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Chez Clarabel
rouergue jeunesse
8 février 2013

Girafe

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Au réveil la girafe est un peu en vrac, complètement démantibulée, elle tente de reprendre forme en rassemblant ses morceaux éparpillés, et là ... stupeur, ce n'est pas une girafe ! Flûte alors, c'est un bonhomme. Mais non, quelques pages plus loin, on découvre que c'est une maison. Et plus loin encore, on retombe sur une autre découverte ! 

Préparez-vous à retourner votre album dans tous les sens ! Le principe est astucieux. Jean Gourounas joue avec les formes dans le délire le plus total. (Et les petits commentaires en marge des illustrations valent aussi le coup d'œil.) Dans cette histoire, l'auteur s'amuse à décortiquer sa girafe livrée en kit et à jouer avec les formes pour montrer qu'on peut dessiner ce que l'on veut, suivant le sens que l'on a envie de donner.

C'est un joyeux bazar, un habile fourre-tout, une manière décomplexée d'approcher la maîtrise des formes et les différentes interprétations d'une construction. C'est encore plus pratique qu'un puzzle, car on peut chambouler les pièces sans que ça coince. On dénature le dessin original, mais après tout on a droit aussi de raconter plusieurs histoires ! Encore un album de Jean Gourounas qui m'enchante pour son originalité et son intelligence (après l'histoire du mille pattes).

Girafe, par Jean Gourounas (Rouergue jeunesse, 2013)

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30 janvier 2013

"La poésie, c'est quand un mot en rencontre un autre pour la première fois."

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Antonin doit écrire une poésie pour l'école, mais il ne sait pas ce qu'est la poésie. Il interroge ses parents, les réponses sont vagues, il n'est pas plus avancé. Et puis un soir, sa mère rentre blanche comme un linge, sur la route elle a percuté un chevreuil. Prise de panique, elle a mis l'animal mort dans le coffre de sa voiture ! Et pire que tout, la grand-mère va chercher ses couteaux pour dépecer la bestiole.

Alors oui, c'est particulier et ça flirte avec les limites du gore, mais on ne s'éternise pas sur la scène. Il y a toujours Antonin et sa poésie à rédiger. Toutefois, le garçon est quelque peu perturbé par cette histoire de chevreuil et le soir il commence à faire des cauchemars où le gibier viendrait le hanter en tant que fantôme. Cela commence à faire beaucoup pour cette âme sensible.

Seule issue ? Jeter sur papier toutes ses émotions, ce trop-plein qui déborde et s'apprête à l'étouffer. Ce que je vois, ce que je sens, ce que j'entends, ce dont je rêve... Antonin se lâche, il exprime à sa façon tout ce qu'il a sur le cœur, tout ce que cette sordide aventure lui inspire, avec humour et simplicité.

"Pour attraper les fantômes, il existe un piège en forme de toile d'araignée
C'est comme une poésie ça retient les poussières de vie..."

Ce roman est étrange, poétique et sensible, il parle des rêves, des fantômes et de la réalité, il aborde aussi la question de la poésie, ce qu'elle est et ce qu'elle inspire, comment elle naît et comment l'exprimer. Enfin, tout ça pour dire que ce petit roman étonne et détonne, mais finalement il m'a bien plu par sa façon d'être assez farfelu.

L'attrape-fantôme, par Alex Cousseau
Rouergue jeunesse, coll. dacodac, 2012

29 janvier 2013

Vers l'infini et au-delà !

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Eugène a une imagination débordante. Sitôt qu'il s'ennuie, il part dans des histoires qui prennent forme dans sa tête. Il devient alors le Capitaine Sans-Gêne, à bord de son navire Triton, il parcourt les mers et les océans, pour défendre les opprimés et pour anéantir les squales gigantesques, les poulpes géants, les méduses carnivores et les scaphandres zombis.

