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Chez Clarabel
14 avril 2017

Les Petites Reines, de Clémentine Beauvais & lu par Rachel Arditi

les petites reines« L'idée est née comme ça dans mon esprit, un soir de concours de Boudins.
Prendre la route pour Paris...
Arriver pile le 14 juillet...
Et gate-crasher la garden-party de l'Élysée. »

Mireille, Astrid et Hakima sont les trois boudins de leur école. Elles doivent ce titre peu honorifique à un concours organisé sur Facebook par l'ami d'enfance de Mireille - Malo, le malotru. Habituée à caracoler dans les hauteurs du classement, l'adolescente en a pris son parti en adoptant une posture sarcastique, mais a tout de même la rage au corps de supporter les railleries incessantes sur son physique, ça et l'absence de son géniteur, qui ne répond jamais à ses courriers, parce que monsieur est l'époux de l'actuelle présidente de la République, c'en est trop pour Mireille qui réunit ses troupes pour prendre d'assaut la capitale, ses flonflons et ses sourires en façade. Astrid, Hakima et elle veulent corriger le préjudice, chacune portant en flambeau sa propre réclamation (le frère d'Hakima, ancien militaire, a été blessé en mission et se sent sali par l'indifférence du général reçu en grande pompe à l'Élysée, de son côté Astrid veut réaliser son rêve en rencontrant en vrai son groupe favori, Indochine). Cela vous place l'ambiance, le ton, l'humour, la légèreté de l'histoire. Celle-ci révèle aussi la violence des cours de récré, les bons codes, les bons looks à adopter, sous peine de lapidation en place publique. Aujourd'hui, des anonymes se défoulent derrière leur écran pour blesser, juger, condamner. Et c'est parfois plus tranchant de l'exprimer avec emphase qu'à travers des piques bêtifiantes. Mais nos trois lauréates sont au-dessus de la mêlée et volent sur leurs bécanes depuis Bourg-en-Bresse jusqu'à Paris. Quel périple ! Les filles feront aussi l'étrange expérience de la notoriété, deviendront célèbres en tant que nouveaux symboles d'une adolescence qui s'affranchit de l'image formatée par une société en quête de perfection. C'est fort, c'est fou, c'est drôle. Aurais-je autant apprécié cette lecture sans sa version audio ? Oui, nul doute, mais je dois avouer avoir adoré l'interprétation de Rachel Arditi, ainsi que la réalisation sonore de ce disque. Cela met en valeur le roman de Clémentine Beauvais, celui lui donne une pêche, une énergie et un grain de folie qui rend son écoute très, très appréciable. J'étais déçue d'arriver au bout de mes 6 heures, je me sentais merveilleusement bien en compagnie des Boudins et du Soleil. Bravo à Audiolib qui crée enfin sa collection jeunesse, avec ce titre qui dégage une telle fraîcheur et un bonheur de lecture !  

Audiolib, 2017 - Texte lu par Rachel Arditi (durée : 6h) ©2015 Éditions Sarbacane 

Prix Sorcières, Prix Lire - Meilleur livre jeunesse, Prix NRP de Littérature jeunesse, Prix Millepages.

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5 avril 2017

Pêle-Mêle : Émile fait l'enterrement / Mon fils de Vincent Cuvellier

EMILE

Aujourd'hui est un grand jour pour Émile, un jour grave. Car Émile va à l'enterrement. Un vrai. C'est sa vieille copine qui lui a proposé de l'accompagner à cette cérémonie funeste, ce qui questionne naturellement la maman d'Émile, mais celle-ci n'a pas voix au chapitre. Son fils revêt son beau pull noir, prend un air triste et solennel, puis file avec sa copine la vieille dame jusqu'à l'église.

