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Chez Clarabel
9 juin 2010

The Agency, Le pendentif de jade

The Agency

Londres, 1853. Mary, douze ans, est condamnée à être pendue pour vol. Par chance, elle rencontre une bienfaitrice qui la fera entrer dans une école pour jeunes filles. Cinq ans plus tard, devenue institutrice, Mary ne peut cacher son ennui lorsque la providence vient de nouveau frapper à sa porte. Mary rejoint une organisation secrète, the Agency, qui consiste à infiltrer des lieux et à se familiariser avec des personnes pour servir une enquête.

Mary l'espionne reçoit pour première mission d'être embauchée comme demoiselle de compagnie chez les Thorold. La demoiselle de la famille est une peste insupportable, qui s'est jurée d'empoisonner l'existence de Mary. Cette dernière, contrainte de paraître affable, se sent frustrée et brûle d'envie de passer à l'action. N'en pouvant plus, elle se glisse un soir dans le bureau de Thorold et fait la rencontre de James.

Ah, James ! ... Brillant, arrogant, fasciné par cette beauté exotique, au tempérament volcanique. Il comprend tout de suite qu'elle n'est qu'une usurpatrice (fausse demoiselle de compagnie), mais ne souhaite pas la compromettre. Au contraire, il lui propose de collaborer et d'unir leurs efforts.

Le texte est extrêmement bien écrit et bénéficie aussi d'un incroyable travail de recherche. L'auteur a fignolé le cadre historique, la réalité sociétale, la dénonciation de la condition féminine en cette époque victorienne... Autre point fort du roman : les personnages ! Le couple Mary / James est juste formidable et noue un subtil jeu amoureux qui ne demande qu'à se déployer.

En somme, cette intrigue se veut délicate et pleine d'élégance, elle introduit un univers alléchant et prometteur. Quelques petits défauts subsistent, qui s'effaceront par la suite, je n'en doute pas un instant ! Dans un registre très proche, je recommande également les enquêtes d'Enola Holmes, mais aussi la série de Lee Jackson, avec Sarah Tanner, autrement dit Une femme sans peur . 

The Agency, Le pendentif de jade ~ Y.S. Lee
Nathan (2010) - 377 pages - 14,90€
traduit de l'anglais par Lilas Nord

à suivre : The Agency 2: The Body at the Tower (août 2010 pour la VO, 2011 pour la VF chez nathan)

 

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3 juin 2010

Le retour de l'allumeuse

Le retour de l'allumeuse est en fait la suite d'un livre déjà paru en 2006, Journal d'une allumeuse (+ Le grand livre des garçons, 2008). Par contre, j'ai lu celui-ci de façon totalement indépendante, même si j'aurais probablement préféré connaître les précédents détails, je n'ai pas été trop paumée non plus.

le_retour_de_lallumeuse

Alors voilà, Ruby Oliver a souffert d'une méchante réputation d'allumeuse durant l'année qui vient de s'écouler et, même si les vieilles rancunes sont tenaces, elle est déterminée à enterrer ce passé. Elle suit une thérapie auprès du docteur Z, cela fait maintenant quarante semaines qu'elle arbore un célibat sans failles et sans frémir. Elle a perdu sa meilleure amie et toute la bande des filles huppées du lycée de Tate, elle a fait une croix sur Jackson, son ex qui est maintenant avec Kim, et son amitié avec Noel, qui a cherché à l'embrasser tandis qu'elle le repoussait de façon charmante, est en perte de vitesse. Comble de tout, elle se découvre désormais un sérieux penchant pour lui et se mord les doigts d'avoir fait la fine bouche. Et pour alourdir l'un des plateaux de la balance qu'elle tente d'équilibrer dans le but de redorer son blason, Ruby a appris que son amie d'enfance, Nora, en pinçait sérieusement pour Noel. Le même Noel. Argh.

La partie s'annonce serrée. D'un côté, Ruby veut être considérée comme une amie sincère et compatissante, qui aimerait effacer la réputation d'allumeuse qui persiste sur les murs des toilettes, mais rien ne va comme elle le souhaiterait. Jackson a rompu avec sa petite copine et tente de renouer contact avec Ruby. Noel continue de la fuir, mais il dépose des petits billets à double sens dans sa boîte aux lettres, en même temps Nora se pâme d'amour pour lui mais n'ose pas lui avouer, et Ruby au milieu est partagée car, non, non, non elle n'a pas du tout envie que Nora et Noel sortent ensemble.