Même une partie de football avec ses copains se transforme en retransmission enflammée d'un match endiablé, qui ferait pâlir Lionel Messi. Il est comme ça, Eugène. Toujours dans la lune. La tête dans les étoiles. Des idées plein la tête. Des rêves par milliers. Même chez lui, son esprit vagabonde. Il est ailleurs, tout le temps. Il transforme son quotidien en une aventure folle et passionnante.

Le seul souci, c'est qu'il est souvent à côté de ses pompes en classe. La maîtresse n'en peut plus de le rabrouer, de lui coller des punitions, de lui remettre les pieds sur terre. Ses résultats scolaires sont passables. Et pourtant, Eugène est un garçon intelligent, mais ses parents s'inquiètent et préfèrent se rendre chez un spécialiste.

Un spécialiste qui ressemble à un singe, se dit Eugène. Aussitôt, son esprit s'évade et laisse place une autre interprétation de la réalité. C'est magique ! C'est un véritable pouvoir que possède ce garçon. Heureusement le médecin va rassurer tout le monde, en soulignant bien que Eugène est un garçon tout à fait capable. Son truc, pour le moment, c'est d'avoir besoin d'être ailleurs et de pouvoir le faire. Pourquoi l'en priver ?

Alors les histoires d'Eugène peuvent reprendre de plus belle, des histoires avec Naruto, Harry Potter, Jack Sparrow, ou même James Bond, Spider-Man et les chevaliers du Jedi. Nul n'arrive à sa cheville, bien entendu. Et c'est ce qui rend ce petit texte drôle, enlevé, déjanté et pertinent. A lire, pour se rassurer d'avoir un esprit trop rêveur.

Je sauve le monde dès que je m'ennuie, par Guillaume Guéraud - illustrations de Martin Romero
Rouergue jeunesse, coll. ZigZag, 2012

29 janvier 2013

Vivre d'espoir

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Ce n'est pas drôle d'avoir des parents qui s'aiment et vivent sous le même toit. Ce n'est pas drôle, car la vie est alors tout ce qu'il y a de plus ordinaire ! Quelle plaie. Louis, qui peine à finir son devoir d'espagnol, a l'esprit qui vagabonde. C'est ainsi qu'il décide de mettre tout en œuvre pour provoquer un divorce entre ses parents, ce serait selon lui pour mieux stimuler l'éveil de sa sœur et lui.

Mais ni celle-ci, ni sa grand-mère ne trouvent l'idée réjouissante. Pourtant, Louis a tout organisé dans sa tête. Il s'est inspiré du modèle de son pote, Roméo, dont la mère brésilienne et le père américain sont séparés mais entretiennent de bonnes relations, et font du quotidien de Roméo une vraie partie de rigolade.

Donc, Louis focalise toute son attention sur l'anniversaire de sa mère. Quarante ans, l'heure du renouveau. Son plan consiste à inviter la maman de Roméo, pour qu'elle tombe amoureuse de son père, et pour sa mère, Louis a envisagé d'inviter un vieil ami d'enfance. L'invité surprise, ce serait ... Benjamin Biolay. Eh oui.

Viendra, viendra pas ? La soirée finira-t-elle en apothéose, ou sera-t-elle un désastre annoncé ? Louis est jeune, inconscient, fou, spontané, irréfléchi. Il est à un âge où il pense que c'est toujours mieux ailleurs et où il n'est jamais satisfait de ce qu'il a. C'est le deuxième roman que je lis sur ce sujet, où les enfants pestent d'avoir des parents encore mariés et qui s'aiment, alors que tous les copains sont des enfants du divorce (cf. Marre de l'amour de Maud Lethielleux). C'est bien aussi, d'avoir une histoire un peu loufoque et qui traite de ce sujet avec dérision. C'est drôle, c'est tendre, ça parle du bonheur et c'est extrêmement sympathique.

L'invité surprise, par Géraldine Barbe
Rouergue jeunesse, coll. dacodac, 2013

22 novembre 2012

L'histoire du soir #22 : Monsieur 2D, par Bruno Heitz

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Un bonhomme, découpé dans du papier, se plaignait de sa triste condition.
- Je ne suis qu'en deux dimensions ; rien qu'un pauvre 2D. Je me sens tout raplaplat.

