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Chez Clarabel
24 février 2015

Justice pour Louie Sam, par Elizabeth Stewart

« Lynché. C'est un mot brutal, plus violent que pendu. Pourtant, c'est bien ce qui s'est passé. »

Justice pour Louie Sam

Une maison brûle près des marécages, le corps d'un homme est retrouvé dans les décombres, son crâne a été fracassé. Témoin sur place, George Gillies, 15 ans, attend l'arrivée du shérif et participe à l'enquête en prêtant une oreille indiscrète. Un nom circule rapidement sur toutes les lèvres, Louie Sam, un jeune indien aperçu sur les lieux du crime, l'arme au poing. Son ami Pete l'a croisé dans les bois, alors qu'il cherchait à fuir, il avait « une lueur meurtrière dans le regard ».

Le doute n'est plus permis et tous les hommes réclament justice. Une nuit, ils organisent une expédition punitive, silhouettes masquées et visage barbouillé de charbon, pour confronter le criminel. La sentence ne se fait pas attendre, le garçon est pendu à un arbre, seul George est choqué par cette scène d'une rare violence. Les jours qui suivent le verront désemparé, car il a interdiction d'en parler à quiconque.

Pourtant, la rumeur gronde, les menaces affluent, les indiens sont mécontents et se rassemblent près du village, le gouvernement veut également faire le point sur la situation et réclame qu'on dénonce les « membres du groupe d'autodéfense ». L'ambiance à Nooksack est à couteaux tirés. Des clans se forment, font pression sur la famille Gillies, à qui on reproche une trop forte sympathie pour la cause indienne. George se débat de plus en plus avec sa conscience et pose des questions, pour s'enlever des doutes, puis pour découvrir la vérité.

À qui profitait le crime ? Le garçon est assailli de remords, les souvenirs de cette nuit terrifiante ne cessent de le hanter, George se sent coupable d'avoir suivi le troupeau en bêlant et veut se racheter. Le roman est ainsi construit comme une intrigue policière qu'on suit avec excitation, mais propose aussi une véritable réflexion sur le racisme, l'injustice et la rédemption. Tirée d'une histoire vraie, qui s'est déroulée au Canada en 1884, la lecture n'en est que plus passionnante et digne d'intérêt.

éditions Thierry Magnier, août 2014 ♦ traduit par Jean Esch (The Lynching of Louie Sam)

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13 février 2015

L'Allée du Bout du Monde, d'Isabelle Wlodarczyk

« Il m'a demandé de l'emmener au bout du monde. Au bout du monde, est-ce que je sais où c'est, moi ? »

L'Allee du Bout du Monde

Parlons peu, parlons bien : ce roman est franchement hors du commun, admirablement écrit, proposant une histoire fouillée, sur fond historique, et mêlant avec tendresse et émotion l'aventure et la passion amoureuse ! Je n'en demandais pas tant, j'ai donc été enchantée par cette découverte.

L'histoire nous transporte dans l'Angleterre du XVIIe siècle, sous Charles Ier, dont le pouvoir est contesté par les parlementaires, entraînant révolution et guerre civile. Le roi est exilé sur l'île de Wight mais envisage un retour en force. Ce chaos politique est illustré par deux familles que tout oppose, les Osborne et les Temple, et par l'histoire d'amour impossible entre leurs enfants, Dorothy et William.

C'est extraordinairement bien raconté, dans un style soutenu et précieux, dont j'apprécie la finesse et le vocabulaire recherché (par contre, de jeunes lecteurs non avertis risquent de s'y perdre). L'intrigue est romanesque, riche en complots, voyages et rencontres palpitantes. On y évoque l'enfance des personnages, leur éducation et leur parcours chamboulé par les affaires publiques. C'est dense, captivant. Plus qu'une histoire d'amour contrarié, c'est aussi un roman d'action et d'espionnage bien ficelé et surprenant jusqu'au bout ! Il y a dans ce texte de la beauté mélancolique, une touche de poésie, du sang, des larmes, des âmes damnées et des issues improbables. Car l'histoire se boucle sur une note vaporeuse (un brin fantastique) qui en frustrera plus d'un, mais qui m'a diablement séduite et comblée.

