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Chez Clarabel
28 janvier 2010

Fantômes d'hiver ~ Kate Mosse

JC Lattès, 2010 - 220 pages - 19€
traduit de l'anglais par Valérie Rosier

fantomes_dhiverCe dernier roman de Kate Mosse est tout bonnement très différent des précédents, Labyrinthe et Sépulcre. Ce n'est pas un roman policier dans le sens strict du terme, c'est une histoire empreinte de mystère, se passant quelques années après la première guerre, dans un village perdu dans le sud-ouest de la France. Nous suivons un jeune anglais, Freddie Watson, qui n'a jamais accepté la mort de son frère aîné, porté disparu pendant la guerre. Il s'est longtemps senti coupable d'être en vie, ses parents ne lui ont plus prêté le moindre intérêt depuis la terrible annonce et Freddie a plongé dans une grave dépression. Il débarque en France pour suivre les traces de George, son frère, pour comprendre et pour trouver des explications. A la place, il se perd dans les bois et arrive dans un village appelé Néans. Quel nom ! Serait-ce prémonitoire ? Freddie y rencontre un charmant couple d'aubergistes, se sent comme un coq en pâte et assiste à une fête locale où il fera la connaissance de Fabrissa. Auprès d'elle, Freddie confie ses tourments, il n'arrête plus de parler et il se sent déchargé d'un poids. Ce n'est plus le même homme, et c'est grâce à Fabrissa s'il a su faire ce grand pas en avant. A son tour, la jeune femme va lui confier son secret. Et là, l'histoire devient pesante, incroyable, mystique. On pénètre dans la quatrième dimension, si, si ! En tant que lecteur, je ne savais plus où se trouvaient les limites du vrai, du faux, du rêve, de la fantaisie, du fantasme, du vécu.
Ce n'est pas un roman bien épais, il pourrait même se lire très vite mais ce qu'on se prend dans la figure limite d'avoir un gros appétit et il est préférable de reposer le livre de temps en temps, pour souffler, pour réfléchir. Ce qui est paradoxal, car l'histoire est tellement nébuleuse qu'on souhaite connaître le fin mot de l'intrigue. Freddie n'est pas sorti indemne de son aventure, le lecteur non plus, et c'est auprès d'un libraire toulousain qu'il confie sa rencontre du troisième type. Ce sont des allusions trop fantastiques, je le sais, ce roman n'est pas du tout de la science-fiction, mais cela pourrait se rapprocher du roman gothique, sombre, mystérieux et froid.
Je ne suis pas sûre d'avoir follement aimé, mais j'ai été interloquée par cette rencontre.
Bizarre, très bizarre. De quoi filer des frissons dans le dos.

 

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27 janvier 2010

Mr. Zero ~ Patricia Wentworth

10/18 Grands Détectives, 2009 - 280 pages - 7,90€
traduit de l'anglais par Eric Moreau

Mr_Zero_de_Patricia_WentworthPrenez une ravissante idiote, Sylvia Colesborough, qui joue de l'argent en dépit de l'interdiction de son époux. Elle perd la somme de £500, s'en mord les doigts et s'acoquine avec un dénommé Mr. Zero qui est un odieux maître-chanteur. Forcée de dérober des documents importants, qui concernent la sécurité intérieure, notre tête de linotte n'a vraiment pas une once de jugeotte pour dire stop et avouer la vérité à son mari. A la place, elle court pleurnicher dans les bras de sa cousine, Gay Hardwicke, moins fortunée mais plus sensée qu'elle. Ceci dit, ce n'est pas bien compliqué de se révéler plus perspicace. Quelle idiote, cette Sylvia Colesborough ! Naïve, charmante, délicieuse et délicate, mais cruche et bête à manger du foin. Elle en devient une caricature exaspérante ! C'est une honte pour la gente féminine. Gay Hardwicke aussi est agacée par sa cousine, elle refuse de tremper un doigt dans ses affaires mais les événements vont se précipiter, et son ami, Algy Somers, va malgré lui devenir le suspect idéal.
C'est un fantastique jeu de quiproquos que nous offre ce roman, et c'est ce qui le rend attachant et captivant, car j'avais très vite deviné le coupable. L'intérêt a donc été ailleurs, mais ce fut tout aussi appréciable. J'ai purement savouré ce roman de Patricia Wentworth, c'est un bon cru de 1938, il n'est pas du tout poussiéreux, il est au contraire chic et raffiné. C'est dans cette catégorie de lecture qu'on peut trouver des phrases ampoulées qu'on détesterait ailleurs, mais qui ici prennent une élégance folle et séduisante.

