'est pas simple, et le passé familial semble rattraper notre héroïne. Aujourd'hui, Anne est sollicitée pour retrouver la page disparue d'une partition unique écrite par son père Guido, peu avant sa mort. Fouiller dans les vestiges d'un temps révolu préoccupe la narratrice, soudainement confrontée à des secrets, à raviver une enfance dans ce village breton où tout semble différent, et pourtant peuplé des mêmes visages d'antan. Il est indiscutable que les mystères ont tous été emportés dans les tombes, du moins le pense-t-elle par lassitude. Car Anne est harassée par les turpitudes qui l'assaillent, elle se sent agressée, totalement empêtrée dans un écheveau d'intrigues qui ne la concernent pas, ou plus.

Au fur et à mesure que l'histoire progresse, l'ombre du père se faufile pour gagner les feux de la rampe, et permettre ainsi aux voiles du doute de se soulever. Le récit est construit avec minutie, il cerne la personnalité de la narratrice ; cependant un détail me chiffonne à son sujet, parce qu'elle accuse cinquante-quatre ans mais en paraît tellement moins d'après ses états d'âme ou ce qu'elle laisse paraître. Ce n'est que mon ressenti, peut-être me suis-je induite en erreur toute seule, inconsciemment. Je n'ai pas d'autres défauts à trouver sur ce livre, que j'ai trouvé simplement sensible et attachant. Cela raconte avec des mots justes et touchants le parcours d'une femme privée de ses racines, qui aujourd'hui revient sur les traces de son père et tente de tisser la trame de son passé avec rage et désespoir. D'un charme fou, indolent, ce roman sait nous transporter dans des endroits et à des époques différents. Sincèrement envoûtant...

Editions Le Passage - 266 pages - 17€

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21 mars 2008

Made in China - JM Erre

made_in_chinaToussaint Legoupil a été adopté il y a 25 ans à Shengdu en Chine, il a grandi à Croquefigue-en-Provence mais a pris la décision de partir pour retrouver ses racines. Le garçon est intrigué d'être natif de Chine alors qu'il est noir de peau ! Ses parents, Mado et Léon, sont opposés à ce projet, tentent de le retenir, font un ramdan du tonnerre dans la petite ville, ameutent amis et proches pour ficeler le garçon dans le giron familial. Las, Toussaint parvient à s'échapper, mais traîne à ses basques son amie d'enfance, Mimi Labrousse, également accompagnée de sa pipistrelle terroriste !

C'est le grand départ pour Toussaint Legoupil, qui est persuadé de découvrir qui il est vraiment dans le pays du Soleil-Levant. A peine sur place, il est aussitôt embarqué par M. Tao, un entrepreneur chinois, excellent francophone. Il devient son guide, son traducteur, son initiateur à des plaisirs exotiques peu recommandables (et avouables !). Parallèlement, l'enquête pour retrouver ses parents piétine un peu, puis connaît un sursaut de rebondissements, mais ces derniers vont s'accompagner d'une malédiction persistante qui plongerait notre Toussaint Legoupil dans une sacrée panade. Là où il passe, un crime s'inscrit dans son sillage ! La police est à ses trousses, mais la quête des origines n'est pas terminée - loin de là. 

Cocasse ou grotesque, la frontière est mince pour déterminer ce roman qui peut, à tout moment, basculer dans les deux tendances. Or, souvent en craignant le pire, le meilleur arrive au galop. Je me suis surprise à sourire à plusieurs occasions en dévorant ce livre - oui ! on le dévore tellement il est clair, limpide, vivifiant à découvrir !  De plus, c'est une histoire qui se présente comme un jeu de pistes, dans lequel l'auteur glisse des indications et des notes renvoyant à telle ou telle page, baladant le lecteur dans un univers joyeux et enchanteur. En un mot, c'est ludique ! L'histoire est burlesque, truffée d'exagérations et d'invraisemblances. Mais franchement, c'est vraiment drôle ! Imaginez, aussi, une espèce de secte qui porte aux nues Saint Cloclo, le vrai ... « - Grand Maître Jean-Marius !
- Oui, fidèle compagnon du MINOU ?
- Je voulais vous dire que les sirènes du phare d'Alexandrie chantent encore la même mélodie.
- C'est très bien... Saint Cloclo est fier de toi. Mais tu devrais peut-être prendre un peu de repos, non ?
- J'ai plus d'appétit qu'un barracuda !
- Je vois...
- Je boirais tout le Nil si tu n'me retiens pas !
- D'accord... Voilà ce qu'on va faire : tu vas prononcer un voeu de silence pour quelques mois. ça nous fera des vacances. »   
... et qui voit en Toussaint Legoupil l'Elu, soit celui qui va opérer le Grand Renversement, c'est-à-dire l'heure où chaque fidèle trouvera sa vraie place dans la réalité qui lui correspond. Grosse magouille à l'horizon, pour ne pas en dire plus !

