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Chez Clarabel
thierry magnier
2 avril 2010

La formule magique, c'est pour cacher ma peur.

Ont été engloutis par la Miss, 9 ans 3/4 ...

la_soupe_aux_amandesLa maison de Ram est immense, plus grande que ça encore, c’est l’aéroport de Roissy. Depuis qu’il y vit avec sa maman, il en connaît tous les coins, beaucoup de ceux qui y travaillent aussi. Il faut chaque jour faire attention de ressembler aux voyageurs, à ceux qui sont en transit. Ram et sa mère sont des clandestins de l’aéroport, ils ne sont pas les seuls, et se retrouvent autour d’une soupe dans un hangar. La vie dans l’aéroport est aussi rythmée par les nombreux gestes de solidarité qui donnent de la couleur aux jours. (quatrième de couverture)

C'est un très joli texte de Sylvie Deshors, sur un sujet sensible et pas facile à décrire sans tomber dans les écueils. La réalité est pourtant là - la peur, les faux-semblants, les parties de cache-cache et les chiens des vigiles. Une maman et son petit garçon vivent dans un aéroport, ils n'ont pas de papiers. L'histoire ne dit pas pourquoi, comment et après. L'histoire montre surtout un enfant émerveillé par les couleurs, les odeurs, les rencontres, l'espérance et la beauté de la mère, qui retient un sourire crispé et serre souvent son poing à mener cette vie clandestine. Il ressort de cette lecture une bouffée d'espoir, un élan de solidarité ... et le goût d'une bonne soupe aux amandes, qui rend les gens heureux, le temps d'une parenthèse chaleureuse. Une lecture moelleuse, pas du tout mélancolique.

La soupe aux amandes ~ Sylvie Deshors

**********

ce_soir_laC'est un petit roman qui serre le coeur. Qui serre le coeur d'angoisse. C'est l'histoire d'un petit garçon qui accomplit tous les jours les gestes d'un grand. On devine la vie pas facile, les cordons de la bourse trop souvent sanglés, les courses au compte-goutte, les carrés de chocolat avalés entre deux tranches de pain pour le goûter, le ronronnement du ventre qui en voudrait plus, et puis le froid dans l'appartement, avec la serrure grippée à la porte d'entrée. Benjamin se débrouille comme un chef et ne se plaint pas. La mécanique est bien huilée. Après les devoirs, le garçon dresse la table et lit une bande-dessinée en attendant le retour de sa mère. Mais ce soir-là, sa maman Caroline est en retard. Les minutes défilent et tombent comme des pierres dans son estomac creux. C'est l'angoisse, la peur panique d'être abandonné. Et comme Benjamin, nous avons peur et nous attendons Caroline avec une impatience grandissante. Où es-tu, Caroline ? Le suspense s'intensifie. Au fil des pages, la lecture deviendrait presque insupportable car le lecteur a besoin de connaître la vérité. C'est ce qui rend la lecture saisissante, en nous faisant oublier le misérabilisme ambiant. Que d'émotions dans si peu de pages !

Ce soir-là ~ Agnès Lacor

Petite Poche / Thierry Magnier (2010) - 5 € chaque livre de cette collection qui porte bien son nom : pratique pour glisser dans la poche, le livre a la taille d'une paume de la main.

 

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21 octobre 2009

Frères de sang ~ Mikaël Ollivier

Editions Thierry Magnier, 2006 - 142 pages - 7,50€
Ce roman a été publié aux éditions J'ai Lu jeunesse en 2003.

Ce mercredi 21 octobre, le téléfilm réalisé par Stéphane Kappes, d'après le roman de Mikaël Ollivier, sera diffusé sur France 2 à 20:35.
L'auteur a lui-même écrit le scénario.

freres_de_sangC'est l'histoire d'une famille banale, les Leumenier (le père, la mère et les deux fils, Martin, 14 ans, et Brice, 19 ans). Ils vivent dans un lotissement très cossu, pour famille chic au train de vie confortable et tranquille. Un soir, cette existence dorée bascule dans le cauchemar lorsque la police sonne à la porte pour arrêter Brice, suspecté d'avoir tué cinq personnes. Très vite, les preuves accablent le jeune homme. Il est devenu le coupable idéal, même aux yeux de ses parents. Seul son frère Martin décide de se battre pour prouver son innocence. Son obstination viendra-t-elle à bout de la machine judiciaire ?
L'histoire étant racontée à la première personne, il est très facile de se glisser dans la peau de Martin, de ressentir sa colère et son incompréhension. Il va mener sa petite enquête (c'est la partie qui me semble trop facile, mais qui ravira les plus jeunes car l'ensemble est lisse, riche en rebondissements et en suspense) et ainsi conduire le lecteur dans les méandres d'une sombre affaire de meurtres et de secrets de famille.
Malgré quelques situations étourdissantes de facilité et des dialogues récités sans âme, ce roman a su remporter toute mon adhésion avec son scénario bien ficelé et son histoire de deux frères qui luttent ensemble contre le système. C'est poignant, captivant. Une base idéale pour convenir à un téléfilm divertissant.