Sylvia émit un profond soupir, se tamponna les yeux à l'aide d'un mouchoir mauve et ouvrit son sac de suède orné d'une initiale en diamants.
J'adore ! Il y a une foule de petits détails pour décrire cette bonne société anglaise, les dialogues sont divins, les personnages attachants, les toilettes vaporeuses. Les inspecteurs fournissent un travail minutieux qui consiste à beaucoup discuter, à cuisiner les témoins en buvant du thé, ce ne sont pas des hommes de terrain, l'enquête n'est pas franchement décoiffante mais ça fait aussi partie du charme de ce type de roman policier. C'est une lecture parfaitement délectable, qui permet de se poser, de savourer et de revoir ses classiques. C'est bon de renouer avec ses premières amours !!!

 

25 janvier 2010

Le temps de la vengeance - R.N. Morris

10/18 Grands Détectives, 2010 - 440 pages - 8,90€
traduit de l'anglais par Bernard Cucchi

temps_de_la_vengeanceCe deuxième titre de la série des Mystères de Saint-Pétersbourg confirme tout le bien que j'avais pensé du premier, L'âme détournée. Nous retrouvons le magistrat Porphiri Pétrovich, assisté pour la première fois de Pavel Pavlovich Virginsky, un personnage déjà croisé dans le précédent volume dans des circonstances plus ou moins houleuses. Tandis que la ville étouffe sous une chaleur insoutenable, le canal empeste et les mouches envahissent les bureaux, le magistrat est appelé sur une horrible affaire de double homicide. Une mère et son fils ont été empoisonnés avec des chocolats, la scène est particulièrement dégoûtante et la douleur infligée aux victimes ne nous est d'ailleurs pas épargnée. Le mari est logiquement suspecté, il s'agit d'un docteur Martin Meyer, un éminent expert en toxicologie. Inutile de s'emballer car l'affaire n'est pas encore pesée, le fait qu'un colonel ait été assassiné dans son appartemment puis un alcoolique tombe raide dans la rue vient relancer cette étrange affaire, qui baigne dans les scènes de carnage et qui révèle les pires vicissitudes de l'âme humaine.
Nous étions déjà vaccinés avec L'âme détournée, mais nous renouvellons l'expérience avec ce Temps de la vengeance. C'est sombre et poisseux, particulièrement peu amène pour décrire l'humanité dans ce qu'il y a de plus sordide et abject. Et pourtant l'histoire n'est jamais totalement glauque ou répugnante, en dépit de la description très poussée des crimes et des morts violentes. L'ambiance de cette série policière est tout simplement captivante, servie par des personnages  aux particularités bien définies - Porphiri est un détective débonnaire, qui prend le temps de réfléchir au lieu d'agir, son nouvel assistant Virginsky s'enflamme avec ses grandes théories révolutionnaires, vite calmées par son supérieur, lequel rappelle le devoir de réserve et de service au tsar. Le duo fonctionne plutôt bien, révélant certaines facettes d'humour et de légèreté chez Porphiri, ce qui n'est pas pour déplaire au lecteur, car cela soulage la tension ressentie tout au long de la lecture. La plongée dans cette Russie du 19° siècle est âpre, le contraste entre les classes est vivement traité, les prémices de la révolution commencent donc à apparaître, mais ceci ne relègue jamais au second plan la trame principale, qui est bien évidemment l'intrigue policière, car tout est bien ficelé, inquiétant et seulement mis à jour dans les dernières pages !
En bref, cela reste une folie vengeresse parfaitement bluffante et brillante à découvrir.