Émile écoute alors le discours pontifiant du religieux, blablabla, Madame Vacher, blablabla, née Mouton, blablabla, vivant rue Gustave Poulet. Et là, notre Émile découvre un aspect tout à fait cocasse du recueillement, car sa vieille copine va dévoiler au garçon le secret d'un bel enterrement. Se moquer d'un rien, tout en demeurant stoïque. Émile est drôlement fier d'avoir partagé une telle expérience. C'était pas trop triste, comme enterrement ? demande maman. Meuh... non ! ;-p

Dans la série Émile, je demande un épisode faussement compassé, mais tout à fait respectable, qui évoque un moment de vie douloureux (l'enterrement) qu'on évite souvent de partager avec les enfants, sauf quand on s'appelle Émile ! Ah, qu'est-ce que c'est bon. Cette figure du flegme imperturbable est pour moi synonyme de lecture affolante de dérision et d'allégresse. Un vrai régal. Les amateurs d'humour décalé apprécieront ! ♥

Émile fait l'enterrement, de Vincent Cuvellier & Ronan Badel

Gallimard Jeunesse Giboulées, 2017

 

Mon fils

Dans cet album dédié à son fils, Vincent Cuvellier dévoile un aspect plus intimiste de son talent. Et c'est drôlement bon aussi ! “Mon fils, c'est mon fils.” Tel est son credo.  “Je le connais depuis qu'il est né, et peut-être même avant, c'est dire. Je le connais tellement qu'on dirait que c'est moi qui l'ai fait.” Il raconte alors le jour de la naissance de son fils, sa première rencontre avec ce petit être qui va bouleverser sa vie, leur premier tête-à-tête dans les couloirs de la maternité, les premiers mots doux, les chansons murmurées, le premier grain de beauté, le choix du prénom, la paire de ciseaux pour couper le cordon, l'aventure de la vie qui roule, les vacances à la mer, les lectures du soir, les histoires qu'on invente exprès pour épater son enfant, les commentaires de celui-ci qui trouve, en grandissant, que papa n'écrit pas de super bouquins, les peurs nocturnes, les rêves en grand, les copains de tous les horizons, les séparations, les moments de complicité, les blagues, les combines, les disques de Bowie... Tout ça, tout ça. C'est beau, c'est court, ce sont des instantanés d'une relation faite de tendresse, d'amour et de contemplation. C'est minimaliste, et en même temps ça communique un vaste champ d'émotions qui vous touchent droit au cœur. C'est un bel album, poétique et attendrissant. 

Mon fils, de Vincent Cuvellier & Delphine Perret

Gallimard Jeunesse Giboulées, 2017

 

27 mars 2017

Entre ciel et Lou, de Lorraine Fouchet

EN POCHE ! 

entre ciel et lou

Lou vient de mourir. Sa santé vacillante et ses pertes de mémoire avaient finalement conduit son époux Jo à la placer dans une maison spécialisée, à seulement cinquante-huit ans. Trop jeune pour être écartée, trop jeune pour s'éclipser. Leurs enfants, Cyrian et Sarah, n'ont jamais compris le choix de leur père et continuent de lui en tenir rigueur. La lecture du testament va d'ailleurs consolider leurs reproches, alors que le notaire énonce à voix haute que Jo aurait “trahi” Lou. La suite du document est cependant confidentielle, les enfants sont priés de quitter l'office, non sans une certaine amertume. Très déçus par leur père, ils imaginent une tromperie impardonnable et repartent le cœur lourd. 

Seulement, Lou a confié à son mari la délicate tâche de rendre leurs enfants heureux. Elle a été une épouse comblée, une mère épanouie, mais hélas Cyrian et Sarah n'ont pas hérité leur droit au bonheur. C'est au tour de Jo de rectifier le tir, en toute discrétion. Cette mission n'enchante guère notre veuf éploré, depuis longtemps ses enfants et lui ont vécu des vies parallèles. Cyrian mène une existence bourgeoise, complètement éteinte, et se tient à distance de Groix, où il prétend ne pas y trouver sa place. Sarah est tétanisée par son handicap et sa maladie, au point de renoncer à l'amour en ne s'attachant à personne. 