*** Ce soir, 21 octobre sur la 2ème chaîne ! ***

 

 

8 octobre 2009

La vie commence ~ Stefan Casta

Editions Thierry Magnier, coll. Grands Romans, 2009 - 330 pages - 17€
(achevé d'imprimer sur un air d'opéra)
traduit du suédois par Agneta Segol

la_vie_commenceFinies les émotions fortes, voici un roman qui se déguste à petites lampées. Il ne s'y passe pas grand-chose, l'histoire se raconte à pas de loup, ou de velours. C'est feutré, silencieux. Le charme est pourtant fou, présent, partout. C'est un bonheur à lire, prendre son temps, savourer l'instant, se poser quelques questions, et puis ne pas s'en soucier si les révélations ne nous éclaboussent pas. C'est tout de même précieux de croiser un tel roman !
L'éditeur nous prévient : Comment peut-on aimer à ce point un gros roman qui avance lentement, qui ne raconte pas tant de choses, et que pourtant on ne peut lâcher ?
La question se pose, la réponse nous vient sur le bout des lèvres... le talent, ça ne se discute pas. L'émotion, l'instant, la rencontre, l'intime conviction d'être à l'écoute, de savoir que ce livre-là vous parle à vous, rien qu'à vous. Le reste importe peu.
J'en ai donc traversé des tempêtes de sensations ces jours derniers, le fait de me plonger dans cette atmosphère plus singulière n'a pas été pour me déplaire. Nous sommes en Suède, dans un coin perdu, une impasse avec pour seule indication un panneau où est inscrit Moon.
Préparez-vous d'ailleurs à un alunissage de toute beauté... Les premières phrases se posent, devant nos yeux, elles nous annoncent l'élégance et la pureté de ce qui va suivre.
« Le soir où elle, Esmeralda, est arrivée, tout a changé. Ç'a été le déclenchement d'une période bouleversante dont la fin a été surprenante. Surtout pour moi. Je me rappelle avoir pensé que tout ça, c'était peut-être décidé d'avance. Qu'il était écrit qu'elle mettrait notre existence tranquille sens dessus dessous. Et que c'est pour moi qu'elle avait été envoyée. »
Dans une ferme où vivent Brigitte, une ancienne cantatrice devenue handicapée, et Gustavo, qui est d'origine italienne, séjourne Victor, un étudiant en philosophie, relié au reste du monde par un ordinateur et internet. Un jour, il voit surgir une demoiselle blonde avec les cheveux en pétard et un air à moitié farouche. Elle dit se prénommer Esmeralda Alice Caroline (selon ses humeurs) et doit se rendre chez un voisin mais préfère s'arrêter chez Brigitte et Gustavo où elle est convaincue avoir été envoyée pour Victor, notre jeune homme contemplatif et rêveur, qui se braque de quitter son cocon pour découvrir le monde, à commencer par la ville où il pourrait suivre ses études supérieures.
Il en faut des pages et des pages de silence et d'apprivoisement, de gestes du quotidien, de saisons qui passent et des animaux qui vont et viennent, entre un chien qui comprend quand on lui parle et des oiseaux qui s'approchent exprès pour manger et chanter.
C'est un roman mystérieux, par la séduction qu'il dégage et la faculté de vous accrocher à son rythme, sensible et touchant, un roman gracieux, admirablement écrit et traduit.
J'ai, évidemment, beaucoup aimé.