Autres signes que rien ne va dans sa petite vie : elle perd son job qu'elle adore, elle trouve une place de vendeuse de sandales Birkenstocks qu'elle déteste farouchement, ses parents s'amourachent d'un danois qui se régale des beignets cuisinés maison, et impossible pour Ruby de dresser sa carte au trésor comme il faut, le docteur Z vient de mettre le doigt sur un détail fâcheux, Ruby Oliver ne vit que pour les garçons et les histoires sentimentales ! Ruby Oliver souffre de la fièvre du lapin !

Vous l'avez compris, c'est très drôle. Le livre s'appuie sur le modèle du journal intime, agrémenté de pétillantes anecdotes sous forme de petites notes reçues en douce et même des extraits du grand livre des filles (une très grande référence culturelle !). De plus, l'auteur a su donner une fraîcheur irrésistible aux élucubrations d'une lycéenne qui exprime ses souhaits et ses espoirs afin de rendre plus harmonieuses ses relations avec les personnes de son entourage (oui, voilà en gros toute l'histoire !). L'humour ne masque pas la sensibilité de la jeune fille, sa souffrance d'être constamment jugée et incomprise, et même la fin échappe à toute mièvrerie. Bref, j'ai beaucoup aimé. C'est une lecture réjouissante, vive et espiègle, où l'on comprend que la vie est parfois riche d'un enseignement puisé dans le retro metal, avec des répliques cultes du genre : Les groupes à cheveux gras ont des vertus thérapeutiques insoupçonnées. (Entre autres choses, bien entendu.)

Dans le même style, vous apprécierez :  Teen Song de Claudine Desmarteau  ou  15 ans : Charmante mais cinglée de Sue Limb . 

Le retour de l'allumeuse ~ E. Lockhart
Casterman (2010) - 216 pages - 13,00€
traduit de l'anglais par Antoine Pinchot
illustration de couverture : Sibylle Delacroix

du même auteur : Journal d'une allumeuse (nouvelle édition illustrée par S. Delacroix) & Le grand livre des garçons

journal_dune_allumeuse   le_grand_livre_des_garcons

2 juin 2010

Quatre soeurs, Malika Ferdjoukh

Pour la première fois réunie en un seul volume, la tétrade de Malika Ferdjoukh ! (si vous l'aviez loupée, il n'y a maintenant plus d'excuse)

quatre_soeurs

Contrairement à ce que laisse entendre le titre, il s'agit de l'histoire des cinq soeurs Verdelaine (Enid, Hortense, Bettina, Geneviève et Charlie), dont les parents ont disparu dans un accident, et qui vivent par leurs propres moyens dans la Vill'Hervé, leur maison familiale qui compte aussi comme un personnage dans la série tant elle est mystérieuse, biscornue, avec des passages secrets, des coins et des recoins, un escalier rebaptisé le macaroni, le tout battu par les vents et bercé par le ronron de la mer. C'est une belle saga qui parle d'amour, de rêves et d'espoirs, forte en rencontres (toutes les demoiselles ont des personnalités attachantes, exubérantes, un brin fofolles). Les coups durs ne sont pas écartés, le souci d'argent, l'éducation entre soeurs, le besoin d'indépendance, le manque de repères. On parle aussi de maladie, de perte tragique, de séparation et de responsabilité. Non, tout n'est pas rose non plus, mais ce n'est jamais déprimant. Et surtout, il y a ce zest de poésie et de folie douce, Malika Ferdjoukh est en pleine extase littéraire, son écriture est un cadeau, merci tout court !

De son côté, l'éditeur parle d'un festival de personnages, de péripéties et de dialogues piquants, l’équivalent moderne et littéraire des bonnes vieilles grandes comédies américaines des années 40 et 50. Un régal pour le coeur et l’esprit. (je suis d'accord !)