Comment consoler cette famille cabossée par les aléas de la vie, la réconcilier avec la notion de famille, synonyme de valeur sûre et d'entraide, quand il n'y en a jamais été question, ou seulement pour sauver les apparences, et pour soutenir la mater familias ? J'ai finalement été agréablement surprise par cette belle histoire d'une famille qui va droit dans le mur, complètement paralysée par ses émotions, et qui a trop l'habitude de conserver pour elle ses vérités, en contenant aussi ses élans affectifs. Et puis il y a le cadre de l'île de Groix, véritable pivot de l'intrigue, et surtout un appel du pied pour y déposer ses bagages. C'est un cocon hors du temps, un refuge bienveillant, avec des personnages attachants (Maëlle, sa petite Pomme, les copains de banquet, où l'on se rappelle entre rires et larmes que Lou était une piètre cuisinière...). Soudain les chagrins et les peines vous semblent moins lourds, moins insurmontables. On guérit de tout, à Groix ! 

Cette lecture a eu l'effet d'une bulle et a su m'envelopper tout naturellement. Je m'y suis sentie tellement bien. Parfaitement à mon aise. J'étais prête pour suivre l'histoire de Jo, face au nouveau challenge de sa vie, un défi pour le forcer à ne pas couler à pic non plus, car notre homme est vraiment très, très triste d'avoir perdu son alter ego. Pour s'accrocher à la vie, il se tourne vers ses enfants qu'il ne comprend plus. Au départ, il est un peu pataud dans ses tentatives de “colmatage”, et puis au fil du temps ses stratagèmes vont prendre forme et approcher le rêve inaccessible. C'est vraiment une chouette lecture, qui envoie de bonnes ondes et qui fait se sentir #heureux. C'est simple, charmant et riche en émotions. Un beau et bon roman, à déguster! 

Le Livre de Poche - mars 2017

En bonus : une recette et une postface inédites.

27 mars 2017

Meilleurs ennemis, de Sally Thorne

« Tout ce que nous faisons, Joshua et moi, obéit toujours à la loi du Talion. Œil pour œil, dent pour dent. Nous ne connaissons que ça. »

Meilleurs ennemis

Collègues dans la maison d'édition qui vient de fusionner, Lucinda Hutton et Joshua Templeton travaillent leurs antagonismes en se livrant une véritable guerre froide à force de regards impénétrables, de répliques piquantes et d'allusions sournoises. Mais la tension monte d'un cran depuis qu'ils se savent en compétition pour le même poste. Lucy et Joshua affûtent leurs armes, quand soudain celui-ci manifeste étrangement un certain penchant pour sa collègue. Baiser fougueux volé dans l'ascenseur, crise de jalousie, attitude possessive et/ou protectrice... Les signaux envoyés sont totalement perturbés, ET perturbants. Lucy perd ses repères, découvre la face soigneusement cachée de Josh, sent ses sens fondre comme beurre au soleil, devient complètement obsédée... sans perdre de vue qu'il s'agit peut-être d'une technique habile pour prendre le dessus et lui voler sa promotion. Jeux de dupe, attirance fatale et numéros de charme viennent donc troubler une relation largement placée sous le signe du “je t'aime moi non plus” !