7 septembre 2009

Pirate des Garages-Vides ~ Corinne Lovera Vitali

Editions Thierry Magnier, 2009 - 85 pages - 7,80€

pirate_des_garages_videsRapport au juge, rapport aux adultes qui s'interrogent, rapport à la vie qui ne fait pas de cadeau.
Jim, seul, doit rédiger les derniers événements survenus durant les mois écoulés, depuis janvier, pour faire le vide dans la tête, bien amochée, d'ailleurs, avec un oeil poché et la boule à zéro. Jim revient sur tout, son enfance, son père au trou, sa mère à son tour inquiétée, le gamin confié à Nini, l'amie de la famille, ou disons qu'il fallait le planquer, dans une cantine rouge, et sursauter au moindre bruit suspect, veiller à toute visite inquiétante... Jim en a plein le sac de ses histoires, il fait son rapport, comme lui demandent le juge, Alexandra la princesse, sa prof en fait, et José le psy. Cela ne peut pas être pour un mal, contrairement à ce que pense Sophie, ainsi expliquera-t-il cette histoire de pirate des Garages-Vides, mais en passer par là demande aussi un long travail de visualisation globale.
Le rapport de Jim peut paraître bien décousu au départ, pas franchement engageant, mais ce serait se leurrer d'imaginer un compte-rendu d'une vie de râtés avec son lot de misère et de galère. Taratata. Le rapport est rédigé à la première personne, du coup le texte de Jim est une claque, pour vous dire lisez-moi, vous ne le regretterez pas. En effet, tout vient du coeur, c'est bien raconté, avec les tripes et l'envie, en passant par les zigzags. Signe des temps difficiles avec éclaircie au tournant.
C'est très court, seulement 80 pages, mais c'est tout à la fois juste, poignant, irrésistible, drôle, bizarre, prise de tête, intelligent et sensé. Et ça vous plante le clou bien comme il faut, là où il faut.

Madeline, libraire à L'Eau Vive, s'est sentie "trop remous dans le coeur".

23 juillet 2009

Le chant du volcan ~ Christian Moire

Photographies de Stephan Zaubitzer

le_chant_du_volcanAurélie, étudiante française en archéologie, termine son séjour de quatre mois au Mexique où elle a travaillé sa thèse sur les anciens Purépechas. Ses valises sont bouclées, elle est prête à partir lorsqu'elle rencontre un type, très beau, au regard de braise, qui ne parle pas ou très peu, et qui l'invite sur son lieu de travail, à l'UNAM, la grande université de la ville. Hénoch est géologue, il a vingt-huit ans, il vit chez sa mère et il est prisonnier de son enfermement morbide. Des années auparavant, son père est mort dans un tremblement de terre, créé par le réveil du volcan. Depuis, Hénoch vit, respire, scrute, sent le volcan.
Le chant du volcan.
A la première alerte, il part. Il sauve sa peau. Il ne veut pas finir comme son père.
Hélas ce trauma rend le garçon inaccessible aux autres, Aurélie s'en rend compte et le plante à l'aéroport, lui tourne le dos, en colère après lui, cherchant à le secouer pour qu'il brise sa coquille. Le passé, c'est le passé.
Franchement, j'ai été déçue par ce roman issu de l'excellente collection photo-roman de chez thierry magnier. Ici je n'ai pas trouvé d'osmose entre l'histoire et les images, lesquelles représentent de la verdure et des gens qui font la sieste. Le contraste est énorme, entre la fraîcheur d'un côté et l'atmosphère sinistre de l'autre. Dans l'histoire, le rappel des photos donne aussi le sentiment d'un exercice donné. Je ne sais pas, cela manque de spontanéité.
Et puis j'ai eu du mal avec l'histoire entre Aurélie et Hénoch, leur aventure trop brève, compliquée, le spectre du père mort, le chant du volcan qui n'éveille aucune franche sensualité, non, cela tombe un peu à plat. C'est dommage, car les titres de cette collection sont dans l'ensemble d'une très bonne qualité. Une prochaine fois, donc.