Au début je pensais franchement que ça n'allait pas décoller plus loin, que j'allais vite me lasser de tant de loufoquerie. Et puis, c'est scotchant, ça vous colle aux doigts et ça vous change radicalement les idées. Envie de bonne humeur, de légèreté, d'anti-stress et d'une grande rasade de dérision, lisez Made in China ! L'auteur JM Erre confirme son gros potentiel déjà perçu dans Prenez soin du chien, son premier roman.

Buchet Chastel - 258 pages - 18 €

Illustration de couverture : Anne Bénoliel-Defréville

18 mars 2008

La traversée vénitienne - Isabelle Yhuel

traversee_venitienneAu départ de Venise, un paquebot appareille pour une croisière musicale d'une semaine en Méditerranée. Welcome aboard ! Préparez-vous à une ambiance cosy, préalablement recommandée, pour bercer les états d'âme, exacerber les passions, alimenter les battements de coeur, favoriser les confidences des passagers. Et qui mieux qu'un public féminin pourrait nous offrir un tel panel d'effervescence !?   A bord, donc, on y croise une soprano, Lucie, femme épanouie et amoureuse d'un homme plus jeune qu'elle, mère d'une adolescente, Manon. Lucie accuse cinquante ans, qu'elle assume pleinement, même si elle admet la peau molle, seul indicateur du temps qui passe, et savoure totalement de connaître enfin l'orgasme avec son compagnon, Roland. Ce couple donne une photographie de ce que deviendra Ida et Paul, quinze ans plus tard. Epousée en secondes noces, Ida s'est fondue dans la vie de son artiste de mari, faisant sienne son existence, adoptant Claire, sa fille de 11 ans. Elle revit à travers celle-ci une maternité neuve et différente, au-delà de ce qu'elle a su créer avec sa propre fille, Marianne, qu'elle a eue avec Denis, son ex. Puis il y a Florence, la pianiste, mariée à Albert, ils sont les heureux parents d'un petit garçon intrépide et imprudent, Malo. Couple harmonieux, ils offrent une vision idyllique de la vie à deux. 

Roman contemplatif, intimiste et musical, La traversée vénitienne est la possibilité pour toutes ces femmes, toutes générations confondues, de frotter leur image, leurs attentes et leurs désirs au miroir que renvoie le regard des autres. C'est l'éternelle rengaine. Elles vont prendre plaisir à se mettre en danger, tester les limites de leur confort, sentir la chance qui coulent entre leurs doigts, mais elles sortiront toutes de cette croisière avec le petit truc en plus ou en moins, bref ce qui n'existait pas avant, et qui s'est révélé pendant. C'est une croisière méditative, en somme, où on ne rencontre pas que de riches bourgeoises oisives...   

Prenez Ida, par exemple, le pilier essentiel de la narration. Elle vit sa vie en puisant ses sources d'après des livres lus, des musiques entendues et emprunte au peintre Nicolas de Staël que le monde n'est qu'un odieux théâtre où quelques gens confortablement assis regardent en souriant souffrir les autres.  Ida a effectivement développé une mémoire des musiques, des livres, de certains tableaux, parce qu'ils sont son père, sa mère, sa famille, son assise. Bref, Ida est la plus observatrice de tous, spectatrice amoureuse des répétitions de la troupe des musiciens, éblouie par son mari, dévouée, délicate, sensible aux rencontres, à la musique de Schubert qu'on lui fait découvrir, troublée par la drague d'un bel Italien...