 

23 janvier 2010

Ce que j'ai vu et pourquoi j'ai menti ~ Judy Blundell

Gallimard jeunesse, 2010 - 288 pages - 12,00€
traduit par Cécile Dutheil de la Rochère

Être adulte, était-ce ça ? S'obliger à faire ce qu'on n'avait aucune envie de faire, avec un simple haussement d'épaules ?

ce_que_jai_vuNew York, 1947. Evie vit dans le Queens avec sa mère et Joe. Lorsque ce dernier reçoit un coup de fil insistant, il décide de partir en vacances en Floride. A Palm Beach, ville fantôme où seul un petit hôtel minable est ouvert, les Spooner vont lier connaissance avec un autre couple, les Grayson, et un ancien soldat qui a connu Joe en Europe, Peter Coleridge. Evie tombe immédiatement amoureuse de lui, elle a quinze ans, elle est naïve et a toujours vécu dans un cocon, elle voue une vraie fascination pour sa mère, Bev, qui est belle comme Lana Turner. A côté, Evie se sent comme le vilain petit canard, quelconque, transparent jusqu'à ce que Peter l'aborde, l'invite à danser, lui sourit, propose de la balader dans sa voiture et l'embrasse.

Les semaines passent sous un soleil accablant. Les Spooner n'en peuvent plus mais sont comme électrisés par l'ambiance. Ils repoussent leur départ, Evie s'en moque car elle ne veut pas se séparer de Peter. Et pourtant, le tableau des vacances cache aussi des zones de turbulence - les Grayson joueraient un double jeu, Joe est de plus en plus nerveux, Bev s'embellit sous le soleil et s'absente chaque jour pour apprendre le golf, Peter est terriblement beau, séduisant, charmeur mais c'est une bombe à retardement.

Sous ce climat lourd et pesant, la tension monte, donne du suspense au récit, lequel va très mal se terminer, mais le lecteur s'en rend compte tout seul, au fur et à mesure que l'histoire avance, l'amertume gagne du terrain, les masques tombent, certaines révélations apparaissent, les confiances se perdent, et au milieu Evie se prend la plus grande claque de sa vie. Son passage à l'âge adulte résonnera comme une lente tombée du haut d'un ravin, tant elle comprendra qu'autour d'elle il n'y a que duperie, mensonge et trahison. C'est ahurissant, et le décor de l'après-guerre apporte aussi son lot en dramaturgie et autres horreurs à dévoiler, c'est franchement flippant et hallucinant. La voix d'Evie devient encore plus poignante et magnifique, on partage longtemps cette dualité qui naît en elle, en même temps que la tragédie va fragiliser son petit monde.

C'est un roman à lire d'une traite, écrit dans un style proche des films noirs d'après-guerre, classique et envoûtant, aussi amer qu'un chocolat. Une atmosphère à laquelle j'ai été très sensible.

8 janvier 2010

Vérité et feuilles de thé ~ Alexander McCall Smith

mon dernier achat cd : zee avi, une demoiselle de vingt-trois ans, un talent énorme ... so sweet !

Côté lecture, voici pour répondre à votre besoin de dépaysement et d'exotisme, de réconfort ou de refuge littéraire, Mma Ramotswe et son sourire viennent à la rescousse ! 

... la petite fourgonnette blanche qui, depuis quelques mois, produisait par intermittence un bruit étrange, recommençait soudain, encore plus fort qu'auparavant. Certes, Mma Ramotswe venait de tourner dans Zebra Drive, et prendre un virage exigeait toujours un effort particulier du véhicule, ce qui avait à voir avec les suspensions et ce que Mr. J.L.B. Matekoni appelait élégamment la "répartition de la charge". Réfléchissant un jour à cette expression, Mma Ramotswe lui avait demandé avec, peut-être, un peu trop de brusquerie : "Et cette charge, je suppose, Mr. J.L.B. Matekoni, c'est moi ?"
Il avait détourné les yeux afin de masquer son embarras.
- On peut le dire comme cela, Mma Ramotswe. Mais il faut savoir que nous représentons tous une charge pour les véhicules. Même ces mannequins très maigres sont une charge...
Il s'était arrêté là. Ce n'était pas ainsi qu'il parviendrait à se rattraper et Mma Ramotswe l'observait, attendant visiblement une suite.
Lorsqu'il était devenu clair qu'il n'avait rien à ajouter, la détective avait repris :
- Oui, Mr. J.L.B. Matekoni, il y a des femmes comme ça. Et hélas, on en voit même de plus en plus. Il y en a beaucoup désormais.
Elle avait marqué un temps d'arrêt, avant de poursuivre :
- Mais peut-être vont-elles commencer à disparaître. Elles vont maigrir encore et encore, devenir de plus en plus à la mode, et puis... pfffut... le vent les emportera.
Cette remarque avait réduit la tension et tous deux s'étaient mis à rire.
- ça leur apprendra ! s'était exclamé le garagiste. Elles seront emportées par le vent, alors que les autres dames seront toujours là, elles, parce que le vent ne sera pas assez puissant pour soulever...
Là encore, il s'était arrêté. Comme la fois précédente, Mma Ramotswe le dévisageait, guettant la suite.