Le livre coûte 19,50€  (école des loisirs, 2010 - 610 pages).
illustration de couverture : Gwen le Gac 

mon coup de coeur de l'été 2007

La série sera prochainement adaptée en bande dessinée, par Cati Baur et Malika Ferdjoukh, à paraître en octobre (tome 1 : Enid) chez delcourt.

quatresoeurscouv4

25 mai 2010

Jean-Noël Sciarini

Je m'appelle Toni Canetto, j'ai seize ans, et comme je ne sais pas qui je suis, que j'en crève de ne pas le savoir, je cherche l'amour dans les chansons.

garcon_bientot_oublie

En voilà un roman absolument déconcertant, qui n'est pas tendre avec son lecteur car il choisit sciemment de le bousculer. C'est l'histoire d'un garçon de seize ans intimement persuadé d'être une erreur de la nature ("être un garçon manqué, un garçon râté"), il ne se sent pas dans la peau d'un garçon comme les autres, mais un garçon en passe de devenir une femme. Et c'est en découvrant une chanson d'Antony & the Johnsons, puis en rencontrant Rose à Paris qu'il va comprendre que son destin est tracé. L'histoire de son parcours et de cette révélation nous apparaît hallucinante et bouleversante de beauté brute. C'est un texte dur, un vrai électrochoc, qu'on reçoit comme une claque. La fin du roman, notamment, n'est pas facile. Tout s'embrouille, tout se met en branle, c'est le chaos. Toni a pris conscience d'un tas de choses, il va agir et basculer dans un univers cotonneux, presque onirique. J'étais un peu paumée mais je n'ai pas  regretté.

Néanmoins, au-delà de toutes les considérations sur le sexe et l'identité profonde, c'est aussi un livre qui laisse libre cours à de pleines pages de bonheur musical. Associer la découverte d'une chanson à la renaissance, à la vie qui se révèle et aux émotions que cela implique, j'ai trouvé que c'était tout simplement merveilleux.

Je pose le disque dans mon lecteur CD, et pendant des heures, plus rien n'existe.
Que cette chanson. Et moi.
Des dizaines de fois, je l'interromps, ne l'écoutant que par bribes, comme un corps si longtemps désiré, et annexé millimètre après millimètre, sans pouvoir y croire, à cette beauté et à cette chance de pouvoir le toucher, enfin ; toute cette attente, ce n'était pas en vain.
Je m'écroule alors, trop-plein de sensations physiques dont j'ignorais l'existence - moi qui n'ai jamais vécu que dans ma tête.
Recroquevillé sur le sol de ma chambre, je fonds en larmes, mon corps parcouru de sanglots violents inséminés par une voix nouvelle, comme un ouragan le traversant, le dévastant.
Comme s'il fallait détruire tout ce qui était pour laisser tout l'espace du monde à ce qui sera.
 

Le garçon bientôt oublié ~ Jean-Noël Sciarini
Médium de l'école des loisirs (2010) - 196 pages - 10€
illustration de couverture : Rascal

L'auteur s'était déjà illustré dans un premier roman, Nous étions des passe-muraille, tout aussi complexe et troublant.

(...) j'ai proposé à Sarah de s'asseoir sur une banquette. Elle a fait non de la tête et s'est frayé un chemin parmi la foule. Puis elle s'est mise à danser, les yeux clos, indifférente à ce monde si vaste qui s'étendait à la frontière de son corps ; je ne l'avais jamais vue danser avant cette nuit. Et même maigre à pleurer, elle était encore si belle cette nuit-là, Sarah, ma ballerine, à danser sur la pointe des pieds, Sarah, se réappropriant son corps et abolissant, le temps de quelques chansons, cette frontière invisible qui la tenait depuis trop longtemps à l'écart du monde.
Je suis resté planté, à la regarder danser pendant plus d'une heure. J'étais paralysé, ne voulais rien faire. Il fallait que l'équilibre ne se rompe pas, il fallait qu'elle sente à nouveau le sang affluer dans ses veines d'or, qu'elle réanime les fonctions de son corps.
Quand elle a enfin ouvert les yeux, ils étaient pour moi. Elle a parlé - non, je n'ai pas rêvé, Sarah, j'ai entendu ta voix -, elle m'a dit :
- Jean, danse avec moi !
C'était une injonction. Un ordre comme je n'osais plus en rêver. Sarah reprenait les commandes, à l'écoute des battements du monde ; Sarah forte et fragile, sourire aux lèvres, tantôt narquoise, tantôt désarmante d'innocence non feinte. Et son regard comme  une contrepartie à l'obscénité du monde. Ses colères pour rien, aussi, que je fuyais au début comme la peste, préférant passer pour un lâche plutôt que d'affronter les coups millimétrés de ses mots, les fléchettes empoisonnées qu'elle me décrochait. Ses colères qui me manquaient tant à présent...
Alors j'ai dansé avec elle - tâchant d'oublier quelques minutes que je ne dansais presque jamais, tellement j'avais honte de la gaucherie de mes pas, de mes longues mains que je ne savais où mettre, excepté au fond de mes poches. A ce moment-là, nos vies battaient au rythme saccadé d'une mélodie minimale jouée par un DJ de Detroit.
Je n'aimais pas cette musique, je n'aimais pas cet endroit mais j'étais si heureux de voir Sarah danser comme une folle, Sarah assassinant père et mère, Sylvia Plath, Fernando Pessoa, puisqu'elle n'en avait plus rien à faire de la gravité et qu'elle était à nouveau prête à la défier, ce soir-là, dans cette ancienne fabrique cerclée de briques rouges.
Et puisqu'il y a déjà bien assez d'anges dans le ciel, redeviens un démon, Sarah, redeviens un démon et enivre-toi ; de Dionysos tu seras toujours la fille, Sarah.