Editions Thierry Magnier, coll. Photoroman, 2008 - 90 pages - 13€

L'avis d'Aurélie, aussi perplexe que moi

Présentation sur le blog de Stephan Zaubitzer

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16 juillet 2009

Orages d'été ~ Barbara Hall

orages_deteDans une ferme en Virginie, en plein été caniculaire, les fermiers ont du souci à se faire car la sécheresse perdure et les récoltes de tabac s'annoncent catastrophiques. La famille de Dutch, quatorze ans, est sévèrement touchée, mais la jeune adolescente passe plus de temps à scruter les siens, au cours de ces mois particulièrement chauds et orageux, où les secrets remontent peu à peu à la surface.
Durant cet été, Dutch voit arriver sa cousine Norma, quinze ans, très belle et sûre d'elle, qui ignore hélas que ses parents l'ont écartée du foyer pour régler leur divorce. Dutch a beaucoup de mal à accepter cette adolescente pleine de charme, qui fait tourner les têtes des garçons, et notamment celle de son frère, Flood, papa d'un petit garçon de neuf ans. Dutch n'a pas digéré le départ de Becky, six ans auparavant, et espère secrètement qu'elle rentrera au bercail pour reprendre sa place. C'est typique des Peyton de s'enfermer dans le passé et les souvenirs, pour protéger son monde, c'est néanmoins un frein et un handicap. 
Cet été s'annonce définitivement différent des autres, avec la menace des banquiers qui harcèlent son père, les relations amoureuses compliquées, des révélations trop explosives et des remises en question permanentes.
Mais c'est dommage qu'en dernière partie de roman, l'histoire semble prendre plusieurs directions et trouve des solutions trop faciles et trop rapides pour ranger chaque cas dans sa boîte. Légère frustration me concernant, j'ai cependant apprécié l'atmosphère étouffante qui rend le récit tendu et captivant à lire. 

Achevé d'imprimer sous un soleil de plomb pour le compte des éditions Thierry Magnier, 2008  /  222 pages -- 11€

Traduit de l'anglais (USA) par Jean Esch

7 juillet 2009

Le temps des lézards est venu ~ Charlie Price

le_temps_des_lezardsLa mère de Ben est folle, frappée d'hallucinations, elle imagine des lézards partout et s'attend à une invasion imminente. Lycéen désoeuvré, Ben passe son temps à la surveiller, qu'elle évite le mélange des cachets et de la drogue, et tente de mettre la main sur son père qui s'est fait la malle, ou fait les cent pas dans le hall de l'hôpital en espérant un énième internement.

Un jour, il rencontre Marco Lasalle, un garçon dans la même situation que lui - sa mère est folle et internée. Ils vont se revoir chez Marco et celui-ci va alors lui raconter une histoire complètement dingue. En glissant le bras dans un trou de ver, en fait un portail temporel, il va se rendre en l'an 4000 et découvrir que cette société est désormais capable de guérir les maladies mentales.

Après une période de doutes, Ben est tenté de croire les élucubrations de Marco. Qu'importe si elles l'emportent dans une fuite en avant qui pourrait avoir raison de son propre self-control... Etrange roman que voilà ! Toutes les frontières sont abolies, brouillant les pistes qu'on imaginerait toutes tracées à l'avance.  Le début est franchement très bon, mais à partir du moment où l'épisode de l'an 4000 fait son apparition, l'histoire devient vraiment trop bizarre. Partagé entre la SF et la folie, le récit aurait tendance à nous déconcerter au fil des pages. Toutefois cela se lit très vite, toutes circonspections rangées dans la poche.
Un roman bizarrement très prenant.
Par l'auteur de Ce qu'ils savent.

Editions Thierry Magnier, coll. Romans Grands formats, 2009.
(achevé d'imprimer au présent) 240 pages - 16€

Traduit de l'anglais (USA) par Pierre Charras

Un roman à décrypter, selon Pages à pages

*****

Concours sur le site des éditions Thierry Magnier

1er prix
un exemplaire de
Le temps des lézards est venu et De l’autre côté de l’île
+ les deux prochains titres de la série
(à paraître entre septembre et octobre – envois à la rentrée)

du 2e au 10e prix
un exemplaire de
Le temps des lézards est venu et De l’autre côté de l’île

Click !  (pour remplir le formulaire et répondre aux questions)