Une lecture à l'esprit romantique et torturé, qui a su faire preuve d'élégance tout en se voulant originale et intelligente.

Éditions Philomèle, octobre 2014

5 février 2015

Adam et Thomas, d' Aharon Appelfeld & Philippe Dumas

« N'aie crainte, tu connais notre forêt et tout ce qu'elle contient. »

Adam et Thomas2

Fabuleux et inclassable, ce petit roman d'Aharon Appelfeld vous séduira pour sa simplicité, sa générosité, sa tendresse et son humanité. L'histoire raconte comment deux enfants, Adam et Thomas, vont survivre seuls dans la forêt, où ils ont été “abandonnés” par leurs mamans, pour échapper aux rafles et aux enlèvements. La guerre fait rage, les familles ont éclaté, il n'y a plus d'école, plus de toit sous lequel se réfugier. La forêt offre donc aux garçons un abri, loin du monde extérieur, et on se sent divinement bien dans leur nid douillet, dans les arbres.

L'histoire ne cherche pas à fanfaronner et décrit une aventure charmante, avec deux personnages très attachants. Adam et Thomas n'ont rien en commun, l'un a grandi dans la nature, la comprend et s'y sent comme un poisson dans l'eau. L'autre, plus réservé, préfère les livres et les études, l'un croit aux rêves, l'autre aux prières. Bref, on partage leur quotidien, à se nourrir de fraises et de cerises, repérer un point d'eau, parler aux animaux, partager leurs espoirs, leurs attentes, écouter les bruits de la forêt et de la nuit...

C'est assez ordinaire, mais pas insignifiant, et forcément très touchant ! Cette lecture ressemble davantage à un conte, même si l'histoire est ancrée dans la réalité de la Seconde Guerre mondiale, il s'en dégage une ambiance surnaturelle, presque féerique. Naturellement, les illustrations de Ph. Dumas apportent une touche de poésie qui accentue cette confusion, pour notre plus grand bonheur.

École des Loisirs, mars 2014 ♦ traduit par Valérie Zenatti 

♠ élu meilleur livre jeunesse de l'année 2014 par le magazine LIRE ♠

3 février 2015

Le ciel nous appartient, de Katherine Rundell

« Sophie eut du mal à tenir en place. Elle mordilla le bout de sa natte. Elle remua les orteils en tous sens. Elle s'interdit de se ronger l'ongle du pouce, puis se désobéit. Finalement, elle avait presque rejoint le pays des songes quand trois violons, un violoncelle et un alto entrèrent en scène, escortés par leurs musiciens.
Ils se mirent à jouer, et ce fut une musique différente. Plus douce, et plus sauvage aussi. Sophie se redressa convenablement, puis s'avança tellement sur son siège qu'à peine un centimètre de son postérieur le touchait encore. C'était si beau qu'elle en avait le souffle coupé. Si la musique avait émis une lumière, pensa Sophie, alors cette musique-là aurait été éblouissante. C'était comme si toutes les voix de tous les chœurs de la ville résonnaient ensemble dans une seule et unique mélodie. Elle eut l'étrange sensation que son cœur se gonflait dans sa poitrine.
- C'est comme huit mille oiseaux, Charles ! Charles ! Tu ne trouves pas que c'est comme huit mille oiseaux ?
- Oui ! Mais chut, Sophie.
La mélodie s'accéléra, et le cœur de Sophie battit la mesure. C'était famillier et nouveau à la fois. Ça lui chatouillait les doigts et les orteils.
La fillette n'arrivait plus à tenir ses jambes tranquilles. Elle s'agenouilla sur son siège. Puis, au bout d'un moment, elle se risqua à un murmure : Charles ? Écoute ! Le violoncelle ! Il chante, Charles ! 
Quand le morceau prit fin, elle applaudit jusqu'à ce que tous les autres spectateurs aient cessé d'applaudir et jusqu'à ce que ses mains brûlent et se couvrent de taches rouges. Elle applaudit jusqu'à ce que tous les regards soient tournés vers elle, la petite fille aux cheveux de la couleur des éclairs, et dont les yeux et les souliers illuminaient toute la deuxième rangée.
Il y avait un je-ne-sais-quoi dans cette musique qui parlait à Sophie.
- J'ai l'impression, expliqua-t-elle à Charles, d'être chez moi. Tu vois ce que je veux dire ? C'est comme une bouffée d'air pur. »