passe_murailleC'est encore un texte pas facile du tout, mais très attachant et émouvant, admirablement écrit et d'une poésie pointilleuse. C'est l'histoire d'un couple improbable - lui, pataud et encombré d'un corps disgracieux, et elle, belle et rayonnante, mais qu'on dit folle alors qu'elle est malade, ne mange plus, ne parle plus. Elle est internée dans un centre d'où Jean, le narrateur, va la sortir pour l'emmener en Allemagne, pays que Sarah a quitté brutalement quand elle était enfant. Il espère ainsi que ce retour aux sources la guérisse ou lui redonne goût à la vie. C'est un petit roman sensible et sincère, qui m'a mise à plat, mais je savais les risques que je prenais. La lecture fut éprouvante, mais elle a su générer une énergie forte et revigorante. Envers et contre tout.

Nous étions des passe-muraille ~ Jean-Noël Sciarini
Médium de l'école des loisirs (2009) - 178 pages - 9,50€
illustration de couverture : Frank Juery
, 

16 mai 2010

Blue Cerises saison 3

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" Les Cerises, c'est la possibilité d'être nous, tels quels, sans masque, sans paraître. Un cocon, peut-être, où nous pouvons nous protéger de tout le reste. " (Satya, de musc et de havane)

Voilà une troisième saison beaucoup plus rude pour nos Cerises. C'est le soir du réveillon de la saint-sylvestre, tous les quatre se rendent à une fête costumée, mais rien ne se passe comme prévu. Violette apprend que son frère a disparu, Amos pète un câble et lui envoie un scud en pleine figure, Zik et Satya frisent le rapprochement avant de revenir sur terre pour recoller les pots cassés. Quelle soirée !

Après la saison des secrets, voici la saison des révélations et du sentiment de trahison. Les masques tombent, le fantôme d'Olivia revient tous les hanter, entre apparition surréaliste ou harcèlement d'un dégénéré, les Cerises sont paumés et ont besoin de leur amitié pour ressouder les liens qui se desserrent. Or, l'amitié bat des ailes. Zik a le sentiment d'avoir été mise de côté, Amos a cru pouvoir se séparer de sa famille qui part au Canada en se consolant auprès des Cerises, mais soudain le déchirement devient vif et inexplicable, Violette a bafoué la confiance de ses proches, aujourd'hui elle en paie douloureusement le prix, et enfin Satya ne veut pas entendre parler de ce type débarqué de New York qui aurait bien connu ses parents en Inde. A l'instar de ses amis, il préfère se protéger de la réalité, ne pas affronter certaines vérités, trouver un refuge ailleurs, à la Cinémathèque par exemple. Quand on a toujours compté l'un pour l'autre, et l'un sur l'autre, cela devient subitement troublant de ne plus rien retenir et de découvrir que tout se délite. Et le désespoir de Zik est juste beau, poignant et émouvant.