Comment ne pas sourire béatement à la lecture de cette jolie comédie éclaboussée d'humour, de séduction et de tendresse ! J'ai totalement succombé. Le couple de Lucy et Josh est affolant de quiproquo, d'interdit et d'enchantement. Le combo parfait. Chaque interaction est explosive, mais laisse place à une subtile attirance qui rend l'alchimie éclatante. Les codes de la romance sont déclinés dans la plus pure tradition, tout en étant moderne, pétillante et enlevée. Il faut, par contre, fermer les yeux sur l'attitude déjantée et incohérente de Lucy, un minuscule bout de femme qui adore porter du rouge à lèvres couleur lance-flammes, qui souffre de solitude, qui est nostalgique de son enfance parmi les champs de fraises et qui refoule son ambition par peur de se lancer tout de go. Dès lors qu'elle est en présence de Josh, c'est plus fort qu'elle, elle pète les plombs et lui fait du rentre-dedans, tout en admettant in petto être franchement pathétique. Face à elle, Joshua est en mode “control freak”, stoïque et insondable, il réussit à attiser son désir en cultivant le mystère (“mais pourquoi s'impose-t-il la frustration de séances de préliminaires dignes d'adolescents avec sa collègue un peu bizarre ?”). Ce jeu du chat et de la souris peut friser l'absurde, mais génère de fabuleuses scènes qui m'ont fait honteusement glousser. J'avoue, ce roman a été un rendez-vous déculpabilisant, frais, drôle, décalé. Il réunit clairement tout ce que j'aime, de l'humour, de l'humour et encore de l'humour. C'est sans conteste une comédie pur jus, à déguster pour le plaisir de rire et s'évader. Et ça fait toujours du bien.

Harlequin, coll. & H - Trad. Charlotte Demanie [The Hating Game] - 2016 

24 mars 2017

Pas celle que tu crois, de Mhairi McFarlane

Pas celle que tu croisInvitée au mariage de ses collègues, Jack et Charlotte, Edie est surprise en train d'embrasser le marié par sa propre épouse. Le scandale ! N'osant pas se disculper, la jeune femme se carapate en douce jusqu'à sa chambre, avant de prendre un taxi aux aurores pour se réfugier chez son père, à Birmingham. Edie a décroché un nouveau contrat avec son agence et doit rencontrer une vedette locale pour rédiger ses mémoires. Loin du chaos, loin de la haine, notre héroïne pense avoir trouvé un bref sursis, mais c'est sans compter sur l'acrimonie vindicative de sa sœur Meg, ainsi que sur l'accueil peu amène de l'acteur Eliott Owen. Celui-ci n'a clairement pas envie de jouer le jeu des confidences et donne du fil à retordre à la jeune femme, exaspérée par cette accumulation de petites bassesses qui font déborder la coupe. Trop, c'est trop. Il est temps de remettre de l'ordre dans sa vie !

Cette lecture a été une douce et agréable surprise, un rendez-vous de gaieté, de tendresse et de lucidité. On y trouve évidemment tous les ingrédients pour réussir une bonne comédie romantique (personnages attachants et intrigue savoureuse), mais on partage aussi une belle aventure humaine, parsemée de chemins entortillés, avec des déceptions et désillusions en pagaille, ainsi que des petites perles salvatrices qui rappellent qu'aucun malheur n'est totalement invincible. Autre bon point, l'histoire ne se focalise pas sur la romance et propose une approche autrement plus subtile et raffinée. Alléluia. Edie a 35 ans et fonctionne moins à l'instinct et plus dans l'affect. Cela tient du miracle de rencontrer une héroïne qui ne grille pas ses neurones dès qu'entre en orbite un spécimen mâle affolant de sexytude. Pour ça, et pour la délicatesse, l'authenticité, l'humour et l'émotion, je dis OUI à ce roman, simple, distrayant, hyper touchant. La parfaite petite bulle de lecture, pétillante et légère. ♥

Harlequin, coll. & H - Trad. Nolwenn Guilloud [Who's That Girl?] - 2016 

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22 mars 2017

Verte, de Marie Desplechin & Magali Le Huche

VerteQui ne connaît pas Verte, cette adorable fillette, héritière malgré elle d'une longue lignée de sorcières ? C'est l'une des séries pour la jeunesse les plus drôles, les plus pertinentes et les plus originales. N'attendez plus. Cette fois, Magali Le Huche a allié son talent, sa fraîcheur et sa tendresse pour adapter l'histoire en une bande dessinée tout aussi réussie. J'ai été comblée en apprenant cette nouvelle association et le résultat m'a grandement enchantée. ☺