Le ciel nous appartient

Sophie a survécu au naufrage d'un paquebot, après avoir été découverte dans un étui à violoncelle flottant au beau milieu de la Manche. Charles Maxim, un doux rêveur, a pris l'enfant sous son aile, lui promettant une existence harmonieuse et libre de toute contrainte. Ce ne sera pas du goût des services sociaux, qui vont établir que la demoiselle, à l'âge de 12 ans, ne peut plus partager le même toit qu'un célibataire du sexe opposé.

Charles et Sophie plient bagage pour la France où ils espèrent retrouver la trace de la mère de la jeune fille. Depuis toujours, elle est convaincue que celle-ci existe et l'attend quelque part. Charles n'a jamais prétendu le contraire, sans totalement l'encourager dans ses fantasmes. Après tout, « you should never ignore a possible » ! La suite de l'aventure est tout aussi stupéfiante, fantasque et exubérante.

Car cette lecture fait du pied à votre âme d'enfant, elle lui redonne du souffle et un formidable élan qui vous fait gravir des sommets (ceux des toits de Paris !). L'ambiance est magique, pleine de tendresse, de poésie, de fougue et d'espoir. Sophie et Charles sont deux personnages enchanteurs, elle amoureuse des livres et maladroite, lui “parlant anglais aux personnes, français aux chats et latin aux oiseaux”. Quel beau duo !

Leur cavale, menée sous le signe de l'espoir, ponctuée de jolies rencontres (Matteo et sa bande de danseurs du ciel), offre un plaisir rare d'évasion et de fraîcheur. À déguster avec un sourire béat aux lèvres. 

éditions des Grandes Personnes, août 2014 ♦ traduit par Emmanuelle Ghez (Rooftoppers) ♦  

Prix Sorcières Romans Juniors 2015

prix sorcières2015

30 janvier 2015

L'Éte où papa est devenu gay, par Endre Lund Eriksen

« Mon père ne peut quand même pas être homo
Indiane s'est renfrognée.
- C'est quoi le problème si on est homo?
J'ai essayé de lui expliquer que je ne voyais aucun inconvénient à ce que les homos soient homos ; le problème, c'était que papa le soit, parce qu'en vrai, au fond de lui, il ne l'était pas. S'il l'avait été, encore ! Admettons. Mais il avait été marié à ma mère pendant une éternité, et franchement, il n'avait vraiment rien d'une pédale. Alors là, Indiane a froncé les sourcils, l'air furibard.
- Qu'est-ce que tu veux dire exactement par « il a rien d'une pédale » ?
Impossible de lui avouer ce que j'avais en tête. Marcher en roulant du cul comme une fille. Parler mode, fringues et jardinerie d'une voix efféminée. Trottiner en faisant tout le temps des mouvements du poignet. Écouter de la musique disco et s'habiller avec des trucs en cuir moulants.
On ne pouvait pas dire que son père était comme ça. Au contraire : c'était le type le plus viril que j'aie jamais rencontré - enfin, si on exceptait le coup de la musique disco. Ça, on pouvait difficilement faire plus homo. »

L'Ete Ou Papa Est Devenu Gay

Séparé de son épouse, le père d'Arvid emprunte une caravane pour les vacances et s'installe sur le terrain près des toilettes les plus célèbres de Norvège (ambiance psychédélique, boule à facettes et musique disco). Le moral n'est pas au beau fixe, père et fils passent leur temps à bouquiner ou errer en pleine campagne sous une pluie diluvienne.