Cet album est génial ! De prime abord, il est tout gris, la mine un peu tristoune, il ne fait pas spontanément envie, et pourtant ... l'histoire est étonnante, faite de photographies en noir et blanc, elle raconte l'aventure d'un bonhomme découpé dans une feuille de papier qui se plaint de sa condition en deux dimensions, et qui voudrait plonger dans l'univers inconnu, mais tellement palpitant, du 3D !

C'est ainsi qu'un accordéon se transforme en escalier, notre bon monsieur découvre un nouveau monde, se glisse dans un livre pour plonger au coeur d'une péripétie, il est bientôt mis k-o par un livre pop-up, puis rencontre une grenouille faite d'une ticket de métro et même une vache snobinarde (non, elle ne sort pas d'un trou de papier), qui rue dans les brancards.

La fin elle-même est désopilante (il est fort ce Monsieur 2D pour faire du plat !). En somme, cet album est une merveille d'ingéniosité, de découpages et de jeux de mots. Bruno Heitz montre qu'avec un peu d'imagination et un bout de papier, on peut inventer de folles histoires qui ont du volume sans la haute technologie. Cocasse et grisant, j'adore ! 

Monsieur 2D, par Bruno Heitz (Rouergue jeunesse, 2012)

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17 octobre 2012

Vous en faites pas les gars, Moi aussi on m'a dit ça - Fais pas ci fais pas ça - Et j'en suis arrivé là !

On va souffler un peu, après toutes ces émotions... place à la détente ! 

Je vous présente donc la famille Pompon,    lafamillepompon

Monsieur et madame Pompon sont à la tête d'une tribu de six enfants. Tous les matins, c'est souvent la course pour se rendre à l'école. Il faut se hâter pour ne pas louper le bus, courir, trouver sa place, avaler un bout de pain parce qu'on a zappé le petit déjeuner, suivre les oiseaux, se donner rendez-vous près de la voiture du facteur, trouver porte close, se consoler en défilant pour le carnaval du quartier. C'est qu'on ne s'ennuie pas du tout avec cette joyeuse famille !

Mais cet album a un pouvoir secret, puisqu'il a pour mission de guider les enfants à travers un circuit composé de couleurs, qu'il faut reconnaître en guettant les indices, qu'on s'amuse aussi à suivre les petites flèches, à se faufiler entre les voitures ou les passagers du bus, à compter les lettres ou papillonner de bonheur dans un nuage de confettis, on teste, on cherche, on trouve. En somme, c'est ludique ET éducatif. J'adore le principe, on se prête au jeu à n'importe quel âge (c'est vous dire !).

Gros coup de coeur aussi pour les illustrations, les couleurs sont gaies, les petits chats sont adorables, c'est fouillé, complet, débordant de joie et de dynamisme. Avec aussi une couverture en carton-mousse pour le côté douillet et des pages cartonnées idéales pour affronter les épreuves, vous obtenez un chouette album qui fait partie d'une collection comprenant deux autres titres déjà (La famille Pompon part en pique-nique / fait des courses). 

par Gwendoline Raisson - illustrations de Nicolas Gouny (Belin jeunesse, 2012)

Et parce que cette autre histoire me faisait de l'oeil, en rapport avec une sacrée Georgette qui a marqué mon été ! voici Superfuret Superfuret

Eh oui, le vrai héros de cette histoire est un furet ! Mouche n'est pas une bestiole comme les autres, il ne sent pas la rose mais il est très intelligent, en plus il aime les glaces à la fraise. Noémie a dix ans et veut démasquer le voleur de sa classe (il pique tout et n'importe quoi, c'est usant à la fin !). Alors elle se rend à l'école avec Mouche dans son cartable et compte sur la récré pour laisser l'animal farfouiller du mieux qu'il peut. Un petit génie, vous dis-je. Il va alors désigner le fautif ... en la personne d'un garçon ordinaire, d'apparence gentil et inoffensif. Pour en avoir le coeur net, Noémie et ses deux copines se glissent dans la maison du garçon et trouvent des indices (et d'autres choses encore, pas bien jolies, mais ceci est une autre histoire que vous découvrirez si vous lisez ce roman, hé hé ! ). 