Elle admire Lucie, contemple Florence, se prend d'affection pour Maud, qui lui révèle sa part de féminité cachée. Et ainsi, elle va avancer d'un pas rapide et puissant, (...) allegro vivace, puis un peu plus lentement, puis de nouveau elle accélère, presto, prestissimo, de nouveau piu lento, jusqu'à s'arrêter, se figer. Cette traversée vénitienne va générer une détermination farouche, parce que durant une semaine, Ida va beaucoup réfléchir, être spectatrice, ressentir de nouvelles passions, être émerveillée par cette personne qui sommeillait au fond d'elle et qui se réveille enfin, à 35 ans. C'est, ainsi et également, un roman sur l'éclosion. Les adolescentes, par ailleurs, vont franchir des caps interdits, pour devenir les futures jeunes femmes de demain, par un premier baiser ou une première fois dans le lit d'un homme. Ce côté langoureux, nonchalant est vraiment prégnant dans le roman, lequel parfois s'enchaîne à dégager un sentiment rébarbatif, à cause de cette langueur. Et puis, difficile de s'y retrouver avec tous ces personnages, dans les premières pages. Malgré tout, le roman sait toucher, émouvoir et faire écho sur plusieurs points, car c'est un roman qui parle aux femmes, de toute façon !

JC Lattès - 280 pages - 18 €

11 mars 2008

Ker Violette - Karine Fougeray

Ker_VioletteUne jeune femme de 36 ans arrive dans un village breton, elle recherche son cheval. Elle est très mince, a de gros seins, elle est blonde, avant de virer au jaune. Dans le premier bar venu, elle commande un kir-champagne et rencontre Félix, un pêcheur devenu artiste peintre. Elle tombe dans ses bras, ivre morte, et débarque chez Violette, une septuagénaire propriétaire d'une maison d'hôtes, les Albatros.

Clara doit absolument retrouver son cheval. Pour comprendre pourquoi, il faut faire le chemin en arrière et grandir dans un foyer où brillait l'amour, entre la radieuse de mère et le père qui s'absentait en mer. La naissance de Clara est venue. Clara comme une eau claire. Clara comme la clarté de son bonheur. Suivie par l'arrivée de Clarence.

Longtemps Clara a cru être libre, légère, butinant d'un point à l'autre, d'homme en homme, de trois petits tours et puis s'en vont. Tous ont craqué en la voyant : un sourire, un s'il te plaît, des yeux noirs qui scrutent le fond de l'autre. Mais Clara se sent morte à l'intérieur, alourdie par ses fantômes, pressée de rejoindre son cheval pour reprendre le cours de sa vie, pour revivre. Tout bonnement. Un cheval ?! pense-t-on. Alors je vous vois venir, mais non chassez de votre esprit les images de Robert Redford, le monsieur n'a pas sa place ici. Pas dans cette histoire qui se contruit comme un jeu de lego, petit bout par petit bout. Un peu compliquée l'histoire que tu cherches à nous vendre, rétorquez-vous. Ah mais non.

Que je vous dise... Ceci est un roman qui parle d'amour, mais vraiment un amour mirifique, hors du commun, qui dure depuis des lustres. C'est un feeling, une émotion pure et instantanée, un électrochoc, le genre qui file une décharge sitôt qu'on se frôle... C'est l'histoire d'une tristesse, d'un abandon, d'un deuil, d'un chagrin. C'est aussi un énorme silence, un poids qui dure et qui s'encroûte avec les années. C'est une rencontre éblouissante, deux âmes qui s'unissent, une communion, un déchirement. Dans ce livre, aussi, on respire l'air de la mer, on boit beaucoup de champagne, on sent l'eau de cologne de Guerlain, une odeur surannée de violette. La mer, encore, on la maudit, on l'admire, on court après, on s'y baigne nue. On la traite de tricheuse, de menteuse, de mante religieuse. Mais la mer n'est pas tout. La mer, ou la mère ?...

