J'étais là, de Gayle Forman
Sous le choc du suicide de sa meilleure amie, Cody accepte de rendre service à ses parents en se rendant près de Seattle, où leur fille menait sa vie d'étudiante, pour y rassembler ses affaires et quelques indices. Rien n'indiquait que Meg était au bord du précipice. Pour Cody, pointe aussi la douleur de l'incompréhension et du rejet. Les deux amies avaient certes emprunté des chemins différents, mais avaient pour elles des années d'une complicité indiscutable. Le choix de Meg a pris tout le monde au dépourvu, en plus de renvoyer chacun à une prise de conscience.
Sur place, à Tacoma, Meg se glisse dans la vie de Meg, rencontre ses colocataires, découvre une facette de son amie qu'elle ne soupçonnait pas, croise aussi le garçon qui lui aurait brisé le cœur. Cody épingle ce Ben McAllister sans détour, il est responsable de la mort de Meg, il s'est servi d'elle, c'est un pauvre type, etc. Mais Ben se défend et rétorque qu'elle ignorait totalement qui était Meg. À force de fouiller sur une piste de plus en plus froide, Cody parvient à rassembler des faits nouveaux, mais glaçants et déstabilisants. En même temps, elle réalise combien sa propre vie est elle aussi insipide et gâchée par son manque d'ambition ou sa vieille trouille d'affronter l'inconnu.
Un roman solennel, qui aborde le suicide avec justesse et sans pathos, tout en s'attachant à tirer le portrait d'adolescentes secrètes et brisées. Gayle Forman réserve un traitement sensible et pudique au marasme émotionnel que vit l'entourage de la personne disparue, entre le traumatisme, le sentiment de trahison et l'éternelle incompréhension qui foudroie les parents, les amis... C'est une lecture hyper touchante, assez triste et obsédante. Car le chemin du deuil et du contrecoup est long, compliqué et pénible. Un livre à aborder dans les écoles, en famille, entre amis, pour ne plus diaboliser ce sujet préoccupant et pour mieux l'envisager sous toutes les coutures.
Livre de Poche Jeunesse - Trad. Luc Rigoureau pour Hachette éditions - 2016