Leur quotidien s'égaye lorsqu'ils font la connaissance de Roger et sa fille Indiane. C'est une gamine délurée, qui s'amuse à titiller le garçon, coincé et bougon. Très libre et décomplexée, elle ne comprend pas la réaction du garçon lorsqu'ils surprennent l'accolade passionnée entre leurs pères. Arvid court se réfugier dans les WC, chipe le livre d'or et déverse toute sa frustration.

Ses confidences, sur le ton de la plaisanterie, font état de la trouille de l'adolescent, face à sa puberté naissante. À 13 ans, celui-ci se pose de plus en plus de questions sur la sexualité, son identité et son orientation, l'attitude de ses amis aussi le pousse à réfléchir, comme celle plutôt dégourdie de la jeune Indiane, terriblement curieuse et impatiente de dévoiler les mystères de la chose, bref tout ça plonge Arvid dans une grande perplexité.

Alors, pour oublier ce qui le contrarie en secret, le garçon prend pour cible son père et sa soudaine lubie d'une révolution sexuelle en plein été, durant leurs vacances. Arvid ne l'entend pas de cette oreille et échafaude des plans délirants pour faire capoter l'idylle florissante. Le ton général est léger, joyeux et totalement désinhibé (même le chien Waldo est pris de pulsions lubriques incontrôlables, on croit rêver !).

C'est raconté sur le ton de la blague, mais ça évoque avec beaucoup de subtilité l'adolescence, le corps qui change, les premiers troubles, les émotions contradictoires et l'homosexualité. Les romans pour ados sont encore trop timides à ce propos, donc saluons l'initiative écrite avec intelligence et un soupçon d'effronterie ! 

éd. Thierry Magnier, septembre 2014 ♦ traduit du norvégien par Aude Pasquier

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29 janvier 2015

3 femmes et un fantôme, de Roddy Doyle

« Écoute, il faut que ça cesse.
- Quoi donc doit cesser ?
- Ce truc, là, tu-ressembles-à-ta-grand-mère. Tu ressembles à ta grand-mère, tu parles comme ton grand-père, tu aboies comme le chien de ta grand-mère.
- Mary !
- Et tu as la langue aussi bien pendue qu'elle, dit Tansey. Mais c'est juste. Aucune jeunesse n'a envie qu'on lui dise qu'elle ressemble à une vieille.
- C'est pas ça du tout, dit Mary. Tout ça est stupide. 
- Mary !
- Et je ne suis pas insolente, dit Mary à Scarlett. Je ne le suis pas ! Mais c'est vraiment stupide. Genre, tu ressembles à ta grand-mère, je ressemble à la mienne. Et alors ? Ta grand-mère est un fantôme et la mienne va mourir. Et c'est la seule chose ici qui ne soit pas stupide. »

3 femmes et un fantome

Mary, douze ans, rencontre le fantôme de son arrière-grand-mère, Tansey. Morte d'une grippe à seulement vingt-cinq ans, elle ne s'est jamais consolée d'avoir abandonné sa petite fille de trois ans, Emer. Aujourd'hui celle-ci est sur son lit d'hôpital, malade et affaiblie, mais avec toujours le sens de l'humour pour accueillir chaque visite de sa petite-fille.

La présence soudaine du fantôme dans leur vie fait délier les langues. Les souvenirs remontent à la surface, chacune raconte son enfance, la rencontre de l'amour, l'espérance d'une vie longue et merveilleuse, le drame, le chagrin et la perte incommensurable. Mary n'en perd pas une miette, derrière ses airs de friponne qui rouspète tout le temps. Elle devient la dépositaire d'une histoire familiale pétrie de tendresse, de chaleur et d'abnégation.

Et c'est beau de suivre ces portraits croisés, entre mère et fille, ces récits de partage et de transmission, où retentit avec force la fibre maternelle. Roddy Doyle rend un vibrant hommage aux racines et à l'amour maternel, sans jamais sombrer dans le mélo. C'est au contraire parsemé d'humour et de sarcasme. La lecture en devient touchante, attachante, bouleversante et on a autant envie de rire que de pleurer ! Une jolie découverte.