Je ne vous cache pas que Ker Violette offre un bonheur de lecture instantané. Première page ouverte, plouf ! c'est l'éponge. Les mots nous collent aux doigts, les lignes s'inscrivent sur notre peau, les personnages sortent du livre pour nous offrir une bolée de cidre et nous partons de suite dans leurs aventures. On s'attachera aussitôt à Clara, la jolie petite fille qui cherche son cheval ; on voudra se pendre au cou de Félix et on cherchera compulsivement dans le bottin si la pension de Violette existe pour de vrai ! ... Ce sont trois personnages jetés sur le tapis vert, les dés sont joués, à eux de tenir les paris.

Faut-il vous préciser ? Ker Violette sait aussi préserver ses secrets. Pour en savoir plus, lisez le livre !!!!

Editions Delphine Montalant - 250 pages - 18 €

Un gros, gros, gros merci à Karine !!! Merci pour cette nouvelle bouffée d'oxygène, après le goût des galettes, miam le champagne, une Clara plus vraie que nature, et des larmes, des rires, un coeur qui palpite plus fort sur certaines pages... C'était bon ! Et déjà, ils me manquent tous... ils me manquent aussi les pages 251, 252, 253, 254, 255, etc.

Et merci pour les graines de violettes !

2 mars 2008

Peines perdues - Emmanuelle Peslerbe

peines_perduesUn homme atteint de la maladie d'Alzheimer est retrouvé mort chez lui. C'est sa fille Ghislaine qui découvre le corps. Le commissaire Jean Brisson conclue à un assassinat et met le doigt sur l'appartement fermé à double tour. La liste des suspects se réduit, et très vite il porte son intérêt sur les deux soeurs Boudard. Trop d'amnésie, trop d'ambiguité dans les emplois du temps, trop de propreté sur les lieux du crime... Le commissaire Brisson a décidé de serrer la vis, mais comment faire craquer ces deux carpes complètement muettes ?
Après une entrée en matière très conforme au genre du polar, l'ambiance qui était judicieusement sombre et oppressante finit par tomber dans le glauque. Et ça s'enfonce un peu plus, vers une issue complètement prévisible. Bien dommage d'avoir lâché la bride en cours de route ! Ce roman s'annonçait assez intriguant.

Editions du Rouergue, coll. La Brune - 116 pages. 12 €

Du même auteur : Un bras dedans, un bras dehors

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29 février 2008

Les fantômes du soir - Sébastien Doubinsky

fantomes_du_soirAvec une jolie couverture et une quatrième alléchante, me voilà plongée dans ce livre... pour lequel je m'enchante prématurément ! L'histoire est celle d'un écrivain de 52 ans, dont le 12ème roman figure sur la liste finale du Goncourt. Enfin les lauriers de la gloire ? Cela commence par un passage dans une émission pour la télévision, et c'est le fiasco. Le type s'écroule de son siège, en direct, impossible de sauver la face, de moucher l'animateur arrogant, qui exulte par la même occasion d'obtenir une séquence aussi pendable que dérisoire ! ... La nuit s'enfonce dans l'invraisemblable pour Paul Rubinstein, car en rentrant dans son appartement, il découvre Henry Miller, Lawrence Durrell et Blaise Cendrars assis dans son salon. Illusion d'optique, contre-coup d'un choc violent ou sombre conséquence d'une alcoolémie avancée ?
Parce que le roman va se résumer à cette errance inqualifiable, dans un Paris tantôt austère, tantôt envoûtant, c'est la sinistre complainte d'un écrivain à qui le succès sourit soudain, mais qui refuse de saisir sa chance. Pas avare de confidences, l'homme va nous raconter quelques jours de son incroyable fantasme littéraire. Un chant d'amour ironique à la littérature, qui guérit de tous les maux - selon l'éditeur.
Hélas, j'attendais plus ! Ce livre possède un charme certain, mais qui va s'oublier avec le temps...