Un suspense à trois francs six sous, une belle énergie, des personnages qui en veulent et n'hésitent pas à s'impliquer pour réclamer justice, une belle-mère horrible, sans oublier notre Superfuret beaucoup plus futé que la super Georgette de ma connaissance (ha ! ha !)... une petite lecture sympathique, introduisant deux nouvelles plumes, d'où ma curiosité aussi. 

par Elisa Vix - illustrations de Chiara Dattola (Rouergue jeunesse, coll. Zig Zag, 2012)

16 octobre 2012

Qui a dit que les bisous, c'est pour les bébés ?

Après un lundi rouge passion, on fait chuter la pression avec des petites lectures dont le sujet a su toucher ma corde sensible.

à Bas les bisous ! Abaslesbisous

Kaï est un petit garçon de neuf ans qui ne supporte plus qu'on l'embrasse. Le jour de son anniversaire, il tend la main à sa famille et déclare qu'on doit le traiter comme un grand et cesser de lui donner des bisous. C'est insupportable, à la fin ! Ses parents sont chiffonnés et voudraient comprendre cette grève du bisou. Au lieu de s'en formaliser, ils vont patienter le temps qu'ils estiment que doit durer cette crise. Seul le grand-père, qui n'a plus toute sa tête, ne se gêne pas pour poser un baiser baveux sur la joue de son petit-fils. Qu'on ne s'avise pas de lui donner des ordres non plus !

C'est finalement dans la cour de l'école que Kaï va réfléchir à ce qu'il inflige à ses proches. Par la faute du nouvel élève, prénommé Pascal. Celui-ci est tout le temps seul dans son coin. Une fois, Kaï a même vu qu'il pleurnichait en silence. En creusant bien, il découvre que le garçon ne se console pas de la mort de son papi. Kaï va alors décoller du sol, en pensée. Il va être frappé par l'inspiration : soudain, il comprend qu'avoir envie de faire des bisous, ce n'est pas réservé aux bébés. C'est donner aux autres de l'amour, du réconfort, faire preuve d'amitié, de sensibilité etc.

Un petit roman tout doux et apaisant, où l'on évoque avec pudeur le chagrin des enfants après la perte d'un être cher. Tellement juste, tellement vrai. Avec pour héros un petit garçon aux idées farfelues et à l'imagination débordante (il suffit de découvrir ses jeux de récréation, c'est un bonheur !). 

par Thomas Gornet & illustrations d'Aurore Petit (Rouergue jeunesse, coll. Zig Zag, 2012)

Ceci m'amenant à évoquer le très bouleversant Où es-tu, Lulu ?  Ouestululu

Un matin, Théo découvre l'absence de son ami Lulu. Son maîtresse, avec les larmes aux yeux, lui apprend que son ami a eu un accident et qu'il ne reviendra plus. L'enfant est accablé pour le chagrin, les questions et l'incompréhension. Ses parents eux-mêmes se sentent impuissants pour le consoler. Ils murmurent des phrases maladroites : C'est comme ça, la vie. Ou il y a des jours où le ciel perd ses couleurs. C'est tellement plus facile de raconter des histoires pour s'évader. 

Et puis, le temps passe. A petits pas, Théo avance sur son chemin. Le chagrin s'estompe ou s'apprivoise. Théo a grandi avec. Il sait maintenant qu'il y aura des jours de chagrin, des jours de fête, des jours de doute. Le souvenir de son ami restera intact, présent dans un coquillage, une bille ou un marronnier. 