Flammarion, coll. Tribal, septembre 2013 ♦ traduit par Marie Hermet (A Greyhound of a Girl)

« Est-ce que les fantômes boivent du thé ?
- Non, mais ce fantôme-ci aimerait beaucoup voir une tasse de thé posée devant elle. Ce serait bien plaisant. »

24 janvier 2015

L'Appel de la Forêt, de Jack London

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édition comprenant : L'Appel de la forêt - Le Fils du loup - Croc Blanc

 

Je voulais une lecture courte, histoire de m'évader vers le Grand Nord et ses contrées sauvages... 


description

 

Et puis j'ai découvert l'Appel de la forêt.

description



Buck est un gros chien, robuste, qui mène une vie de patachon, chez un juge, lorsqu'il est brusquement tiré de cette existence heureuse pour intégrer sous la contrainte un équipage de prospecteurs, qui partent vers les terres du Nord. Buck devient chien de traîneau, avec pour lot quotidien la loi du dominant, le goût du fouet et du gourdin, les longs kilomètres sous les intempéries et le dépassement de soi.

À l'instar de ses compagnons d'infortune, Buck va connaître la faim, le froid, les luttes de pouvoir, les abandons successifs, la bêtise humaine et la cruauté d'une aventure qui ne laisse place à aucune illusion. C'est triste, impitoyable... et poignant. Plus que pour la beauté de l'aventure, on admire ces bêtes au dévouement exceptionnel, qui préfèrent mourir sur piste plutôt qu'abandonner dans le déshonneur.

Au hasard d'une rencontre, Buck nouera une relation privilégiée avec un homme sensible et attentif, avant de lâcher prise pour céder à ses instincts primaires et répondre à l'Appel de la forêt (un juste retour aux sources !). Cette lecture est certes terriblement émouvante mais transmet une formidable leçon de vie, pleine d'espoir et de force. 

Folio junior, octobre 2014 pour la présente édition ♦ traduit par Frédéric Klein ♦ Illustrations de Jame's Prunier ♦ couverture : Olivier Balez

disponible également en  CD mp3, collection Écoutez Lire, texte lu par Aurélien Recoing, de la Comédie-Française

Appel de la foret

23 janvier 2015

Automne, de Jan Henrik Nielsen

Automne

Nanna et Fride vivent seules avec leur père, sur une île isolée, dans le bunker installé sous leur maison de vacances. Une épidémie a frappé la faune, la flore et la population. Il n'y a plus âme qui vive aux alentours. Un spectacle de désolation s'offre aux deux sœurs lorsqu'elles parviennent à se faufiler, pour la première fois depuis cinq ans, hors de leur cachette.

Elles doivent également se rendre en ville pour soigner leur père, qui est tombé malade. À bout de force, l'homme les encourage dans cette aventure, malgré les risques et le danger en bout de course. Elles n'ont plus le choix, traversent le lac, les bois, les routes désertées, chipent un vélo dans un centre commercial, se sustentent de boîtes de conserve, dorment dans des maisons abandonnées...

Le roman réussit un formidable exploit, en parvenant à nous tenir en haleine, sur 300 pages, en se focalisant sur l'épopée des fillettes (12 et 5 ans), livrées à un environnement hostile et inconnu. On tremble tout du long pour elles, on attend, on guette le coin de page, on se méfie du chapitre suivant. Nanna et Fride ne nous déçoivent jamais, en faisant constamment preuve de courage et de perspicacité. 

Le récit est ainsi candide et poétique mais (hélas) sans réelle action. La tension est frelatée, sans tempo, sans mesure, le temps s'écoule sans heurt. Tout est dans la suggestion. J'ai été assez surprise par l'explication finale, rocambolesque à souhait. Et par cette sensation générale de flottement. On est dans la contemplation, l'apprentissage de la vie, la complicité entre sœurs... c'est lisse, charmant, gentillet, d'une écriture simpliste, mais l'histoire manque de rythme et est un peu lente.

