Mal de pierres - Milena Agus
La narratrice nous raconte une histoire passionnante de sa saga familiale, à petite échelle, dans l'île de la Sardaigne où tout commence avec le mariage de sa grand-mère, bien malheureuse d'être à 30 ans toujours célibataire et repoussée par ses soupirants, qui conclue donc par dépit son alliance avec un type arrivé chez ses parents (trop heureux de marier cette fille impossible). Pourquoi, impossible ? Car la grand-mère est une femme très belle, mais elle traîne une réputation d'allumée qui écrit des poèmes olé-olé à ses amoureux. Pour fuir la honte sur la famille, la grand-mère est donc mariée à ce veuf qu'elle n'aime pas, mais lui non plus ne l'aime pas, il accepte d'ailleurs la chasteté et court se soulager dans les maisons closes. Jusqu'à ce que la grand-mère réagisse, à le voir fumer sa pipe tranquillement, un soir, dans la cuisine ...
Il y a aussi ce voyage en cure thermale à l'automne 1950 sur le continent où la grand-mère, âgée de 40 ans, rencontre le Rescapé, un individu marqué aussi par les coups du destin, et entre eux va naître une belle histoire d'amour qui marquera à jamais la grand-mère. La vie de cette grand-mère est ainsi racontée en pointillés par la petite-fille, qui rapporte le témoignage des uns et des autres, puisant sur son instinct et l'amour qu'elle nourrissait pour cette femme mystérieuse, qu'on croyait un peu folle. Jusqu'à la dernière page, le lecteur n'aura de cesse d'attendre le gong de la sentence finale, "sait-on jamais tout de quelqu'un, aussi proche soit-il". L'amour devient une entité presque maladive, une folie héréditaire et une résolution qui s'approche parfois de la malédiction. Ce roman de l'italienne Milena Agus est étourdissant, il raconte une histoire fascinante, avec des personnages extraordinaires, qu'on quitte à regret. C'est une lecture sensible, à l'aura troublant, qu'on lit avec émerveillement sur quelques 120 pages.
Liana Levi