Que n'aurais-je pas donné, deux ans plus tôt, pour avoir cet album entre les mains ! A l'époque, ma fille a perdu une copine d'école dans des circonstances tragiques. Après le choc, l'immense chagrin et l'incompréhension. Un chagrin multicolore tant l'éventail des émotions était grand. En lisant cet ouvrage, j'y ai instinctivement repensé. C'est là, en nous, toujours. Parce qu'elle aussi a été frappée par un drame personnel, Laurence Pérouème livre des mots justes et sensibles pour évoquer la mort et accompagner l'enfant et les parents qui y sont confrontés à surmonter ces instants difficiles. Une lecture précieuse, encadrée par des illustrations lumineuses.

par Laurence Pérouème et Cécile Rescan (naïve, 2012)

8 octobre 2012

Just a little bit more !

  • Un courant d'air   uncourantdair

Superbe album ! Il ne se raconte pas. Il s'admire. On l'ouvre comme un accordéon. Le fil invible est interminable. C'est l'histoire d'un courant d'air, dont l'interprétation peut surprendre. Chaque page est une surprise et une interrogation. C'est à la fois poétique, étrange et contemplatif. A considérer sous toutes les coutures, pour les esprits rêveurs.

Juliette Binet est également l'auteur de L'Horizon Facétieux chez Gallimard (couverture bleu ciel) et du Cousin chez Albin Michel. Un auteur à découvrir absolument.

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par Juliette Binet (éditions du Rouergue, 2012)

  

  • Camion Toc Toc   camiontoctoc

Le camion toc toc débute sa tournée en transportant 49 cartons. En y prêtant bien attention, on peut lire le message suivant : " regarde ce petit camion rouge qui file à toute vitesse ". Au fil des pages / de la course, le camion perd sa cargaison et sème des petits cartons partout où il passe. A leur tour, ces colis perdus composent en rapport avec l'histoire supposée (" feu, gendarme, stop, tête-à-queue"). De fil en aiguille, le camion se vide... A l'arrivée, un seul colis restera. Une seule lettre. Pile pour l'instant T !

J'ai adoré l'humour et le bon esprit de ce livre. C'est une lecture qui surprend et enchante. Une très belle découverte.

par Olivier Douzou (Rouergue, 2012)

12 septembre 2012

"On ne fait pas du rock avec de la technique, on fait du rock avec des tripes."

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Suite à son rendez-vous loupé à Londres, Max s'est donc replié en banlieue parisienne, chez son tonton, avec qui le projet complètement fou de monter un groupe de rock va voir le jour. A partir de là, Max ne peut plus reculer et doit rassembler les troupes - l'occasion de susciter des vocations, de permettre des rencontres et de tester ses limites !
Le résultat est jubilatoire, la prose de Max est toujours aussi ironique, le jeune homme se gausse de ses talents et de ses connaissances en matière artistique, croyez-le ou non, mais son attitude de snob lui va comme un gant et n'est pas du tout usurpée. Ce serait même un crime de lui contester son titre. Et puis ses goûts sont sûrs, que voulez-vous, un garçon de dix-sept, dix-huit ans qui ne se retrouve pas dans sa génération et qui flingue (verbalement) tout ce qui bouge, moi je dis qu'il en faut du culot, ou de l'inconscience, allez choisir. 
J'aime la verve de Max, j'aime quand il évoque son amour de la musique, j'aime quand il s'embrase, j'aime quand il se prend la tête, j'aime aussi ses délires entre potes (le coup des pernos, je lui tends mon pouce levé !), j'aime moins sa passion amoureuse, parce qu'elle n'est plus nouvelle et souvent je me lasse, d'ailleurs je trouve aussi que le roman est victime de quelques longueurs, mais c'était le risque, trois saisons plus tard.  
J'aime les aventures de Max, ses délires, son sens de la dérision et de la formule, son excentricité, sa frénésie créative et musicale, ses révélations, ses déconfitures aussi (hiii... Natacha, que fais-tu là ?!), j'aime ses potes, en tête Sa Kévinerie et aussi Stéphane, le p'tit nouveau qui n'est pas si nouveau non plus, j'aime la grand-mère de Max qui fait si bien les crêpes, et j'aime quand les romans d'aujourd'hui savent proposer des choses simples, rigolotes et actuelles sans forcément céder aux appels des sirènes ni nous plomber le moral. 