Dans ce nouvel épisode, point de précipitation, beaucoup de contemplation et de réfléxion sur la vie qui coule tranquille. Au Botswana, on bichonne son postérieur, ses pieds, ses femmes et on se régale en buvant des litres de thé rouge. Hé hé. C'est ma conclusion hâtive, n'y faites pas attention ! Sans quoi, au passage, n'hésitez pas à tester la recette très relevée de Mma Makutsi et de son poulet piri-piri, en veillant à ne pas vous arroser le gosier de grandes rasades d'eau fraîche, non, non, souffrez en silence pour les beaux yeux de votre fiancé, il vous en remerciera la main sur le coeur. De là à conclure qu'il vous envisage comme la femme de son existence PARCE QUE vous savez cuisiner le poulet piri-piri, SA recette préférée, hmm... vous n'y allez pas de main morte ! Ceci étant, c'est une pécadille face à l'énorme confrontation qui s'annonce. Notre redoutable Mma Makutsi - redoutable par sa force de caractère, croyez-moi - va avoir d'autres chats à fouetter en apprenant que la nouvelle employée de son fiancé est Violet Sephotho ! Le cauchemar de Mma Makutsi. Une menteuse. Une tricheuse. Une oppportuniste. Certes, elle est ravissante et elle se sert de son sex-appeal pour obtenir tout ce qu'elle veut. Son nouvel objectif ne se nommerait-il pas Mr. Phuti Radiphuti ? Aïe.

Mma Ramotswe va devoir supporter de longues heures de complainte, de rage, de frustration... alors qu'elle-même doit se sermonner pour dire adieu à sa vieille fourgonnette blanche, son fidèle destrier, ni plus ni moins. Son cher et tendre Mr. J.L.B. Matekoni, excellent garagiste de son état, lui a déjà laissé entendre qu'il faut savoir se débarrasser des vieilles choses inutiles et dangereuses, mais Mma Ramotswe ne peut s'y résoudre. C'est une vieille histoire d'amitié, de partage, d'affection. C'est comme "une vache qui attend son heure sous un arbre". Mma Ramotswe, pour soulager la fourgonnette, choisit donc de faire le chemin à pied. Cela rappelle la discussion qui ouvre le roman, entre la détective et son assistante, mais marcher sous un soleil de plomb, sur des sentiers poussiéreux, avec la constitution qu'on lui connaît (il est écrit qu'elle est "traditionnellement" charpentée...), bref ceci nous donne une superbe et vilaine ampoule au pied ! Ouille.

Pas de grosse enquête, comme d'habitude. Beaucoup de personnages secondaires, d'anecdotes qui viennent se greffer à des petits bouts sans grande consistance. On connaît la recette, c'est simple, efficace, plaisant et reposant. Cette fois, un certain Leungo Molofololo réclame l'assistance de Mma Ramotswe pour démasquer le traître au sein de son équipe de football. Il est le président de la meilleure équipe du pays, mais depuis plusieurs mois leurs résultats sont déplorables, Mr. Molofololo est persuadé qu'on cherche à saboter son travail. Mma Ramotswe devra gagner la confiance des joueurs pour les cuisiner aux petits oignons et mettre à jour la supercherie. (La résolution, ma foi, est fidèle à l'image de la série !!!)