Le Cherche Midi - 176 pages - 13 €

28 février 2008

Les Constellations du hasard - Valérie Boronad

constellations_hasardUn aspirant écrivain débarque à New York avec pour seul bagage son sac marin et une sacoche contenant son manuscrit. Son rêve américain est de rencontrer Paul Auster pour lui remettre son roman et tous ses espoirs d'être édité. Hélas, le garçon se fait voler ses papiers et manque devenir fou. Il erre dans la rue, rencontre un chien puis un vieil aveugle avec qui il fait le deal de mettre sur papier le livre qui court dans sa tête en échange du gîte et du couvert. Très vite, Luc prend en pleine figure toute la beauté de la prose du vieillard, de son parcours et de son histoire. Il s'appelle Alejandro Asturias, c'est un poète qui a quitté l'Europe au début des années 40, pour retrouver son grand amour prénommé Cécilia.

Luc ambitionne toujours de rencontrer Paul Auster et téléphone auprès des attachées de presse pour obtenir un entretien, puis met en place une lecture publique de l'oeuvre d'Alejandro, sous le prétendu parrainage de l'écrivain, et sans consultation du vieil homme. Celui-ci s'en moque, il sent ses jours toucher à leurs fins, pour seul conseil d'auteur à auteur il suggère à Luc d'apprendre à nager dans l'océan. Et Luc s'y emploie avec application !

C'est un rêve américain raconté avec toute la maladresse et l'espoir insensé d'un jeune homme plongé en état de grâce. Il a un mois pour boucler son pari, fait à lui-même. Peu à peu, on ressent toute l'influence de l'oeuvre de Paul Auster, « son Maître », dans cette histoire, mais sans toucher le génie de l'auteur. La copie est aisée, l'imitation impossible. Ce n'est pas une sentence implacable, c'est un constat et un encouragement. Car on ne peut écarter de son esprit les images de Mr Vertigo ou du jeune M.S. Fogg dans Moon Palace pour suivre l'étrange exploration de Luc Kervalec qui le mène sur la voie d'une quête intérieure. Il y a dans ce livre de Valérie Boronad tous les ingrédients austeriens, c'était d'ailleurs un projet audacieux, mais pas totalement abouti. La fin, par exemple, peut être excellente, mais carrément illusoire.

« Parce que drogué je l'étais, je dois bien l'avouer. J'étais complètement shooté, par elle pour commencer, par la longueur de ses jambes et son coeur à vif posé comme un fer rouge sur son visage, par le génie de son grand-père, par l'océan qui m'emportait, par l'écriture qui me faisait plonger tout au fond de moi-même en compagnie d'un poisson, descendant en apnée dans l'inconnu de son sillage. »

Belfond - 184 pages - 17 €

Merci Mathilde W. pour l'envoi !

23 février 2008

La femme la plus riche du Yorkshire - Fouad Laroui

femme_la_plus_richeJ'ai aimé la couverture, j'ai aimé le titre et j'ai éludé le sujet. Bien m'en a pris ? Je ne sais pas, sauf qu'il me faut avouer avoir eu recours à un coup d'oeil à la 4ème de couverture car j'ai été un peu décontenancée au début !
C'est donc l'histoire d'un chercheur d'origine marocaine qui arrive à l'université d'York pour étudier l'espèce locale avec soin et attention. Armé d'un petit carnet étanche, l'homme décide d'établir son poste d'observation depuis un pub typiquement anglais où il va y rencontrer la femme la plus riche du Yorkshire, alias Cordelia, ou Corry pour les intimes - et Cruella, in petto. Cette femme est excentrique, arrogante, autoritaire et manipulatrice, elle va agripper notre narrateur et lui promettre des confidences les plus extraordinaires pour alimenter ses recherches. Se livre alors un tête-à-tête saugrenu et espiègle, où l'un tente de résister à l'autre, qui livre avec outrecuidance un étalage de débaûches et de démesures.
C'est éreintant ! Autant le reconnaître. Je me suis égarée dans ce labyrinthe, un peu frileuse à l'humour sarcastique. Mais quiconque recherche une comédie acerbe sur l'Angleterre, les riches, l'ethnologie, les alcooliques et la rouerie saura y trouver largement son compte ! La fin est mauvaise, mais subtile et hilarante !
A bon entendeur, salut !