Comment devenir une rock star (ou pas), par Anne Percin
Rouergue jeunesse, 2012

"- Dites-moi juste un truc : Ma Dalton, qui m'a ouvert... Elle joue avec vous ?
- Non, elle fait des crêpes.
- Ah, c'est bien aussi. C'est important, les crêpes, quand on répète."

6 juillet 2012

Noir grand : extrait

J'ai appris la langue d'ici, avec l'accent et les expressions comme tout le monde. J'ai même appris des mots de patois pour discuter avec les vieux quand on pêche. J'ai même appris à pêcher.  A danser et à chanter comme ici, la main sur le coeur, les yeux levés vers le ciel. J'ai appris à détester ceux du village à côté, parce qu'ils ne sont pas d'ici. Et ici, c'est toujours mieux qu'à côté.

Mais un Noir qui parle avec l'accent, c'est bizarre.
Un Noir qui pêche avec les vieux, c'est louche.
Et puis de toute façon, un Noir, ça va pas dans le paysage.

Alors tout le monde a commencé à m'ignorer, à m'éviter, à fermer les portes quand je passais.
Parce qu'un Noir qui passe, c'est un malheur qui tombe. C'est un voleur qui rôle, une maladie qui traîne.
Et si les pommes du pommier disparaissaient, c'était forcément dans ma poche.

Petit à petit, je suis devenu trop noir, trop grand, trop vite.
Tout le monde m'appelait Chocolat. Et je les appelais Vanille. Alors ils m'appelaient Tête de Nègre et je les appelais Faces de Fromages. Alors ils m'appelaient Tais-Toi et je les appelais Pourquoi. Je rigolais, pour moi c'était comme un jeu entre nous.
Mais en grandissant, ils ont appris à dire d'autres mots, plus gros, plus gras, plus forts. Ils ont appris à se battre aussi, et à tailler des flèches.
Tout à coup, le jeu faisait mal. 

Et j'étais toujours aussi seul, avec mon père et ma mère qui croient que le monde est beau et les enfants gentils. Je me suis enfermé dans ma peau, dans le noir. J'ai fermé les volets, tiré les rideaux, éteint la lumière. Je voulais voir personne.
Mes parents savaient pas comment faire avec moi. Ma mère essayait de me parler, mais je courais dans ma chambre. Mon père voulait me lire l'histoire d'un petit Noir dans une famille blanche, mais je me bouchais les oreilles.

A l'école aussi j'écoutais rien. Je voulais pas savoir l'histoire du pays d'ici, ni la grammaire, ni les noms des villes ou des fleuves. Je voulais qu'on me laisse tranquille, qu'on m'oublie. Je me collais au mur du fond et j'essayais de disparaître dedans. 
Mais dans l'école minuscule de mon village tout petit, un Noir, ça se voit tout de suite.
Il aurait fallu prendre la couleur des poules, ou la forme d'une vache. Il aurait fallu rester immobile comme un arbre.

Alors je suis plus allé à l'école, je partais dans les champs, dans les forêts. Je posais mon cartable et je me promenai toute la journée au milieu des oiseaux et des fleurs. 
J'étais bien, là.  J'avais la paix. Les oiseaux, il y en a des noirs.

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Un court récit qui décrit la contradiction des sentiments d'un garçon adopté.  Un texte porté par les illustrations de Daniela Tieni qui soulignent la langue singulière et poétique de Sébastien Joanniez. Un ouvrage  remarquable.

Noir grand, par Sébastien Joanniez & illustrations de Daniela Tieni
Rouergue, coll. dacodac, 2012

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