" J'y ai tellement cru, aux blue Cerises, j'ai tellement cru qu'ils m'aidaient à vivre. Notre mot de passe n'est-il pas : "On en parle ?"
Dans ce cas, pourquoi est-il si difficile de se dire les choses ? N'y a-t-il pas une gigantesque supercherie à croire que l'on ne peut être rien sans les autres ? Je n'en peux plus. J'ai envie de hurler. Je ne supporte plus cette hypocrisie de merde. "
  (Zik, lonely cat)

Les blue Cerises, c'est l'amitié puissance 4. Une amitié fusionnelle, qui n'est pas épargnée par les coups de griffes, mais après tout il faut aussi grandir dans la douleur, et comme nos petits Cerises ont un goût inné pour la dramaturgie (on ne se gave pas de cinémathèque en apprenant par coeur les répliques implacables pour rien !), tout ça vous vrille le coeur et le corps. Cette saison se boucle donc sur une note d'amertume, en même temps lire quatre fois une cinquantaine de pages où les émotions sont intenses et exarcerbées ne peut pas se terminer autrement. Et c'est avec une certaine boule au ventre qu'on repose nos quatre petits bouquins, avec des questions qui passent en boucle, comme de ne pas comprendre où Amos a perdu la raison, à une lettre près (ça signifie "entendre son coeur") et sur quelle épaule Zik a calé sa tête (en se glissant dans la peau de Scarlett).

Donc, les larmes, les cris, la colère, la boisson, les notes de musique ont beaucoup versé dans cette saison mais c'est un mal pour un bien. Cette série, à travers son concept, son idée, son style et son portrait de quatre adolescents inséparables, montre que l'union fait la force.

En attendant un dénouement apaisant (Zik / Satya ?!?), la saison 3 a posé les bonnes questions : " Pourquoi cette violence ? (...) Où est ma place dans cette histoire ? Je suis libre d'être ce que je suis. Les ailes froissées, je me cogne, encore et encore, aux lumières de la vie. Et je me consume. " (Violette, la minute papillon)

La saison 3 des Blue Cerises comprend :

* Violette, la minute papillon ~ Cécile Roumiguière
* Zik, lonely cat ~ Maryvonne Rippert
* Amos, anticorps ~ Sigrid Baffert
* Satya, de musc et de havane ~ Jean-Michel Payet

Milan, coll. Macadam (2010) - 4€ chaque livre. 

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24 avril 2010

Bon sang, on est comme Buffy et Spike.

De_si_jolies_chosesUn été à Londres. Quatre jeunes de dix-sept ans s'inscrivent à un stage de théâtre où ils devront mettre en scène La mégère apprivoisée de Shakespeare. Il y a Charlie, Lucy, Daisy et Walker. Ce dernier a une réputation de don juan, il saute sur tout ce qui bouge, et a actuellement dans sa ligne de mire la pulpeuse Daisy. Mauvaise pioche. La miss a un caractère revêche, très sarcastique, elle se revendique lesbienne jusqu'au bout des ongles et abhorre un type comme Walker qui réunit tous les défauts du genre masculin. Charlie, lui, a le béguin pour Walker et lui confie en pure perte ses sentiments, alors que Lucy, sa meilleure amie, brûle d'amour pour lui, sans aucune chance de retour. 

Chassés-croisés amoureux, recherche de soi à travers son identité sexuelle (attention à la cible des lecteurs jeunes, la couverture est jolie, toute fraîche mais l'histoire parle d'alcool, de baiser et de sexe), bref ce petit roman de Sarra Manning m'a étonnamment séduite. On y parle d'amour qui vous tombe dessus sous crier gare. De confusion des sentiments, des sens en éveil, des contradictions entre le coeur et la tête. Lucy, Charlie, Daisy et Walker, tour à tour, s'amourachent de la mauvaise personne, c'est vécu comme un drame (normal, c'est l'âge), un vrai casse-tête où chacun tente de sauver sa peau, de préserver l'autre, de vouloir ci et choisir ça. L'histoire en elle-même part un peu dans tous les sens et se conclut de manière convenue (à une exception). Et pourtant, je me suis attachée aux quatre personnages, à leur valse des hésitations, à leurs prises de conscience. Ce n'est pas profond de chez profond, tout reste à la surface aussi, mais j'ai trouvé chez chacun des failles, des forces qui touchent ou qui agacent, donc c'est obligé de tous les aimer à un moment ou à un autre. Qu'on soit d'accord avec eux, qu'on les pousse à agir d'une façon au lieu d'une autre, qu'on tolère l'impensable ou le comique. C'est le cadeau bonux qu'on aimerait trouver plus souvent, la sensation d'avoir 300 pages d'une lecture qui s'oubliera vite, mais qui conservera pour elle d'avoir réussi à nous tenir compagnie sans nous ennuyer. Bien au contraire.