En refermant la dernière page, j'ai le sourire jusqu'aux oreilles. C'était bien, sans grande surprise, mais vraiment bien...

verite_et_feuilles_de_the

10-18 Grands Détectives, 2010 - 256 pages - 7,40€
traduit de l'anglais par Elisabeth Kern

Oui, encore ... c'est un très bon disque ! :)

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13 décembre 2009

Le coeur-de-gloire ~ Hervé Picart

L'Arcamonde - 3
Le Castor Astral, 2009 - 220 pages - 13€

coeur_de_gloireC'est le printemps, les rayons du soleil baignent les pavés de Bruges et Frans Bogaert, notre antiquaire détective, est d'humeur assassine. Coincé dans son Méandre à recenser l'ensemble des articles de sa boutique pour satisfaire les basses exigences de son assureur, Frans peste contre l'arrivée opportune d'une dame en rouge, Ornella De Volder. Elle porte à son cou un pendentif écarlate, offert par son époux, et demande une expertise du produit. Bogaert obtempère, ce n'est que pure pacotille (ou presque), ce bijou n'a nulle prétention de vêtir l'importance que lui confère l'homme de cette dame. Lady Scarlet sort de la boutique fâchée et se débarrasse du collier dans la première poubelle venue.

Quelques jours après, Mme De Volder se présente à nouveau à l'Arcamonde et raconte une bien étrange histoire. Elle tente par mille fois de jeter son pendentif aux flammes de l'enfer mais elle a sans cesse la désagréable surprise de le retrouver près de son chevet tous les matins. Bogaert accepte de pousser l'expertise et le range dans un tiroir de son laboratoire. En fait, il est clairement excédé par l'affaire De Volder, cette femme trop belle lui donne des frissons dans le dos, il n'arrive pas à la cerner, en plus du bon air printanier dans les rues de Bruges et de son inventaire casse-tête, il est passablement impatient et peu concerné par ce bijou. La fierté du monsieur sera piqué lorsque la dame en rouge réapparaît à l'Arcamonde en brandissant le pendentif. Un filou s'est incrusté dans la boutique et a défié l'antiquaire. Frans Bogaert entre enfin en scène !

Troisième épisode de cette série policière passionnante, nous croisons ici une sombre intrigue qui baigne dans le sang, la vengeance et le mensonge. C'est toujours merveilleusement bien écrit, et cet épisode, contrairement à l'Orgue de Quinte, se déroule exclusivement à Bruges, dans la boutique de l'Arcamonde, Lauren, l'assistante qui est aussi le double parfait de Lauren Bacall, y est pleinement présente, forte de sa beauté mystérieuse et ses aphorismes. Par contre, point de détails supplémentaires quant à la disparition de l'épouse de Frans. Moi qui croyais qu'il s'agissait d'un fil rouge... Ceci n'altère pas le grand intérêt de ce feuilleton, qui plaira à tous les amateurs d'ambiance noire, érudite et délicieusement rétro.

 

9 novembre 2009

Une femme sans peur ~ Lee Jackson

10-18, coll. Grands Détectives, 2009 - 380 pages - 8,20€
traduit de l'anglais par Eric Moreau

une_femme_sans_peurSarah Tanner vient s'établir dans un quartier populaire de Londres, à Leather Lane, où elle ouvre son propre café sans faire état de son passé. Une femme célibataire, jolie, en bonne santé, voilà de quoi nourrir les conjonctures de la clique des mégères ! (Et c'est vrai que notre héroïne a bien roulé sa bosse, comme on va le découvrir petit à petit.) Ceci, on l'apprend après les retrouvailles par hasard avec George Phelps, une ancienne connaissance de Sarah, qui hélas est saigné à blanc quelques minutes après, dans une rue près du Dining & Coffee Rooms. Sarah n'est pas sûre d'elle, mais elle pense avoir vu le coupable. Un roussin à la carrure d'une brute épaisse, en clair il ne fait pas bon traîner dans les parages. Sarah se rend donc chez son ancienne protectrice, une tenancière qui répond au nom de Son Altesse, et qui a encore un certain courroux envers Sarah. L'entretien se passe mal, et les ennuis ne font que commencer pour Sarah.
La jeune femme se lance toute seule dans une enquête pour rendre justice à la disparition tragique de son ancien camarade. Ses pas l'entraînent dans les bas-fonds de Londres, dans des bouges répugnants, des maisons closes et des salles de jeux interdites, lesquelles sont fréquentées par le beau monde et la pègre, les ordures et les artistes maudits, des pauvres types désargentés, une noblesse parvenue et la gentry. Sarah Tanner est à l'aise partout, elle se drape dans les plus jolies toilettes ou préfère l'anonymat, elle change de patronyme comme de chemise, mais plus d'une fois elle flirte avec le diable et les dangers ne sont jamais très loin !
Heureusement, elle peut compter sur l'appui de son serveur, le vieux Ralph Grundy, et un ancien soupirant, Arthur DeSalle. Ensemble, ils vont découvrir un fabuleux traquenard dans lequel la cupidité et la duplicité font sacrément bon ménage.
C'est un excellent livre que j'ai pris plaisir à lire d'une traite, une plongée à donner des frissons dans un Londres victorien loin des fastes et du glamour, mais plutôt dans les ruelles sombres et nauséabondes. La crapule n'a pas de nom, et le crime n'a aucune limite. J'ai carrément dévoré les dernières pages tant j'étais abasourdie par ce que je découvrais.
Sarah Tanner est une nouvelle héroïne qui m'est apparue sympathique et attachante, je compte bien lire la suite de ses aventures dans L'Ange de Leather Lane (qui vient de paraître en septembre 09).