L'histoire, donc, raconte comment une fillette de 11 ans a choisi de refuser d'entendre parler de lignée, de patrimoine, de succession et de leçon. La sorcellerie ? Très peu pour elle, merci. Sa mère Ursule est dépitée et convoque la grand-mère Anastabotte pour prendre la relève. Chaque mercredi, Verte se rend chez elle pour s'initier aux douces subtilités des sortilèges et des incantations. La fillette fait la moue, à la place elle souhaiterait qu'on lui explique pourquoi toutes les filles de son école sont folles de Soufi et pourquoi ce garçon lui donne un peu le tournis dans le ventre... Qu'à cela ne tienne, sa grand-mère convie le garçon à la maison pour partager le goûter. Quel embarras pour Verte, qui est pourtant ravie de découvrir un nouveau copain, drôle, sympa et fiable. Il est néanmoins convaincu d'avoir déjà croisé la jeune fille quelque part, en vacances, en colo ou à Bure-les-Templiers... tant son visage lui est bizarrement familier ! Tout à son apprentissage de sorcellerie, Verte continue de révolutionner son monde en invoquant un sort inattendu... pour retrouver son père ! Ursule et ses petits secrets n'ont qu'à bien se tenir. 

Quelle lecture exquise, fabuleuse et drôle. L'univers de Marie Desplechin vu par Magali Le Huche est décidément en parfaite osmose ! J'ai beaucoup aimé son imaginaire, son trait d'humour, ses couleurs et son ambiance fantasque dans une bulle hors du temps. L'harmonie parfaite. ♥

Rue de Sèvres - mars 2017

« Alors, comment s'est passée ta semaine, ma chérie ?
- Comme il était inquiet, j'ai dû raconter à Soufi nos histoires de sorcières...
- Tu es inconsciente ! Maintenant il va aller raconter ton histoire partout. Et les ennuis vont commencer. Pendant des siècles, c'est à cause de bavardes comme toi qu les sorcières ont été brûlées sur la place publique.
- Il a juré qu'il ne dirait rien.
- La belle affaire ! C'est parce que les gens ne croient plus aux sorcières qu'ils ne les brûlent plus. S'ils veulent faire du mal à leurs voisins, ils tombent plutôt sur les étrangers !
- D'abord il est étranger, lui aussi.
Sa famille vient de Bretagne.»

9 mars 2017

Tout pour se déplaire, de Jen Klein

Tout pour se déplaireChic, encore une lecture qui met en joie et de bonne humeur ! Le roman de Jen Klein a pour lui de nous embarquer dans son histoire sans prétention, mais où les sentiments sont vrais, sincères et spontanés, en plus d'avoir une bande-son à la fois tonitruante et dégoulinante de guimauve... N'en jetez plus, l'aventure s'annonce piquante, drôle et savoureuse !

Parce que leurs mères sont copines de fac et ont conclu ensemble un accord pour leurs enfants, sans même leur demander leur avis, June et Oliver font donc route tous les matins pour se rendre au lycée. La jeune fille appréhende cette intimité forcée car elle imagine un garçon fidèle aux archétypes du genre sportif, populaire et désinvolte. Elle le met aussitôt au pas, arguant que cette dernière année au lycée est insipide et futile, car la vraie vie ne commence qu'après. Oliver prétend le contraire et cherche à lui démontrer les aspects positifs de leur passage au lycée. Ils mettent ainsi en jeu les titres de leur playlist du matin, chacun pouvant l'enrichir s'il obtient l'argument irréfutable. Car, autre point de discorde, June et Oliver ont des goûts musicaux diamétralement opposés. Là aussi, la guerre est déclarée... avec sourires malicieux et étoiles dans les yeux.