Sarra Manning est un peu la Meg Cabot anglaise, j'avais très envie de la découvrir, notamment depuis ce billet où elle nous parle des *toxic boys* (et là, forcément elle devient notre copine, parce qu'on se comprend parfaitement ! It's a crying shame.)

De si jolies choses... ~ Sarra Manning
Pocket jeunesse (2010) - 300 pages - 12,50€
traduit de l'anglais par Marie Leymarie
illustration de couverture : Solène Debiès

21 avril 2010

Qui choisirait un hamburger quand il peut avoir du filet mignon ?

Avalon_HighEncore une petite sucrerie dégotée dans le fin fond de mon escarcelle.
Ce livre à la couverture rose de chez rose nous raconte une bluette romantique, pas bien désagréable et surtout drôle et divertissante (cela reste du Meg Cabot avant tout). Et plus dingue encore, l'histoire nous fait croire que nos jeunes lycéens sont des réincarnations du roi Arthur et de ses suivants.
Cela commence par l'arrivée d'Elaine dans la ville d'Annapolis où ses deux parents, professeurs, ont posé leurs valises pour leur année sabbatique. Ce sont deux excentriques, deux médiévistes passionnés,  qui entretiennent avec leur fille une relation enrichissante.
Un matin, alors qu'elle fait son jogging, elle croise un garçon au sourire charmant. Comme si elle recevait une flèche en plein coeur. Le jour de la rentrée, elle le retrouve au lycée d'Avalon High, en compagnie de son meilleur ami Lance. Il s'agit de Will, capitaine de l'équipe de foot, le type le plus populaire de l'école. Il est drôle, intelligent, a un succès fou et une petite copine, Jennifer, jolie, blonde et leader des pompom girls.
Bizarrement, Elaine et Will vont tisser un début d'amitié plutôt paradoxal - il passe beaucoup de temps en sa compagnie, prétend la connaître ou l'avoir déjà vu. De son côté, même si son coeur bat la chamade, Elaine se retient de lui sauter au cou et prend même à coeur de le préserver lorsqu'elle découvre que Jennifer et Lance sont tombés dans les bras l'un de l'autre.
Et l'on suit ainsi cette histoire ahurissante en se prêtant au jeu, en acceptant de voir sous les traits de Will Wagner le roi Arthur Pendagron, entouré de son fidèle Lancelot qui le trompe en s'amourachant de la belle Guenièvre, tandis que dans l'ombre Mordred, déchaîné par la jalousie, cherche à semer la zizanie.
Elaine, parce qu'elle est la progéniture d'amoureux du Moyen-Âge, doit bien évidemment son prénom d'un personnage de la littérature, soit celui de la Dame de Shallot, alias Lady Elaine qui s'est tuée parce que Lancelot lui préférait la reine Guenièvre.
Que d'intrigues amoureuses nous réserve donc ce roman (et de situations téléphonées aussi). Nulle prétention à son bord, juste du clin d'oeil et une approche astucieuse pour se familiariser avec les légendes arthuriennes (un lexique des personnages est d'ailleurs glissé à la fin du livre). Lire ce livre ne demande pas beaucoup de temps, et puis c'est un livre de Meg Cabot, donc un billet direct pour une comédie romantique et distrayante.
Conviendra parfaitement aux adolescentes.

Avalon High (Un amour légendaire) - Meg Cabot
Hachette (2008) - 307 pages - 12€
traduit de l'anglais (USA) par Josette Chicheportiche

Par contre, l'édition française est une pitié : coquilles, fautes de frappe, pagination bizarroïde et j'en passe. Ce n'est pas très soigné !

19 avril 2010

(...) parfois, les rêves se réalisent vraiment.