12 juin 2009

Un amour prodigue ~ Claudine Galea

un_amour_prodigueMani a cinquante ans, veuve depuis quelques années, elle mène une vie recluse dans sa Villa à la montagne. Philippine a seize ans, le coeur brisé par un premier amour. Incapable d'être comprise par sa propre famille, la jeune fille se réfugie chez sa grand-mère. Ensemble, elles vont se raconter et se confier leurs histoires qui parlent d'amour, de première fois et de rupture. Deux générations les séparent, et pourtant elles ont en commun d'avoir toutes deux aimé une femme.
A sa façon, Mani va lui raconter combien l'amour peut rendre plus beau et plus fort. Qu'on peut aimer et quitter, qu'on peut recommencer à aimer, en mieux, ou autrement. Cela ne signifie pas qu'on oublie, qu'on remplace, qu'on cicatrise. Les blessures existent pour se sentir en vie, et de longues nuits sans sommeil, à boire du thé ou du café, à écouter de la musique à ou à discuter de livres, vont amener nos deux héroïnes à se comprendre.
Pour Mani, cela veut dire confier un chapitre de son passé, pour permettre à sa petite-fille de maîtriser sa douleur, de purger sa peine et de faire en sorte qu'un premier amour permet d'ennoblir une personne, et non pas la détruire. Phili pleure beaucoup, elle est émue aussi par la confiance que lui témoigne sa grand-mère, avec laquelle une tendre complicité la lie. Elle ne se contente pas d'écouter, parfois elle se révolte, elle crie, elle hurle, elle est méprisante. Trop nouée à son désespoir, toute dédiée à son sentiment de trahison.
Même si ce roman est publié chez Thierry Magnier, il mérite d'être lu par un lectorat adulte (ou pour adolescents, niveau lycée ou fin de collège). Cette collection de photo roman est en fait un exercice donné à un auteur, qui consiste à écrire une histoire à partir de photographies. Ici ce sont les clichés de Colombe Clier qui ont su éveiller chez Claudine Galea des sensations qui leur étaient liées. Des images ont commencé à apparaître, d'absence, de désir, de vie quotidienne, de maison... "Quand on écrit, on raconte toujours les histoires secrètes qui dessinent d'autres vies en nous."
Cela m'est très difficile de décrire à quel point j'ai été touchée et éblouie par ce joli roman, j'ai aimé son climat, les mots chuchotés, le tourbillon des émotions et le flot des souvenirs, des confidences qui pourraient presque ulcérer les collets montés. J'ai aimé la moindre description du quotidien de cette quinqua, son souffle de vie, sa lenteur, son indolence, sa contemplation, sa sensibilité. On y trouve des sons, de la musique et des livres. On y collecte des sensations, des larmes aussi. Parce que deux femmes se parlent comme jamais auparavant, brisant la loi du silence, bravant les remparts du passé, dénichant les souvenirs rangés dans des boîtes closes.
Claudine Galea raconte l'amour au féminin avec pudeur et poésie, sans faux-semblant, en levant le voile sur cette attirance des corps du même sexe. Il n'y a rien de choquant, rien de dépravé non plus. J'ai envie de dire que c'est un livre qui ne fait que parler d'amour, le reste importe peu... Ce sont des variantes, des déclinaisons, des interrogations au sens large. Et j'ai beaucoup, beaucoup aimé. C'est l'exemple de lecture très intime, qui ne vous parle qu'à vous, et qui se révèle terriblement impudique (ou délicieusement indécent) d'en raconter les détails.

Thierry Magnier, 2009 - 250 pages - 16€

Claudine Galea est également l'auteur de A mes amourEs et Rouge métro.

extrait :

C'est le don de l'autre qui vous ennoblit ou vous tue. Celle que j'avais aimée m'avait ennoblie. Je me mis à réfléchir. Personne ne vous tue si vous ne voulez pas l'être. C'est cela qu'elle m'avait appris aussi, en filigrane. Ce qui vous tue, c'est le manque d'amour, la trahison, l'absence de grandeur, mais, en vérité, ça ne tue pas, ça blesse, ça rend dingue, ça vous balance un coup de poing dans la gueule, ça vous fiche une douleur pas possible comme quand on se retourne un ongle, sauf que c'est le corps entier qui est retourné, ça vous laisse une cicatrice, mais ça ne tue pas. Ça ne vaut pas le coup de mourir pour ça. Un véritable amour ne peut pas engendrer la mort. Un amour vrai donne la vie, encore et encore. Un amour vrai vous conduit vers un autre amour vrai.