 

> le blog de l'auteur : http://catsmeatshop.blogspot.com/

Lee Jackson est un passionné du Londres victorien, décor de ses romans policiers historiques. Après Les secrets de Londres, sélectionné en 2003 pour l'Ellis Peters Historical Dagger Award, il a publié 5 romans dont Le Cadavre du métropolitain, premier tome d'une trilogie conduite par l'inspecteur Webb. Membre de la Crime Writers Association, il anime également un site consacré à l’histoire sociale et culturelle de l'Angleterre victorienne : www.victorianlondon.org

 

 

5 octobre 2009

La princesse et l'assassin ~ Magnus Nordin

doAdo Noir du Rouergue, 2009 - 250 pages - 13,50€
traduit du suédois par Lucille Clauss et Maximilien Stadler

la_princesse_lassassinDans une petite ville de Suède, un adolescent est pris au piège dans la voiture d'un détraqué qui va abandonner son corps violenté dans une déchetterie. Un an et demi après, dans une autre ville, une autre série de disparitions commence à alerter la police locale. Y aurait-il un maniaque sexuel aux aguets ?

Avant d'atteindre un vrai niveau d'angoisse, ce roman noir cultive sur 250 pages beaucoup de mystère et de nervosité (sous l'apparence calme, on devine un grondement intérieur, un drame prêt à éclater). Nous sommes dans la petite communauté de Norra Soderbro, la vie au lycée coule paisible, quand la nouvelle (Nina) fait son entrée dans la classe du professeur Walle. Sa famille vient d'emménager dans la maison voisine de Markus, leur situation paraît ordinaire mais on comprend très vite que Nina et les siens n'ont jamais cessé d'aller de ville en ville, en fuyant d'affreuses rumeurs.

Aussi Nina n'a qu'une envie : se fondre dans la masse. Elle est donc soulagée d'être prise en charge par la fille la plus populaire de l'école (Lenita) qui l'intègre parmi son cercle social, l'invite chez elle pour son anniversaire, lui fait connaître son béguin (Jajje, un guitariste de dix-huit ans). Mais l'attitude de Lenita est louche, c'est une fille autoritaire et excessive, manipulatrice et cruelle. Le soir de sa fête d'anniversaire, pas mal d'événements vont survenir et bouleverser le commun de leur vie à tous.

L'intrigue du roman s'étend ainsi, sans mot dire. C'est faussement lent car la tension est palpable. On se surprend à soupçonner tous les personnages, on ne devine pas une minute l'identité du coupable, on se laisse d'ailleurs berner en beauté, on retient son souffle jusqu'aux dernières pages, on serre les poings et les dents, on a le souffle court... bref on comprend que ce thriller est bon, très très bon même. La recette du polar nordique est appliquée à la lettre, c'est noir, oppressant, curieux, douloureux. Dans son pays, "La princesse et l'assassin" a d'ailleurs reçu en 2003 le prix du meilleur thriller pour la jeunesse.   