On s'attend à une romance cousue de fil blanc, sauf que c'est bien mieux, car c'est avant tout l'histoire d'une complicité, d'une découverte et d'une ouverture. June est par exemple obstinée, revêche et prétentieuse. Elle qui se prétend au-dessus de la mêlée a pourtant tendance à cataloguer hâtivement ce qu'elle mésestime. À l'inverse, Oliver est un garçon adorable, charmant et différent de son image superficielle. C'est entendu, ils vont rapidement déposer les armes pour discuter tout naturellement de musique, de famille, d'amitié et d'amour. En vrai, ils sont tous deux engagés dans une relation officielle (lui avec la pom-pom girl fétiche de l'école, bien entendu) mais on sent déjà une June fébrile sur le sujet (durant l'été, séparée temporairement de son copain, elle a embrassé un autre type en vacances). Et on réalise ainsi qu'elle n'est qu'une carapace en toc et qu'elle a beaucoup, beaucoup de zones d'ombre à éclaircir ! Tout se goupille à merveille, sans situation saugrenue, sans tension inutile ou autres malentendus lourdingues. C'est une délicieuse friandise à déguster sans culpabiliser. C'est bon, doux, réconfortant et craquant à souhait. J'ai passé un très, très bon moment. ♥

Gallimard Jeunesse, coll. Scripto - Trad. Marie Hermet [Shuffle, Repeat] - 2017

8 mars 2017

Moi et les Aquaboys, de Nat Luurtsema

Moi et les AquaboysDésespérée d'avoir loupé sa sélection pour participer au stage d'entraînement intensif permettant de rejoindre l'équipe olympique de natation, Lou Brown n'a pas d'autre choix que de retourner au lycée, sans sa meilleure amie Hannah, plus chanceuse ou meilleure qu'elle. Pour la première fois, Louisa fait face à ses camarades et découvre une jungle hostile et inhospitalière où elle n'a carrément pas sa place. Son seul refuge, à part la bibliothèque, reste la piscine dans laquelle elle avait coutume de s'entraîner... avant son cuisant échec. Humiliée, déprimée et déboussolée, Lou plonge une dernière fois dans le bassin... et fait face à trois garçons au moment de remonter à la surface. Les yeux éberlués, fixés sur elle, ils lui proposent de devenir leur coach pour leur numéro de danse aquatique en vue de le présenter à une émission TV qui déniche les jeunes talents. Désabusée, Louisa tope dans leurs mains et se lance dans ce projet complètement dingue mais follement amusant !

Car j'ai ri, qu'est-ce que j'ai ri à la lecture de ce roman à l'humour british extrêmement savoureux ! On y découvre une héroïne attachante, asociale et dégingandée, maniant le sarcasme avec un naturel désarmant mais résolue à mener jusqu'au bout sa mission pour redonner du pep's à sa vie monotone. Or, rien ne va se dérouler comme elle le souhaiterait. C'est, au contraire, une avalanche de catastrophes et de déconvenues qui vont ponctuer les séances d'entraînement et les exhibitions publiques. Et c'est justement cette perpétuelle dérision qui rend la lecture si plaisante. On s'amuse à partager les heurts et bonheurs de ce quatuor déjanté, qui déjoue aussi tous les pronostics. L'enthousiasme est de mise et il est tout simplement communicatif. Ajoutez, en plus, des rôles secondaires aussi insolites, dont des familles qui partent délivrer des âmes en peine au péril de leur vie et au cours d'escapade nocturne mouvementée ! Gloussements de dinde assurés... Je n'imaginais pas à quel point le contenu de ce livre allait être aussi réjouissant. Un pur bonheur. J'ai adoré du début à la fin, je voulais me fondre dans la vie de Louisa Brown et retenir ce vent de folie douce qui chamboule à ravir leur routine. L'inspiration de Nat Luurtsema, comédienne anglaise particulièrement douée, est franchement exemplaire. Je voudrais lire tout le temps des romans aussi pétillants, frais et délirants que celui-ci. Une suite serait fortement envisagée, chic ! ☺