1 juin 2009

Le monde attend derrière la porte ~ Pascale Maret

le_monde_attendLa famille de Sarah, quatorze ans, appartient à la communauté des chrétiens rigoristes, régie par le Tuteur et des ministres autoproclamés de Dieu. Cette vie totalement fermée au monde extérieur commence à peser sur le moral de l'adolescente. Celle-ci s'interroge sur le fait de se marier à 18 ans et d'avoir obligatoirement six enfants, de porter un foulard sur la tête, des jupes longues et des pulls qui couvrent les bras, de ne pas avoir le droit d'écouter la musique ni de regarder la télé, de ne pas lire, de ne pas parler aux garçons, d'accepter un coca ou un bonbon de la part d'un insensé qui vit dans le monde en oubliant les vraies valeurs. Sarah prend peu à peu conscience des notions comme la liberté et le choix. En elle, gronde une violente rage d'émancipation. Hélas, elle va se cogner contre un mur quasi impossible à escalader, et encore moins à renverser.
J'ai été totalement happée par l'histoire de Sarah et par sa volonté d'affranchissement, sa soif d'indépendance, ses questions pertinentes et ses tâtonnements pour parvenir à savoir ce qu'elle veut, ce qu'elle doit faire, même si cela implique d'autres sacrifices. A un moment, son frère lui donne cette très belle réplique, pleine de sens : « Tu vois, on est comme des loups qui sont pris dans le piège et qui préfèrent s'arracher la patte plutôt que de rester coincés. Ça fait mal, mais après on sera libres. »
C'est un texte intelligent et nécessaire, qu'il faut lire pour ne pas ignorer l'aveuglement et les dogmatismes toujours persistants, qui enferment plutôt qu'ils n'ouvrent au monde. Il existera toujours des portes à ouvrir ou fermer, des seuils à franchir, la liberté est parfois chèrement payée, il est possible de boîter pour la vie ensuite, mais c'est tellement précieux de disposer du libre arbitre, de pouvoir assouvir ses désirs sans aucune emprise, juste selon sa volonté.
Ce roman de Pascale Maret se révèle pratiquement indispensable à découvrir. C'est un sujet tellement fort, tellement captivant qu'il vous laissera plus d'une fois bouche bée.

achevé d'imprimer (sans parjure) pour les éditions thierry magnier, 2009
195 pages /  8.50€

A rapprocher avec :  Trop de chance, le roman écrit par Hélène Vignal (rouergue, 2007)

Pascale Maret est également l'auteur de A vos risques et périls (thierry magnier, 2007)

6 mars 2009

Cascades et gaufres à gogo - Maria Parr

« Il se passe toujours plein de choses loufoques quand on a une voisine et une meilleure amie telle que Lena. Mais, de temps à autre, je me dis que ce que je préfère par-dessus tout, ce sont les jours ordinaires. Les jours où il ne se passe rien de particulier, où je mange une tartine de pâté de foie, où Lena et moi on joue au foot, on cherche des crabes, on ne parle de rien d'exceptionnel, bref, ces jours où tout ne part pas en eau de boudin. »

51xhjYbucuL__SS500_Mais les jours ordinaires n'existent définitivement pas quand on a une voisine et une meilleure amie telle que Lena. C'est Trille, le narrateur de neuf ans, qui raconte cette formidable amitié qui donne lieu à des aventures poilantes, étonnantes et pétillantes. A Knert-Mathilde, petite bourgade paumée de Norvège, on a foi en la famille, aux amis, aux traditions et aux bonnes gaufres de mamie bis. Les semaines passent, Trille et Lena ne s'ennuient pas une minute. Ils font les quatre cent coups, chaque chapitre est l'occasion sans cesse renouvellée de rapporter un fait extraordinaire, souvent à l'initiative de Lena, fillette intrépide, qui ne manque pas d'imagination. C'est une frondeuse, habituée à pousser des coudes car c'est la seule fille de la classe. Elle vit aussi seule avec sa maman, et elle aimerait bien un papa pour son anniversaire, mais là ce sont les affaires des grandes personnes, et poser une petite annonce sur la voie publique n'est pas du goût de tout le monde !...

Voici un roman indéniablement drôle, inventif et plein d'entrain. Il sait également être tendre, avec une petite pincée au coeur en cours de lecture. C'est un livre qui parle d'amitié, et des rapports entre génération, du soutien, de la solidarité et de l'entraide. Les bêtises sont importantes, ce qui ne manquera pas de séduire les jeunes lecteurs (dès 9-10 ans), mais le ton de Maria Parr va vous tirer des sourires. C'est frais, c'est spontané, c'est très bon ! 

*****

 

« - Il y a assez d'hommes dans cette maison. Sans oublier Trille, bien sûr, a-t-elle cru bon d'ajouter.
Une précision qui, selon Lena, était la phrase la plus crétine qu'elle ait entendue depuis des lustres.
- Trille n'est pas un homme !
- Je suis quoi alors ?
- T'es un voisin !
Tiens donc, j'ai pensé. Et j'aurais bien aimé qu'elle dise autre chose. Que j'étais un meilleur ami, par exemple.
»

 

 

 

Achevé d'imprimer au clair de lune pour le compte des éditions Thierry Magnier, 2009
180 pages  /  10,50€

Traduit de néo-norvégien par Jean-Baptiste Coursaud

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