On trouve du charme, oui, dans ce texte sans noirceur, porté par un joli duo d'héroïnes, qui découvrent le monde avec de grands yeux ébahis. Qu'on ne se trompe pas : il est 100% accessible aux plus jeunes lecteurs.

Albin Michel jeunesse, coll. Wiz, janvier 2014 ♦ traduit du norvégien par Aude Pasquier ♦ couverture : Stian Hole

22 janvier 2015

Détectives de père en fils, de Rohan Gavin

Détectives de père en fils

Après quatre années de coma hypnotique, le brillant détective, Alan Kingsley, se réveille en sursaut, prêt à en découdre avec la Combinaison, une association du Mal qui rôde partout, à l'insu de tous. Il reprend aussitôt du service, avec l'aide de son fils Darkus qui, non seulement s'habille comme son père (en tweed) mais a appris par cœur toutes ses enquêtes pour mieux calquer son esprit de déduction. Le duo est ainsi paré pour de palpitantes aventures, à commencer par comprendre l'étrange ascendant qu'exerce un livre (« Le Code ») sur ses lecteurs. L'auteur est anonyme, son éditeur préserve son secret, même la secrétaire sort les griffes dès que le garçon fourre son nez dans leurs bureaux... L'histoire mêle habilement le mystère, le danger et l'humour, avec une belle brochette de personnages épatants (Tilly la jeune surdouée, Clive le beau-père benêt, Oncle Bill l'excentrique et bedonnant chef de Scotland Yard, Alan le narcoleptique...). Cette nouvelle série signe les prémices de rendez-vous émoustillants, qui ne manqueront pas de charmer petits et grands lecteurs (à partir de 10 ans, préconise l'éditeur... sauf que livre fait déjà 385 pages !). L'auteur a rendu hommage à ses idoles, Conan Doyle, Dickens, Ian Fleming et Roald Dahl, à travers cette lecture pleine d'entrain et estampillée « british touch » !

Gallimard jeunesse,  octobre 2014 ♦ traduit par Anne Krief

12 janvier 2015

L'Anneau du Sorcier : La Quête des héros (tome 1), de Morgan Rice

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Thorgrin, le plus jeune fils d'une fratrie de quatre garçons robustes, rêve de s'enrôler dans la Légion pour échapper à son destin de berger. À seulement quatorze ans, il fait preuve d'une détermination farouche qui lui fait rencontrer Agorn, le sorcier du Roi. Celui-ci lui prédit un grand destin et lui recommande de ne jamais renoncer à son ambition. Il lui promet d'ailleurs de veiller sur lui, dans l'ombre.

En peu de temps qu'il n'en faut, et avec un culot monstre, le garçon va parvenir à s'introduire dans l'enceinte du palais royal, devenir écuyer du plus grand chevalier et s'attirer la sympathie du fils cadet du roi. Mais ce parcours fulgurant lui attirera aussi des antipathies, en devenant la cible à abattre, si jamais le complot contre le roi ne touche pas au but. Les traîtres ont déjà tout planifié !

L'âme de cette lecture s'est fortement inspirée des légendes arthuriennes, en tentant de proposer un univers original, mais encore brouillon, qui pêche à nous embarquer totalement, du fait d'une écriture trop simpliste et d'une galerie de personnages stéréotypés. L'intrigue elle-même est peu surprenante, même si elle se laisse lire sans déplaisir, elle ne marque pas les esprits et ne fait guère preuve d'une grande imagination.

On retrouve hélas tous les clichés du genre : le héros quelconque, qui déploie des capacités extraordinaires, naturellement voué à devenir l'Élu, des rivaux jaloux, une jolie damoiselle promise à un autre, un amour contrarié, des origines inavouées, un secret plus que brumeux, des obstacles à la pelle, surmontés sans frémir, et un druide qui rappelle étrangement Merlin... bref, on a déjà lu tout ça !

Albin Michel jeunesse, novembre 2014 ♦ traduit par Hélène Bury (A Quest of Heroes, book 1 : In the Sorcerer's Ring)

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