27 septembre 2009

Jane Austen à Scargrave Manor ~ Stephanie Barron

Labyrinthes, une collection des éditions du Masque, 1998 - 446 pages - 8,50€
traduit de l'anglais (USA) par Corinne Bourbeillon

jane_austen_scargrave_manorJane Austen a bientôt 27 ans, elle vient de rompre ses fiançailles avec Mr Bigg-Wither et se réfugie chez son amie Isobel, nouvellement mariée au comte Scargrave, de deux fois son aîné. Elle compte bien s'étourdir dans l'effusion des bals donnés à Scargrave Manor. Hélas, le vieux lord meurt dans d'atroces souffrances et la maison porte le deuil. Des petits billets font très vite leur apparition et accusent la jeune épouse d'avoir comploté le décès du comte, ses liens avec Fitzroy Payne, vicomte et neveu de son mari, dénoncent une connivence trop proche, trop tendre. Scandale à l'horizon ! Jane est émue de la détresse de son amie, tous les soupçons l'accablent et d'étonnantes révélations viennent assombrir la réputation de la jeune femme et de son ami (et soupirant), lord Payne, héritier du titre et de la fortune de Scargrave...

Ce n'est pas parce qu'on trouve Jane Austen en titre qu'il faut s'attendre à une lecture d'égale qualité, non, non... l'esprit, l'essence, l'adoration, l'humour et la finesse y sont forcément brodés et utilisés à bon escient mais il va sans dire que Stephanie Barron n'a pas le talent de l'anglaise, même si du talent elle en possède aussi certainement... Car j'aime ses romans, c'est le deuxième titre que je lis de sa série (cf. Jane Austen et le révérend) et j'y trouve un vrai, grand plaisir. C'est une lecture de pure distraction, du divertissement pour zoner sur son canapé, c'est assez bien écrit, l'ambiance est admirablement reproduite, la silhouette de Jane Austen est mise à l'honneur, on trouve une jeune femme vive et intelligente, qui rougit beaucoup et qui répète souvent être de bonne condition physique et donc d'apprécier la marche et les promenades. Ceci étant, c'est tout de même comique de l'imaginer en détective, si l'on transpose l'idée d'une Miss Marple avec quelques années de moins... Là je dis stop, cela casse l'image et cela devient totalement ridicule.

La série de Stephanie Barron n'a pas d'autre intention que d'être agréable à la lecture et de ne pas prétendre usurper l'identité de Jane Austen, juste de la respecter, ensuite le personnage de l'écrivain anglais est mis en scène, mais jamais dans des situations incongrues, ou tout juste peut-on trouver que cela reste terriblement romanesque, Jane n'était pas une beauté fatale, elle le rappelle, mais son charme de l'esprit n'avait de cesse de faire tourner les têtes, et c'est avec étonnement que je constate de nouveau les ravages qu'elle provoque ! Cette lecture donne le sourire, c'est indéniable. L'enquête criminelle demeure de facture classique, je n'ai pourtant pas su deviner le coupable avant la révélation au dernier chapitre.  Stephanie Barron sait entretenir le suspense, mais son roman pourra paraître bien long et bavard pour ceux qui attendent de l'action et des rebondissements. Il n'en est pas du tout question dans ce livre ! Ambiance georgienne joliment léchée, voilà de quoi ravir les amateurs. Entendons-nous bien.

> un extrait :

Sachant que le lieutenant Hearst avait tué un homme, je ne parvenais à songer à rien d'autre ; mais l'on se doit, lorsqu'on enchaîne les figures, de causer un tant soit peu avec son partenaire ; je me mis donc l'esprit à la torture, désespérant de trouver un mot pour engager la conversation. Rougissante - j'en ai peur - et les yeux obstinément baissés, je dus lui faire l'effet d'une vraie petite oiselle, lui offrant ainsi une image de ma personne probablement aussi imparfaite que le portrait que miss Delahoussaye m'avait dressé de lui. Lui-même, devant mon mutisme embarrassé, hésitait à prononcer une syllabe ; et nous persistâmes péniblement dans ce silence d'une profonde sottise pendant près de la moitié du temps que dura la danse. Mais s'il est une chose que je déteste par-dessus tout, c'est bien de me retrouver flanquée d'un cavalier muet ; aussi, surmontant mon horreur des coups de pistolet à l'aube, je me réfugiai dans la légèreté d'un badinage féminin.
- J'ai profité de votre absence, lieutenant, pour me renseigner sur votre caractère, lançais-je.
Levant un sourcil, il me jeta un regard amusé.
- Et suis-je digne de toucher votre gant ?
 

NB : Il s'agit du premier tome de la série.