Gallimard Jeunesse, trad. Emmanuelle Casse-Castric [Girl Out of Water], 2016

Image associée

3 mars 2017

La chair, de Rosa Montero

la chairRongée par la jalousie de croiser son amant et sa jeune épouse enceinte à l'opéra, Soledad s'offre les services d'un escort pour l'exhiber à son bras. Adam est jeune, beau, sexy. Il a la trentaine d'années, parle l'espagnol avec un accent russe et produit son effet en société. Soledad est comblée. À soixante ans, Soledad porte un soin attentif à sa silhouette et à son allure pour ne jamais paraître son âge. Elle refuse le temps qui passe, ne conçoit pas de mener une vie de couple ordinaire et avoue sans complexe préférer les hommes jeunes et beaux. Soledad aime l'amour et la passion, c'est son carburant. Jamais la solitude n'a eu d'emprise sur elle. Soledad s'épanouit dans son travail - elle organise des expositions insolites et a acquis une solide réputation dans son domaine, même si cela lui demande beaucoup d'énergie, de la créativité et du renouvellement perpétuel. Soucieuse de monter son nouveau projet sur les écrivains maudits, Soledad est pour la première fois confrontée à une concurrence farouche et déloyale (une archictecte plus jeune et ambitieuse, qui empiète sur son territoire). Elle n'entend pas s'y soumettre et rage de devoir prouver ses compétences. Insomniaque, Soledad ressasse les nombreuses références littéraires pour alimenter son expo (Burroughs, Philip K. Dick, Thomas Mann, Maupassant, etc.) tout en notant que son corps et sa tête sont entièrement accaparés par la passion naissante qu'exerce Adam sur elle.

Quel beau roman ! J'avais à peine lu les premières pages que j'étais déjà complètement envoûtée par l'écriture de Rosa Montero, touchée par le personnage de Soledad et intriguée par sa relation avec Adam. Une relation forcément toxique et obsessionnelle, mais décrite avec ludicité et réalisme. Soledad réprouve le rapport mercantile de son histoire avec Adam, mais cherche à entrevoir la sincérité du jeune homme dans ses gestes et ses paroles. Elle s'accroche à de douces illusions, vaguement désabusée, mais refuse la fatalité. Le roman évoque admirablement le combat de cette femme de soixante ans, seule et indépendante, qui résiste aux idéaux et à la morale ambiante. C'est un parcours non sans heurt, car au fil des pages on découvre une héroïne fragile et à fleur de peau, en lutte contre le temps et le destin. C'est à la fois touchant, livré sans fard, sans tricherie, mais c'est aussi truffé d'ironie, de dignité et de désir farouche. J'ai aimé la sensualité qui découle du récit, tout en élégance, sans détails sordides ou graveleux. De quoi retoquer certaines productions actuelles de très mauvais goût. Ici, Rosa Montero parle du corps, d'envie et d'appétit charnel avec raffinement et lyrisme (très belle traduction de Myriam Chirousse, au passage). C'est un roman d'une grande pudeur, et en même temps passionnant et authentique. Une lecture forte et vibrante d'émotions, pleinement enthousiasmante. 