Paul_Charlie_et_Rose_de_Isabelle_MerlinTout commence par un blog : Trois Voeux. Rose, une adolescente de seize ans, affiche les siens : gagner une fortune au loto, avoir une paire de chaussures argentées et souhaiter que quelque chose de fantastique se produise. Peu de temps après, elle reçoit une invitation pour venir en France rencontrer son grand-père, le comte Valentin du Merle de la Tour d'Argent. La nouvelle fait l'effet d'une bombe ! Rose, dont les parents sont décédés dans un accident de voiture, se découvre une généalogie bien pompeuse et, sous l'insistance de sa tante, accepte de s'exiler (elle vit en Australie). A elle la vie de château ! Sur place, elle ne cesse d'être éblouie et séduite. Et comme l'indique la couverture, il y a bien deux garçons pour faire battre son coeur - l'un est Charlie, le fils de la secrétaire particulière de son grand-père (une femme très froide, surnommée la reine des neiges), l'autre est Paul, dont l'histoire de famille est fortement entremêlée avec celle des châtelains. Dans ce petit coin de paradis, les rancunes demeurent. La présence de Rose n'est pas au goût de tout le monde, puisque depuis son arrivée la jeune fille se sent la cible de menaces et de tentatives de meurtre.

C'est bien gentil, tout mignon, proche du Journal d'une princesse de Meg Cabot mais en beaucoup moins enlevé et pétillant. J'ai trouvé le texte un peu lourd, voulant se prendre presque trop au sérieux (il lui manque de l'humour pour le rendre attachant et léger). Un peu comme de la chick-lit, mais non. Certes, l'histoire respire le parfum du conte de fées, avec all's well that ends well. En plus, on trouve un zest d'intrigue à suspense avec des secrets de famille, un troll sur le net et un type qui harcèle notre héroïne aux abois. Le niveau est sympa, mais pas transcendant. La couverture, comme toujours dans la collection Bliss, est signée Pénélope Bagieu.

Ah bon ? La vie contient des éclats de magie, même s'ils sont différents de ceux des contes de fées.

Vrai ! Le monde d'Internet est vraiment bizarre. J'ai parfois l'impression qu'il s'agit d'un pays de contes de fées. On y trouve des trolls, des pirates, des zombies, des gens qui empruntent de fausses identités et d'autres qui transforment leur apparence. Il existe aussi tout un tas de méchants prêts à piéger les gens trop confiants, et de bonnes fées qui peuvent vous changer la vie. On peut s'y faire des amis invisibles, sans jamais les rencontrer. Et il semble y règner toute une gamme de magie étrange - bienfaisante ou maléfique.

Paul, Charlie et Rose ! ~ Isabelle Merlin
albin michel, coll. bliss (2010) - 390 pages - 15€
traduit de l'anglais (Australie) par Marie Cambolieu

à partir de 12 ans

 

16 avril 2010

Vis comme si tu étais dans une histoire. Vis une aventure.

Impregnation_de_David_AlmondNous sommes dans le Northumberland, dans la campagne proche de Newcastle. C'est l'été, il fait chaud, très chaud. Liam et son ami Max explorent le jardin où ils déterrent un couteau avant de suivre un choucas qui les conduit vers un bébé abandonné. 

Ce n'est qu'un début, le début d'une histoire incroyable, car Liam va ensuite rencontrer Oliver et Crystal, deux oisillons égarés, placés en famille d'accueil. Ils ne veulent plus de cette valse des foyers, ils ont besoin de s'évader et comptent sur Liam pour les aider.

Dans le même temps, Max s'éloigne de plus en plus, le garçon a d'autres priorités (les études, les filles) et partage moins les centres d'intérêt de Liam. Un autre camarade, Gordon Nattrass, traîne souvent dans les parages mais agace prodigieusement Liam. Nattrass est dingue, imprévisible et dangereux. Sa dernière lubie, prouver que l'art est bidon, que le public est fasciné par l'horreur et le morbide. (Bien évidemment, les parents de Liam sont tous deux artistes - son père est écrivain, sa mère expose des peintures ou des photographies dans des galeries.)

Le lecteur se sent légèrement paumé au coeur de toutes ces vies, ces rencontres et autres va-et-vient, mais aussi singulier que puisse paraître le récit, il n'en demeure pas moins scotchant ! C'est la faute de David Almond, cet homme est remarquable, c'est un écrivain qui ne cesse de me surprendre et dont le style, impeccable, irréprochable, élégant, faussement simple, nous happe aussitôt. J'ai beaucoup aimé son roman, de là à dire que j'ai été "imprégnée", il n'y a qu'un pas...