> lu aussi par Plaisirs à cultiver et La bibliothèque d'Allie

25 septembre 2009

L'âme détournée ~ R.N. Morris

10/18 Grands Détectives, 2009 - 410 pages - 8,90€
traduit de l'anglais par Bernard Cucchi

lame_detourneeJe sors de cette lecture complètement emballée et conquise par cette première rencontre avec Porphiri Pétrovitch, juge d'instruction à St-Petersbourg. Nous sommes en 1866, soit un an et demi après l'affaire Raskolnikov durant laquelle Pétrovitch a joué un rôle crucial pour mener l'enquête du double meurtre de Crime et Châtiment (de Dostoïevski).
Faut-il être fou ou audacieux pour mettre en scène un personnage tiré d'une oeuvre majeure et le faire évoluer dans une série dont l'ambition n'est nullement de s'inscrire chez les classiques, mais juste de divertir ?
Et si, tout simplement, il s'agissait là de talent, car le résultat est vraiment très, très bon.
Question ambiance, nous sommes servis. La Russie, donc, au milieu du 19° siècle. Nous sommes en plein hiver, il fait extrêmement froid, les rues sont couvertes de neige, les gens meurent de faim, ou dépensent leurs kopecks à boire de la vodka, les pauvres filles se prostituent, le crime crapuleux s'invite donc à la partie.
L'histoire s'ouvre sur la découverte de deux corps, la scène est particulièrement glauque et donne des frissons. Un nain a eu le crâne fracassé par un coup de hache et près de lui le corps d'un homme se balance au bout d'une corde. Ces deux-là se détestaient, il n'y a point d'indices qui impliquent le meurtre, bref la police conclue hâtivement au suicide succédant au remords.
Pétrovitch peste dans sa barbe, selon lui cette affaire est plus vicieuse et porte la signature d'un esprit retors et redoutable d'intelligence. Mais ses supérieurs lui mettent des bâtons dans les roues, le dossier est bouclé, jusqu'à ce qu'un nouvel élément relance l'enquête.
Nous allons encore en souper des bouges infâmes, des personnalités tordues et complexes, des ambitions étouffées, des mensonges et des trahisons, des secrets et de l'âme humaine souillée, bafouée et même déposée chez un prêteur sur gages !
C'est laid, grisâtre, oppressant et morose... mais c'est absolument captivant.
Je me suis surprise à tourner les pages de ce livre, prise au piège de ma propre fascination pour ce décor slave peuplé de personnages attachants, non dénués d'humour pour certains, même si cela reste très en retrait de la ligne principale. Quant à l'intrigue policière, elle m'est apparue parfaitement acceptable, entraînante d'un bout à l'autre pour un final plus ou moins imprévisible (j'avais flairé le coupable !).
Dernière info, l'auteur est anglais et a déjà écrit une nouvelle aventure de Porphiri Pétrovitch, A vengeful longing.

 

 

et un petit extrait pour se mettre dans le bain :

Le samovar gargouillait et sifflait en vibrant. Porphiri Pétrovitch et Anna Alexandrovna s'en détournèrent, comme dans un accès de pudeur. Elle lui désigna un sofa russe, or et marron. Quand il s'assit, une rafale de vent fit trembler les carreaux.
Le salon était tendu de brocatelle bleu pâle agrémentée de dorures sur les moulures rococo. L'air, humide, embaumait des vapeurs de thé. Les panneaux de rideaux de soi du même bleu que les brocatelles tombaient devant les trois grandes baies. La lumière qui filtrait du dehors déposait un reflet crémeux sur la robe sombre d'Anna Alexandrovna. Dans la cheminée de marbre, de courtes flammes, vives, affleuraient timidement sur une montagne de charbons rougeoyants.
- C'est un tel choc ! dit Anna Alexandrovna en regardant par la fenêtre, comme si elle commentait la violence soudaine des éléments. Comment est-ce arrivé ?
- Malheureusement, il semble bien qu'ils aient été assassinés, tous les deux.
- Non !
Elle le regarda, espérant trouver sur son visage une autre réponse.
- On a découvert leurs deux corps dans le parc Pétrovski.
- Le parc Pétrovski ?
Aucun doute : elle avait été troublée lorsqu'il avait mentionné le parc. Mais, déjà, elle surveillait ses réactions. Elle s'écarta un peu de Porphiri en se penchant en arrière. Il l'observait, guettant un signe, elle ne livra cependant plus rien.

 

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