Julliard - 158 pages  /  16 €

22 février 2008

Voyager léger - Julien Bouissoux

voyager_legerTristan Poque écrit toujours, mais sous plusieurs pseudonymes, il a revu ses prétentions à la baisse, au diable la littérature, aujourd'hui il écrit des romans de gare, des polars sombres et austères, sans réel cachet. Pour arrondir ses fins de mois, il accepte aussi d'être lecteur pour une maison d'édition et gobe les manuscrits insignifiants qui, d'abord, boostent son énergie, et puis finissent par le laminer.
Son dernier livre peine à voir le bout du tunnel, sans cesse son intrigue dérape, ses personnages deviennent flous. Au gré des rencontres et des questions bassement métaphysiques qu'entretient Tristan, son Cocktail Mortel boit l'eau.
Heureusement, il y a l'ami Poupou, compagnon de plume, de boisson et d'infortune. Lui aussi connaît le syndrome de la page blanche, au lieu de se miner il décide de se complaire dans l'observation des plantes fougères. Tous deux, paressant mollement sur le balcon du nouvel appartement de Poupou, devisent peu sagement et échafaudent un plan drôle et inventif.
Vous ignorez qui est Tristan Poque ? Alors, vous n'avez jamais lu le roman de Julien Bouissoux, La chute du sac en plastique. Dommage pour vous. Mais quelle chance de pouvoir faire cette rencontre prochainement ! Plaisant et désabusé, le ton de Julien Bouissoux saura vous toucher et vous séduire, en plus de son personnage attachant qu'est Tristan Poque. Héros peu romantique des Temps Modernes, il traîne son spleen et sa cruelle lucidité sous notre oeil charitable. Il incarne à lui tout seul le jeune auteur peu ambitieux, ou forcé de ne plus l'être, qui se trouve au creux de la vague et du dilemme qu'est le manque d'inspiration. Les passages avec l'autre écrivain en manque de veine donnent aussi lieu à des échanges cocasses, un peu tordus, mais qui sont le reflet de cette littérature contemporaine, légère et peu affectée. Ici, les personnages s'ennuient mais ne rasent pas le lecteur. A prendre à la légère, comme le titre !

Editions de l'Olivier - 177 pages - 16 € 

16 février 2008

Alaska - Eugène Nicole

alaskaLe narrateur quitte Paris suite à une déception amoureuse et se réfugie en Alaska où il vient de décrocher un poste de lecteur à l'université de Fairbanks pendant neuf mois. C'est le début d'une étourdissante plongée dans un univers unique et fascinant (la nuit éternelle, les aurores boréales, la poudre neigeuse), où vivent les dernières survivantes du peuple eyak.
Le narrateur avait pensé utiliser cette fuite comme un refuge, il découvrira bien vite que ce sera impossible de se tenir à l'écart de ses collègues de l'université, pour la plupart de jeunes hippies américains (nous sommes dans les années 60). Ce sont des extravagants, des rapporteurs de légendes et d'anecdoctes invraisemblables (la jeune fille perdue dans la sonate, qui joue à perdre la raison, Colette l'impossible, qui pansera ses plaies du coeur, ou Noémie, l'ancienne lectrice de français, partie en escapade amoureuse avec un trappeur). Ce sont des instants sur le vif, des clichés spontanés, entre lesquels on retrouve la parole du narrateur, son espoir (ou désespoir) de penser à celle qui l'a quitté. Un jour, une lettre arrivera pour lui annoncer qu'elle rentre. Serait-ce aussi l'autre fin d'un voyage ?
Ce roman est un tout : un journal de bord, une comédie burlesque, un récit incoercible, un appel à la diversité. C'est très étrange de rapporter son sentiment sur ce livre, car l'affinité avec le lecteur ne tient qu'à un fil. Je pense aussi que c'est la plume d'Eugène Nicole qui fera toute la différence, on aime ou pas, mais cela exerce un pouvoir de séduction incontournable. A ceci s'ajoute le cadre de l'Alaska, ses légendes et ses coutumes. C'est une lecture foncièrement envoûtante, que j'ai aimée, et pourtant j'ai beaucoup de mal à conseiller.
Il suffit juste d'avoir la bonne approche, d'aimer l'incipit et, ainsi de suite, on ne lève plus son nez du livre, ou on abandonne.

Editions de l'Olivier - 245 pages.  20.00 €

A lire, un très très bon billet ici !

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