Car on trouve dans le livre une folle théorie à ce sujet (imprégnation, d'où le titre), fantasque mais fascinante, tout comme un passage sur les forces du mystère et de la magie, alors que le livre ne baigne pas du tout dans le fantastique. Au contraire, il est plutôt question d'enfance à quitter, d'adolescence en crise, de violence latente, de guerre, d'adoption, de repères en déroute. C'est signe que cette lecture brasse beaucoup de sensations, aborde des idées, des envies et le lecteur sera heureux - ou non - de les partager. Pour moi, cela a été une lecture envoûtante. De plus, le texte est écrit au présent, du début à la fin,  cela donne un relief particulier à l'histoire en la rendant plus forte à l'esprit du lecteur. On aime ou on reste sur le côté.

Imprégnation ~ David Almond
Gallimard, coll. Scripto (2010) - 268 pages - 11€
traduit de l'anglais par Diane Ménard

Je ne veux pas redevenir un petit garçon, et en même temps, j'aimerais bien. Je veux être à la fois comme j'étais alors, comme je suis maintenant, comme je serai plus tard. Je veux être moi, et rien que moi. Je veux être aussi fou que la lune, aussi sauvage que le vent, aussi calme que la terre. Je veux être tout ce qu'il est possible d'être. Je grandis, et ne sais pas comment grandir. Je vis, mais je n'ai pas encore commencé à vivre. Parfois je disparais simplement de moi-même. Parfois, c'est comme si je n'étais plus du tout dans le monde, comme si je n'existais pas. Mes pensées dérivent, et les visions qui apparaissent me semblent extraordinairement nettes.

15 avril 2010

Le gris, c'est pour les secrets.

Pour brûler la force qu'ils ont fait peser sur nous. Pour nous aider à nous rappeler ce qui est vraiment important.

Gris_secret_de_Laurie_Faria_StolarzTroisième tome de la série. J'étais impatiente de le lire, depuis l'apparition d'un nouveau personnage (Jacob) et parce que le rythme, malgré un mode répétitif, nous saucissonne entre ses filets. Encore une fois, je n'ai pas été déçue et cette fin ... j'en ai des vertiges.

Lucy et ses meilleures amies, Drea et Amber, sont en vacances dans une maison en bord de mer, en compagnie de Chad, PJ et Jacob. Bientôt la rentrée universitaire, la séparation, tous se détendent et profitent de l'instant présent. Une voisine de cabine, Clara, s'incruste dans leur bande et commence à semer la zizanie. Hélas, impossible de l'écarter depuis que Lucy fait des cauchemars et pense qu'elle est en danger. C'est néanmoins très compliqué de vouloir l'aider et la sauver, non seulement parce que la jeune fille n'a réussi qu'à se faire détester, mais aussi parce que Lucy elle-même est très stressée, a du mal à se concentrer et sent son couple battre de l'aile. Jacob est devenu distant et renfermé, lui aussi fait des rêves mais il refuse d'en parler avec Lucy, et les silences et les secrets sont des parasites pour un couple naissant, qui fonctionnait à l'osmose.

J'apprécie beaucoup cette série, notamment pour les rituels de magie et pour l'ambiance oppressante et nébuleuse qui y règne. L'histoire étant racontée à la première personne, il est très facile de se glisser dans la peau de Lucy, de ressentir ses émotions, partager ses cauchemars, tenter aussi de les décrypter. Et c'est là que ça devient excitant, car angoissant. Le mystère est total, beaucoup de sentiments contradictoires nous étreignent, quelques pointes de doute et autres sursauts de suspicion nous prennent à la gorge. La pression ne cesse de monter. Et comme d'habitude, le roman se termine à bout de souffle. Quant au final, il est franchement étonnant. De quoi en rester comme deux ronds de flan.

L'éditeur ne s'est pas montré cruel puisque le quatrième tome - Rouge souvenir - paraîtra en juin ! Ce sera le dernier. Yep.

Gris Secret (tome 3) ~ Laurie Faria Stolaz
Albin Michel, coll. Wiz (2010) - 300 pages - 13€
traduit de l'anglais (USA) par Valérie Le Plouhinec

la série, dans l'ordre : Bleu cauchemar - Blanc fantôme

Laurie Faria Stolaz a publié une autre série - Touch - dont le premier tome est Deadly little secret. J'ignore si cette série sera traduite en France.

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