L'auteur aussi a de l'humour, puisqu'elle se met en scène dans son propre roman, comme étant une journaliste “raz-de-marée” qui s'habille chez Zara et porte des Dr. Martens avec des roses brodées “quand bien même elle voulait s'habiller comme si elle était une jeunette” (p. 142). ☺

Traduit de l'espagnol par Myriam Chirousse pour les éditions Métailié, Janvier 2017

 

19 février 2017

Pêle-Mêle : Les Quiquoi et le bonhomme de neige qui ne voulait pas fondre - Mes amis Monstres - Il était trop de fois

les quiquoi

Revoici la bande des joyeux copains, composés de Boulard, Mixo, Pamela, Pétole, Raoul et Olive l'artiste ! Ce dernier a choisi de créer une ambiance hivernale pour ses amis, ciel gris et enneigé, c'est l'occasion de faire un gros bonhomme de neige. Mais pour éviter que celui-ci ne fonde sous les premiers rayons de soleil, la troupe l'entraîne sur sa luge jusqu'à la montagne. L'ascension est longue et périlleuse, au loin les copains entendent le hurlement de l'abominable gnome des neiges, puis croisent une marmoutte déchaînée qui les pourchasse jusqu'au fin fond d'une grotte. Quelle aventure ! Et ce n'est pas tout, du moins attendez-vous à une lecture rigolote, riche en rebondissements loufoques. Vous allez adorer cette série, son trait d'humour, son dessins colorés, ses dialogues savoureux et ses situations cocasses. Olivier Tallec et Laurent Rivelaygue combinent talent et humour pour une lecture qui ne peut que vous régaler ! 

♥♥♥ Les Quiquoi et le bonhomme de neige qui ne voulait pas fondre, de Laurent Rivelaygue & Olivier Tallec ♥♥♥

Actes Sud Junior BD - Février 2017

 

mes amis monstres

Isa est une adorable petite fille, qui aime beaucoup se déguiser. C'est sa manière à elle de combattre les monstres, qui s'introduisent la nuit dans sa chambre. Son chat Jean-François veille également sur elle en lui faisant des câlins. Mais il faut que ça change, aussi décide-t-elle de ne plus se cacher sous les déguisements et d'affronter réellement les monstres. Ils sont trois. Trois à se faufiler près de son lit. La fillette n'en mène pas large. Soudain, son chat bondit sur les monstres... et là, la tension monte d'un cran ! Ce serait toutefois étonnant de trembler de peur à la lecture de cet album aux allures pop et aux couleurs acidulées ! C'est comme un bonbon à découvrir. Une délicieuse sucrerie à croquer sous la dent. Miam ! Cette lecture est franchement extra, rigolote et fantasque. Elle chatouille les vieilles trouilles et dédramatise le problème des monstres en racontant une histoire complètement folle, qui donne envie de sourire ! Une thérapie radicale, joyeuse et bénéfique. ☺

Mes amis monstres, de Pooya Abbasian

Actes Sud Junior, Février 2017

 

il etait trop de fois

« Il était une fois un loup, grand et méchant. - Non ! Pas de loup ! Pensez aux pauvres petits lecteurs si sensibles qui risquent de faire des cauchemars… Pourquoi pas un chien ? Un gentil chien très mignon ? » C’est ainsi que commence cette histoire, où le loup est remplacé par un petit caniche rose... affamé. Il bondit sur un pigeon - malheur ! c'est rempli de microbes - il tombe alors sur un arbre magique à bonbons - nan, c'est mauvais pour les dents - alors il se rabat sur un navet - et s'il partageait avec les animaux de la forêt ? Amis de l'humour absurde, STOP ! Arrêtez votre chemin sur cette lecture, faussement rose prout-prout, car au menu c'est de la grosse poilade sur toute la ligne ! On se moque exprès de la bien-pensance actuelle (la moralité exemplaire, pas de sang, pas de clichés, des valeurs nobles...), sauf que cela ruine la créativité, l'élan, la spontanéité, le grain de folie... Place à l'imagination, à l'enfance, aux contes et aux histoires extraordinaires. Osez secouer les consciences, de toute façon les enfants savent pertinemment faire la part des choses. Vive le loup ! vive les classiques ! à bas la censure ! ☺

♥♥♥ Il était trop de fois, de Muriel Zürcher & Ronan Badel ♥♥♥

éd. Thierry Magnier, 2016

 

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